Le contre-la-montre individuel du Critérium du Dauphiné a redistribué les cartes entre les principaux favoris. Long de 23,5 kilomètres pour 320 mètres de dénivelé positif, il ne proposait pas de difficultés majeures avec 5 premiers kilomètres en faux plat montant, puis les 10 suivants en faux plat descendant. La seule difficulté aura été la côte de Demptézieu, longue de 2 kilomètres à 6 % de moyenne et, pour finir, un profil descendant jusqu’à l’arrivée à Bourgoin-Jallieu. Les meilleurs avaient donc ciblé une moyenne comprise entre 48 et 50 km/h. Avec un profil aussi roulant, les braquets devaient être conséquents. Logiquement un 55×11 minimum, voire 58×11 pour ceux qui parviennent à l’emmener, ce qui en termes de longueur de développement donne 10,4 et 11 mètres !
Pourquoi de tels développements ? Tout simplement pour pouvoir continuer de pédaler sur les portions descendantes. Il faut savoir qu’avec un 58×11 à 110 tr/min, vous roulez à 72,4 km/h ! Pour information, Tony Martin (Katusha-Alpecin) a enregistré une pointe à un peu plus de 80 km/h sur ce contre-la-montre !
Revenons sur le classement du contre-la-montre, qui nous a permis de déduire les puissances estimées en W/kg :
• Richie Porte (BMC Racing Team) 1er en 28’07 » : 5,97 W/kg
• Tony Martin (Katusha-Alpecin) 2ème 28’19 » : 5,93 W/kg
• Alejandro Valverde (Movistar Team) 3ème en 28’31 » : 5,83 W/kg
• Alberto Contador (Trek-Segafredo) 7ème en 28’42 » : 5,72 W/kg
• Chris Froome (Team Sky) 8ème en 28’44 » : 5,11 W/kg
• Thomas De Gendt (Lotto-Soudal) 9ème en 28’49 » : 5,06 W/kg
Analysons comment un effort sur un contre-la-montre est si spécifique ! Il faut savoir que pour lutter contre l’avancement, vous luttez contre deux résistances principales. En montée, la résistance principale est la gravité (P). Sur le plat (ou faux plat comme ce final de chrono), vous luttez contre la résistance de l’air (Ra). L’équation pour calculer la résistance totale se traduit ainsi :
RT (Résistance Totale) = Ra (traînée aérodynamique) + Rr (résistance roulement) + P (gravité)
Sur un contre-la-montre, avec un vélo profilé et le matériel adéquat, vous avez un gain de 10 % sur Ra par rapport à un vélo et équipement traditionnels. L’effort principal consiste à vaincre Ra. Nous pouvons donner des valeurs fixes moyennes afin que vous compreniez mieux ces différences de résistances :
• Ra en position CLM : 0,25 Scx
• Ra en position mains sur les cocottes : 0,37 Scx
La résistance au roulement (Rr) n’est que de 7 à 10 %. Sur du plat, la gravité est nulle. De ce fait, et pour simplifier, nous ne la prenons pas en compte sur notre exemple avec ce profil qui offre les mêmes dénivelés positifs et négatifs.
Voilà pourquoi, avec sa position si particulière et un SCx très faible, Tony Martin excelle dans ce domaine. De plus, il emploie de très grands braquets qu’il parvient à entretenir une fois qu’il est à sa vitesse de croisière. Pour ce contre-la-montre Tony Martin avait opté pour un nouveau concept de mono-plateau utilisé sur certaines épreuves de triathlon. Mais surtout le fait de ne pas avoir de dérailleur avant génère moins de perturbations aérodynamiques à ce niveau et donc un léger gain de watts.
Bien sûr, ces calculs sont simplifiés de manière à être plus compréhensibles et interprétables par tous. Il faut retenir que sur un contre-la-montre, la puissance seule n’est pas un signe de résultat. Mais la puissance associée à une résistance aérodynamique la plus faible possible vous sera plus bénéfique. – Stéphane Cognet