Dernière victoire d’un français à Roland-Garros : 1983 avec Yannick Noah.
Dernière victoire d’un français sur le Tour de France : 1985 avec Bernard Hinault.
La similitude est trop grande pour y voir une quelconque coïncidence. Dans les 2 cas, la victoire n’est pas passée bien loin, une fois même à moins de 8 sec mais le constat est là : pour ces événements sportifs, il faudra attendre et encore attendre.
Est-ce que le futur vainqueur français du Tour est déjà né ? Ce n’est même pas sûr tant le futur crac est toujours annoncé mais jamais gagnant.
Une certaine stagnation
Il existe un probable souci de formation et de progression en France. Un rapide coup d’œil au palmarès du Tour de l’Avenir donne les vainqueurs suivants : 2016, David Gaudu, 2017, Egan Bernal, 2018, Tadej Pogacar. Quand on voit que le 2ème nommé a déjà gagné le Tour et que le 3ème est encore en lice pour le faire, on mesure à quel point David Gaudu en est encore loin. Il est certes au niveau international comme en attestent quelques performances en tant qu’équipier ou même quand le staff lui a laissé jouer sa carte personnelle, mais à l’heure actuelle il est impossible de l’imaginer franchir toutes les marches devant élever son niveau jusqu’à jouer la gagne sur le Tour. Certes, il a encore du temps devant lui quand Froome ou Roglic se sont révélés sur le tard mais pour l’heure, à coup sûr sa progression est ralentie.
A l’inverse, il est toujours possible de citer Marc Soler vainqueur du Tour de l’Avenir en 2015 et qui tarde à concrétiser au niveau des 1ers rôles mais la ligne précédente au palmarès (2014) laisse apparaitre un certain Miguel Angel Lopez, autre « héros » du Tour 2020.
D’autres vainqueurs français tels que Romain Sicard ou encore Warren Barguil n’ont pas pu concrétiser à très haut niveau sur la durée d’une saison ou d’un Grand Tour, malgré ça et là de belles victoires.
Thibaut Pinot au repos dans sa chambre | © Groupama FDJ
Une question d’encadrement
Dès lors, il est possible d’imaginer que l’encadrement des équipes françaises ne propose pas le meilleur pour les français eux-mêmes. Les exemples sont nombreux :
– Warren Barguil justement n’a pas encore retrouvé en France le rendement qui était le sien chez Sunweb. A ce propos, nous suivrons avec intérêt le passage de Romain Bardet dans cette même équipe, lui a qui su amener une approche « étrangère voire anglo-saxonne » au sein d’AG2R La Mondiale. Il est facile d’imaginer que le sérieux de l’encadrement de Sunweb va coller parfaitement à ce garçon qui est toujours attentif à soigner les moindres détails.
– Julian Alaphilippe, que les équipes françaises ont littéralement raté, performe à très haut niveau au point d’avoir été désigné le meilleur coureur du monde (Vélo d’Or) en 2019.
– Dans un passé un peu plus lointain, Laurent Jalabert a réalisé ses meilleures saisons à l’étranger, notamment chez Once. Il n’est d’ailleurs jamais revenu en France après son passage chez les espagnols.
– Sylvain Chavanel a eu les meilleurs résultats de sa carrière au sein de l’équipe Quick Step. Certes, cela correspondait aux meilleures années de son potentiel physique mais pour celui que le peloton appelait « la machine », les années françaises (avant et après Quick Step) ont été en deçà en termes de résultat.
A partir de ce constat, il est plus que tentant de penser que Thibaut Pinot ou Guillaume Martin auraient un meilleur rendement s’ils quittaient respectivement Groupama FDJ et Cofidis. G. Martin vient justement d’une équipe étrangère mais dont les moyens sont incomparablement inférieurs à ceux des grosses écuries. Moyens qui empêchent d’aller chercher les détails qui comptent sur le matériel, le suivi nutritionnel et d’entrainement, les stages en altitude. Ces aspects qui peuvent faire la différence quand la victoire se joue à quelques watts près sur la dernière montée d’une arrivée du Tour de France.
Une équipe comme Groupama FDJ soigne pourtant de nombreux aspects liés à la performance. Thibaut Pinot avait par exemple suivi les conseils diététiques d’un des meilleurs experts en la matière avec Denis Riché. Frédéric Grappe et le frère de Thibaut, Julien, œuvrent au sein du centre de la Performance. Ils sont à la pointe de tout ce qui touche l’entrainement. Pour autant, tant pour Thibaut Pinot que pour David Gaudu, les questions ne sont peut-être pas à chercher du côté des watts mais plutôt au niveau du mental. Le moteur, ils l’ont tous les 2 mais celui-ci est probablement influencé par le nombre de grains de sable qui interfèrent dans la mécanique. Dans leur staff, les qualités humaines de Marc Madiot ne sont pas à remettre en cause mais pour un champion fragile mentalement comme Pinot, il est étonnant de noter que l’aspect du suivi psychologique est si peu évoqué dans la préparation.
Guillaume Martin | © Cofidis
Tous au même niveau pour la lutte anti dopage ?
Lorsque l’on observe globalement le comportement des Français en général et de Guillaume Martin en particulier, il est difficile de ne pas voir un déclin de ce dernier à partir du milieu de la 2ème semaine. Il n’est pas le seul dans ce cas, Rigoberto Uran ou encore Adam Yates n’ont pas été au même niveau dans les Alpes que dans les Pyrénées. A l’inverse, d’autres coureurs n’ont pas subi de baisse de niveau sur l’ensemble des 3 semaines.
Le confinement a conduit à faire baisser de 90% le nombre de tests réalisés dans le peloton lors des deux premiers mois de l’épidémie. Ceci a pu conduire certains à s’entrainer davantage et d’autant plus dur… avantages dont ils peuvent aujourd’hui bénéficier.
Sur tous ces sujets sensibles, n’ayant pas de preuves je ne vais pas m’aventurer plus loin mais les questions liées ont fini par arriver aux micros des Roglic et autres Van Aert qui ont dû y répondre cette semaine. Cela a même conduit Romain Feillu à sortir de son silence pour évoquer les 2 cas, « le Slovène » et Jumbo Visma. Si l’on peut lui reprocher de dire aujourd’hui ce qu’il n’a pas dit hier, il n’empêche que les watts eux, ne peuvent pas mentir.
Par Olivier Dulaurent