On ne devait plus les reprendre à ce petit jeu. À la suite du Tour de France 2019, la formation ibérique avait renoncé à poursuivre sur les Grands Tours avec trois leaders.
Les départs de Mikel Landa (pour Bahrain-Mérida), de Nairo Quintana (pour la formation française Arkéa-Samsic) et de Richard Carapaz (pour Ineos) allaient dans ce sens. En 2020, les trois leaders désignés de l’équipe avant la saison avaient chacun leur Grand Tour pour performer : le Tour d’Italie pour Marc Soler, le Tour de France pour Enric Mas et le Tour d’Espagne pour Alejandro Valverde. Oui mais voilà, ça c’était avant la pandémie mondiale de Covid-19 et finalement après un Tour de France moyen (0 victoire d’étape mais une 5ème place au général avec Enric Mas et une victoire au classement par équipe), la Movistar a décidé d’aligner son triumvirat sur le Tour d’Espagne. Très impressionnante collectivement sur les premiers jours de course, notamment avec un grand Marc Soler, l’équipe dirigée par Euzebio Unzué est retombée dans ses travers. Incapable de trancher entre Mas et Valverde pour le poste de leader, embourbée dans une stratégie de durcissement de la course sans que le leader passe à l’acte derrière… Tel a été le calvaire de la formation espagnole. Malgré une victoire d’étape, un succès au maillot blanc et une nouvelle victoire au classement par équipes (preuve de leur domination au niveau collectif), la tactique de cette équipe laisse à désirer.
Les Movistar comme les autres équipes affrontent les conditions compliquées d’une Vuelta automnale | © Movistar
Aucune évolution stratégique en 3 ans
Car finalement, c’est bien de cela dont il s’agit. Depuis un an, la stratégie de la Movistar n’a pas évolué. On ne reproche pas à cette équipe l’absence d’un top coureur dans son effectif pour gagner un grand Tour. On attend plus de cohérence tactique à des moments clés de la course. Les deux petits succès glanés cette saison illustre que l’équipe Movistar a touché le fond en 2020. Aucun coureur de cette formation n’a connu les joies d’un podium du classement général sur un grand Tour cette saison. C’est seulement la troisième fois de la décennie que cette situation se produit (après 2011 et 2018), mais c’est déjà la deuxième fois en 3 ans. Des résultats durs pour l’une des équipes qui compte le plus de Grands Tours à son actif et dans sa musette (15 victoires depuis sa création). Pourtant de nombreux coureurs de talents composent ce groupe. Les équipiers ne durcissent pas des courses relevées par hasard, surtout avec l’accumulation des efforts au fil des jours de course. De plus, les victoires régulières au classement par équipes montrent que Movistar est armée pour la montagne. La séparation des leaders en 2021, sur leur Grand Tour respectif, permettra probablement d’avoir une équipe soudée avec des objectifs clairs et prédéfinis.
Movistar prend la course en mains mais pour un résultat médiocre | © Movistar
Des questions sans réponses
Comment expliquer ce contraste ? À force d’être moquée, la formation ibérique suscite l’agacement de ses adversaires et la polémique. À l’image de la dernière étape de montagne de la Vuelta 2020, à l’Alto de la Covatilla, où de nombreux anciens coureurs de cette formation (dont Purito Rodriguez qui tweetait : heureusement que je n’avais pas de télé aujourd’hui !) ont reproché aux coureurs de la Movistar de collaborer avec un Primoz Rogic, isolé, pour défendre leur 5ème place. La communication dans l’équipe est-elle bonne ? La série diffusée sur Netflix, « Dans la roue de l’équipe Movistar » montrait déjà l’an dernier des dissensions internes l’an dernier. Cette situation a-t-elle pu perdurer en 2020 ? Les directeurs sportifs sont-ils à la hauteur de l’enjeu ? Quand on compare avec le mode de fonctionnement de la Jumbo-Visma avec ses trois leaders, on est en droit de de se demander s’il y a bien un pilote dans l’avion Movistar ? La période hivernale va permettre à l’encadrement de remettre les choses à plat. Avec l’ambition de remporter ou de briller intelligemment sur un Grand Tour en 2021.
Par Maxime Lacaze