Il est clair qu’une émulation entre ces 2 Champions leur permet d’élever leur niveau mais derrière ces deux-là, les écarts sont très importants. Michael Vanthourenhout et Tom Pidcock ont bien fait illusion en début de saison, mais c’était avant que les 2 monstres du cyclo-cross ne « mettent en route ».
Mais se pose aujourd’hui la question pour ces spécialistes des sous-bois, qui ont raflé à eux 2 les 7 dernières éditions des Championnats du Monde : doivent-il poursuivre leurs hivers en cyclo-cross ou se consacrer pleinement à la route voire au VTT (pour le Néerlandais) ?
Mathieu Van der Poel s’échappe sur les Championnats du Monde 2021 | © UCI
Pour
Les 2 coureurs ont été « élevés » dans cette discipline. Au-delà du fait qu’il s’agit d’une pratique beaucoup plus ludique que le fait d’aligner les heures de selle sur la route sur des séances d’endurance, les qualités travaillées en « cross » sont très importantes et ont façonné les cyclistes qu’ils sont devenus aujourd’hui. Adresse, placement, explosivité, force/vélocité sont autant de caractéristiques qui leur ont permis de devenir parmi les meilleurs coureurs du monde.
Leur saison hivernale est ainsi faite de stages sur route au soleil et de périodes de courses, souvent en Belgique. On n’a rien trouvé de mieux pour éviter la monotonie des préparations classiques d’avant saison. Et cela n’empêche en rien de briller dès le début de saison routière, bien au contraire. Avec une fraicheur physique qui est potentiellement supérieure puisque le volume global d’entrainement est inférieur chez les cycrossmen par rapport aux routiers purs.
De plus, en disputant ces courses dans un faible rayon géographique (le plus souvent en Belgique), il est possible de courir souvent (15 à 20 cross sur une saison d’hiver) en s’épargnant de longs transferts fatigants. Sur toutes ces épreuves, une communauté de fans de la discipline élève les coureurs au rang de stars. C’est une ambiance qui plait à ces mêmes coureurs, avec le fait de disputer les courses sur de véritables stades à ciel ouvert, réunissant des milliers de spectateurs – dans une année normale – sur une faible superficie.
Wout Van Aert brille sur la route | © Jumbo Visma
Contre
4 titres mondiaux pour Van der Poel, 3 titres pour Van Aert. S’ils continuent dans cette voie, ils pourraient très bien ajouter d’autres lignes à ce palmarès. Pour égaler voire dépasser Eric De Vlaeminck et ses 7 Championnats. Pourtant d’une part, l’obtention de ce record n’est pas une garantie car il est facile d’imaginer que les 2 coureurs actuellement en activité vont se partager les victoires et donc augmenter le temps permettant de se positionner par rapport à De Vlaeminck. Mais surtout, est-ce une réelle fin en soi le fait de courir après les records ?
Car à l’inverse, même si MVDP et WVA s’arrêtaient à leur total actuel, pourrait-on leur reprocher un manque de résultats ? La réponse est « non » évidemment.
Dans le même temps, l’appel de la route, un palmarès à continuer de construire, une variété de courses plus importante, des adversaires plus nombreux qu’un éternel face à face, sont autant de défis qui sont probablement plus motivants sur le long terme.
Si tous les 2 ont déjà rempoté quelques-unes des plus belles courses du calendrier, beaucoup de beaux chapitres restent à écrire. Sans compter que financièrement, gagner sur la route permet des retombées plus importantes.
Ce plan de carrière est d’ailleurs celui suivi par Zdenek Stybar, qui avait considéré qu’après 3 titres de Champion du Monde (dont le dernier en 2014 soit un an avant le règne de notre tandem du jour), il avait fait le tour de la question et que tout restait à prouver sur la route.
Tout ceci indique qu’il est difficile de faire à la fois :
– L’hiver à bloc en cyclo-cross
– Le printemps en brillant sur les Classiques
– L’été avec ses retombées sur le Tour de France
– L’automne pour aller chercher un maillot irisé
Souffler pendant l’hiver permet au moins de garder davantage d’énergie sur le reste de la saison, tant physiquement que mentalement.
Van Aert grimpe en montagne | © Jumbo Visma
Pour le moment, tant Van der Poel que Van Aert n’ont pas fait état de leurs intentions. La décision sera probablement prise au cours des mois qui viennent, pesant le pour et le contre de chaque option, en accord également avec leur employeur. A ce sujet, Alpecin Fenix semble permettre une large souplesse de programme à Van der Poel et c’est d’ailleurs l’une des raisons qui ont poussé le coureur à choisir cette équipe. Dès lors, il est possible d’imaginer qu’à l’automne prochain, le petit fils de Raymand Poulidor ait davantage envie de sable et de boue que d’escaler les cols de l’arrière-pays andalou jusqu’à plus soif.
Par Olivier Dulaurent