Tous les coureurs vous le certifieront : c’est en juillet qu’ils empruntent les plus belles routes du monde. Pas seulement parce que le Tour visite la France et sa multitude de paysages enchanteurs, mais aussi parce que la course la plus importante du calendrier ne laisse rien au hasard. Ses routes impeccables au passage du peloton sont soignées par l’Assemblée des Départements de France. « Notre mission, c’est la sécurisation de l’ensemble du tracé, introduit André Bancalà. C’est un travail qui commence dès l’annonce du parcours du Tour en octobre. Grâce aux locaux qui connaissent les routes qu’empruntera la course, nous intervenons d’abord en qualité de conseillers, mais les organisateurs restent maîtres de leur itinéraire. »
Au cours des reconnaissances réalisées en amont, tous les pièges de la route sont relevés. Et ils sont nombreux, de plus en plus nombreux. Depuis 1997 et son premier Tour de France, André Bancalà a vu le paysage routier évoluer. Ses équipes ont dû s’adapter. « On a vu fleurir les ronds-points et terrepleins centraux, désormais ce sont les ralentisseurs de toutes sortes qui se multiplient. Cela nous a amenés cette année à créer deux nouvelles signalétiques. » Ces grands panneaux jaunes qui préviennent d’un ralentisseur prononcé ou de ralentisseurs successifs viennent s’ajouter à la douzaine de signalétiques (rétrécissement, giratoire, virage serré…) dont les panneaux sont posés le matin-même de la course par les équipes RDF. Avec de nouveaux records enregistrés cette année : 55 ronds-points sur une même étape vers Bagnères-de-Bigorre, 36 ralentisseurs dans celle du Grand-Bornand et jusqu’à 30 rétrécissement sur une seule étape.
Mais la mission des Départements ne se résume pas à la seule signalisation des aménagements urbains. Chaque matin, une balayeuse parcourt la route de la course, brossant systématiquement les descentes et montées de cols et l’intégralité des parcours chronométrés. Déjà, les routes ont été préparées par le Conseil Général, qui a prépositionné les ballots de paille (10000 ont été utilisés durant le Tour) et dont les responsables locaux font remonter les informations à André Bancalà au matin de l’étape du jour. « Hier par exemple, on m’a informé d’un affaissement de terrain sur la route que devait emprunter le Tour. Des équipes ont travaillé de nuit pour boucher le trou, sans quoi il nous aurait fallu baliser ce passage. »
Quoi qu’il arrive, les routes sont scrupuleusement inspectées par différentes équipes successives. Un équipier RDF expérimenté accompagné d’un responsable local partent devant la caravane publicitaire, à l’affût du moindre danger. Rubalises, cônes et balisettes sont systématiquement retirés en raison du risque qu’ils représentent pour les coureurs. Les bouches d’égout sont retournées dans le bon sens de manière à ce que les roues ne s’y engouffrent pas, signalées par de la bombe fluorescente ou tout bonnement recouvertes. Et l’état des routes sujettes au gravillonnage ou au ressuage examiné.
Juste avant la course, les interventions sont multiples. « Ça peut aller du foin coupé par un agriculteur qui a volé sur la route à une fuite de gasoil d’un véhicule suiveur qu’il convient d’éliminer avec un produit absorbant, précise André Bancalà. Nous veillons aussi à fermer certaines routes latérales avec ce qu’on peut : un véhicule de gendarmerie, un véhicule de particulier ou tout simplement des spectateurs ! » Dans le Semnoz, c’est un passage canadien (utilisé pour éviter que les animaux ne fuient les alpages pour descendre dans la vallée) qui a dû être comblé. D’autres aspérités dans le revêtement sont parfois bouchées à la dernière minute, comme ce fut le cas à Saint-Malo.
L’inspection du parcours se poursuit après le passage de la caravane, une demi-heure à une heure avant le passage des coureurs, avec une dernière équipe balayeuse. « Un dernier regard avant la course qui nous permet de chasser les gravillons projetés sur la route par la caravane, de nettoyer des coulées de boue les jours de pluie et de vérifier l’état de la chaussée. » Avec une attention toute particulière portée à la fonte du goudron, quand la température au sol atteint 55° (le maximum enregistré fut de 63° aux Rousses en 2010). Pour prévenir la dégradation de la chaussée, de l’eau y est déversée en grosse quantité. La balayeuse peut répandre jusqu’à 2000 litres d’eau et réapprovisionner ses cuves en huit minutes, l’idée étant de détremper la route. Au total ce sont 70 tonnes d’eau qui auront été déversées sur les routes de France.
Pour faire de la route du Tour le plus bel endroit de la Terre.