La semaine dernière, Michelin qui est revenu au plus haut niveau de la compétition cycliste depuis 2 ans avec Cofidis, a convié la presse internationale – dont certains venus du Japon ou de l’Australie – au pied du Ventoux. Cofidis était également représenté par l’intermédiaire de son manager Cédric Vasseur ainsi que par Victor Lafay, un jeune coureur qui se remet doucement d’une blessure et qui n’est autre que le vainqueur de l’Etape du Tour 2018 Annecy-Le Grand Bornand, quelques jours seulement avant d’intégrer l’équipe Cofidis.
Si le Géant de Provence a été escaladé par l’ensemble des 25 journalistes présents, ce sont surtout les liens techniques entre le manufacturier clermontois et l’équipe nordiste qui nous intéressent ici.
Nous avons donc fait le point avec Alain Delcourt, en charge du développement vélo depuis 3 ans au milieu d’une carrière de 20 ans chez Michelin et riche d’une belle expérience dans l’entité moto.
Alain Delcourt | © Vélo 101
– Vous avez eu le temps de connaitre le temps où Michelin était sur le devant de la scène au niveau des pros, puis vous ne l’êtes plus devenu avant de revenir au 1er plan avec un partenariat technique lié à Cofidis. Est-ce bien le sens de votre récente histoire ?
C’est exactement cela avec ce partenariat, que vous venons de renouveler d’ailleurs il y a peu. Je tiens à préciser qu’il s’agit d’un vrai partenariat technique et non d’un simple sponsoring. Nous avons tissé des liens étroits avec le manager Cédric Vasseur avec qui nous avons des échanges très réguliers, notamment sur la technique justement, lors de certaines courses aux caractéristiques spécifiques (durée, conditions météorologiques et/ou terrain).
– Michelin et Cofidis, cela représente combien de pneus et boyaux sur un an ?
Nous avons un partenariat sur environ 800 boyaux utilisés en course et 200 pneus pour l’entrainement (Power All Season) ainsi qu’aujourd’hui 100 pneus en Power Time Trial, auxquels vont venir se greffer nos nouveaux pneus Power Road. A cela s’ajoute des pneus utilisés pour certains entrainements de VTT (Christophe Laporte qui roule régulièrement dans cette discipline) tout comme en cyclocross avec de bons coureurs comme Eddy Finé ou Victor Lafay (présent avec nous aujourd’hui pour grimper le Mont Ventoux) qui vont courir avec nos gommes.
– Quels sont le ou les produits qui sont issus de la collaboration avec Cofidis ?
Je reviens sur nos nouveautés pour être plus clair : nous avons en tout 5 différentes gammes dans notre nouvelle offre. Dans la gamme nous avons à présent la gamme « cœur » avec le Power Road (tubetype donc, c’est-à-dire avec chambre à air) et Power Road Tubeless Ready (sans chambre à air). Nous avons aussi le Power Gravel et Power Cyclocross (boyau et pneu), le Power All Season et la gamme Racing qui est l’objet initial de la question car directement née de nos échanges avec Cofidis : le Power Time Trial pour le Contre La Montre comme son nom l’indique et le Power Road Competition Tubular (boyaux) pour les courses en ligne.
La gamme Michelin 2020 | © Michelin
– Vous avez un ou des interlocuteurs chez Cofidis ou bien vous discutez directement et seulement avec Cédric Vasseur ?
Il s’agit d’un ensemble : nous avons beaucoup de contacts avec Cédric Vasseur qui est notre principal contact mais nous avons aussi beaucoup d’échanges entre notre service course (logistique) d’où sont issus les 800 boyaux/200 pneus dont j’ai parlé et les directeurs sportifs comme Jean-Luc Jonrond et Roberto Damiani qui sont eux sur la course. Ils nous appellent régulièrement les matins des courses pour avoir des infos sur les pressions à adopter en fonction des circonstances de course. Nous avons aussi des contacts réguliers avec Christophe Laporte pour avoir des retours techniques. Nous lui envoyons régulièrement des prototypes pour avoir son ressenti. De plus, venant du VTT il a une certaine sensibilité dans sa pratique et en tant que l’un des leaders de l’équipe c’est toujours intéressant d’avoir des informations d’un coureur ayant une telle aura.
– Par définition un pneu n’est pas très visible lorsqu’on regarde une course. Mais est-ce que vous diriez qu’un pneu peut faire gagner ou plutôt perdre une course ?
Oui, on le voit bien avec Cofidis. Quand nous avons commencé notre partenariat le but a bien été de faire gagner en confiance les coureurs. Cette confiance, ils l’avaient perdue précédemment. Dans un 1er temps, nous avons donc développé une gomme course qui était réellement dédiée au grip sur le mouillé tout en gardant évidemment en tête la résistance au roulement. Par ailleurs, pour l’entrainement, nous avions fourni des All Season, toujours dans cette même optique de tenue sur le mouillée et pour rassurer les coureurs. De plus, la bonne résistance aux crevaisons de ce modèle ajoutait encore de la valeur ajoutée à notre produit et indiquait au coureur que notre matériel était sûr. D’autant que durant l’intersaison nous savons très bien que les coureurs font de nombreux kilomètres pour se préparer et ils ont ainsi eu le temps de nous évaluer.
Une fois cette confiance gagnée auprès des coureurs et de l’encadrement, nous avons pu proposer d’autres choses comme notre produit dédié au Contre La Montre, en l’occurrence un pneu alors que les professionnels ne jurent souvent que par le boyau pour les courses.
Pour situer les choses, je prends un exemple assez parlant : sur le Tour du Haut Var cette année, il y avait une descente exigeante qui s’est faite sur le mouillé. Chez Cofidis nous n’avons pas eu à déplorer la moindre chute, alors que ça n’a pas été le cas des autres équipes. Ces dernières sont venues se renseigner auprès du staff pour savoir quels étaient les pneus qui avaient été utilisés.
Également, l’année dernière certains coureurs demandaient s’ils pouvaient attaquer en descente car ils sentaient bien qu’ils étaient en confiance par rapport à d’autres coureurs d’autres équipes.
Donc pour résumer, je pense que le pneu (ou le boyau ici, quand il s’agit de compétition) peut effectivement faire gagner de la confiance et donc des courses.
La 2ème partie de l’interview sera à retrouver mardi prochain dans le volet #33 du World Tour Maériel 101.