A l’heure ou des milliers de cyclistes Allemands arpentent les allées de l’Eurobike 2017 et au moment où se prépare le communiqué final, forcément victorieux, le plus grand salon du vélo au monde est en droit de s’interroger sur la mutation qu’il vit maintenant depuis plusieurs années.
La migration a débuté avec Specialized puis s’est accélérée, comme sur les 15 derniers kilomètres d’une étape promise aux sprinters. Trek, Assos, Pinarello, Focus la marque Allemande qui ne vient plus sur « son » salon, et cette année c‘est la curée : Canyon, Cannondale, Giant, Orbéa, Lapierre, Mavic, Corima, Time, Go Pro, Rapha et bien d’autres, ont déserté le cadre bucolique du lac de Constance pour s’assurer de la fidélité de leurs clients lors de séminaires, démonstrations, avant-premières, ….où la marque et ses revendeurs sont en osmose et pas à la merci des marques concurrentes, une fois quitté le stand de la marque invitante.
Les absents ont-ils eu tort ? Au vu de l’affluence dans les allées, certes un peu moins de monde mais pas énormément, au vu du nombre de journalistes présents, la même chose à peu près, et au vu des mètres carré vendus, les marques plus urbaines et les modèles plus électriques ont pris la place ; on pourrait répondre qu’ils auraient dû être là. Pour ce qui est de l’efficacité de leurs opérations de substitution à ce salon, on leur fait confiance pour bien mener ça, donc sans doute, ont-elles fait des économies et assurer leurs présentations des gammes 2018.
Pour pallier ces absences de plus en plus voyantes, l’organisation a choisi de déplacer le salon début juillet 2018, avec des journées tests en Autriche du 4 au 6 juillet, puis des journées pros du 8 au 10 juillet. Tout ça pour mieux se caler aux sorties produits, aux nouveautés qui sont présentées de plus en plus tôt dans la saison et donc pour mieux coller aux objectifs des marques : mettre en avant rapidement leurs gammes et engranger les commandes le plus tôt possible. Raisonnement qui se tient sauf que 2 mois en moins pour les marques, c’est une sacrée accélération du calendrier. Par ailleurs, coupe du monde de foot oblige, le 7 juillet 2018, c’est le grand départ du Tour en Vendée, là où est la presse internationale, là où sont tous les managers, les décideurs des équipes, etc… qu‘on voit tous arpenter les allées d’Eurobike, à la recherche de nouveaux partenaires et pour ça le Tour est, était dans le cas présent, une formidable vitrine pour faciliter (ou pas) les négociations. Ne parlons pas de la presse qui, assez légitimement , a moins de lecteurs, donc moins de moyens pour se dédoubler dans de telles circonstances. Il va falloir faire des choix.
On se doit d’être constructif et parler des constructeurs qui étaient présents, le salon avait encore une belle allure pour le moins, et c’est toujours un plaisir des yeux de voir autant de recherche, de développement, d’ingénierie développée pour satisfaire un marché qu’on présente comme le nouveau golf et qui conquiert de plus en plus d’adeptes, hommes et surtout femmes, nouveaux pays, nouvelles pratiques : l’électrique en VTT, comme en route et surtout en urbain amène un nouveau public, plus en recherche de novations, plus élevé socialement et qui a encore moins les réflexes de chercher par tous les moyens à « acheter moins cher que le petit copain ». La vedette du salon a été incontestablement le vélo Bianchi SF 01, développé avec les ingénieurs Ferrari que nous vous présentions ce samedi. Ferrari, Pirelli pour les pneus, après le rachat de Pinarello par LVMH, et celui de Rapha par une famille américaine avec une valorisation de l’ordre de 200 millions d’Euros pour un chiffre d’affaires de 68; on confirme, oui, le vélo a un bel avenir, et les grands groupes s’y intéressent de plus en plus ; un signe qui ne trompe pas et c’est tant mieux.
Toutes les marques présentes : Scott-Bianchi, donc, Colnago, Look, Merida, Ghost, Corratec, pour les Allemands, Rocky Mountain, Yeti, pour le VTT et tous les grands accessoiristes : Shimano, Campagnolo, Sram, FSA, ….Tout ce beau monde a développé son offre avec un chaque fois deux leitmotivs : plus de versions disque et à chaque fois ou presque des déclinaisons assistance électrique ; comme si les tergiversations de l’UCI sur le premier chapitre ne freinaient pas les initiatives car de plus en plus le consommateur, le cyclo choisit le disque, gage de sécurité, ne parlons pas des conditions humides, celles de l’Allemagne pendant ce salon, un vrai temps pour aller aux champignons!
Pour aller faire du vélo quand on est une fille, rien de mieux que des modèles pensés et conçus pour le public que les marques pionnières comme Rapha, G4 Dimension, Fizik ou Selle Italia pour les selles, Castelli, Sportful, Craft, Pearl Izumi, Gaerne pour les chaussures. Toutes ces marques ont bien compris l’intérêt de développer des produits, des gammes spécifiques. Les magasins l’ont aussi compris, enfin certains, aux Etats-Unis. Des magasins font 20% de leur chiffre d’affaire sur les modèles féminins.
Moins d’exposants, c’est aussi un peu moins de convivialité et de 3ème mi-temps apéritives ! Histoire de refaire le monde et de recharger les batteries. On regrettera Lapierre et son invitation typiquement Bourguignonne vin ET fromages dont l’Epoisse! Vive l’Italie aussi ! Avec Selle Italia et ses antipasti, primo piatto, e dolce dal ristorante Al Pioppeto situé à Romano d’Ezzelino entre Vicenza et Venise. Bravo aussi à Scott, Elektra, Enve, entre autres d’avoir maintenu les bonnes traditions, bien vu les bretelles Scott, typiquement Bavaroises !
En selle pour la partie gossip, typique de l’Eurobike future ancienne version, la rubrique transferts. D’abord, côté distribution, Selle Italia va désormais être pilotée par Tribe Sport Group qui se dirige ainsi toujours plus vers la route, avec TRP entre autres. Pas mal d’autres (belles) marques pourraient bouger, on vous tiendra au courant, Pirelli c’est fait puisque RVF est confirmé, comme on vous l’avait laissé entendre, sans en dire plus, au mois de juin dernier. Côté coureurs, un nom revient souvent celui de Fabio Aru, rejoindra-t-il les ambitieux team Emirates ? Pourrait-il remplacer Alberto Contador comme leader chez Trek-Segafredo ?? Ça bouge, mais en coulisses, alors, on se tourne vers les équipementiers.
Et là, c’est en France que ça se passe, on a croisé ou aperçu tous les managers d’équipes françaises, ceux qui cherchent des accessoires sans doute : Armée de Terre, AG2R La Mondiale, FDJ (changement de partenaire selles??) ou celles qui changent de marque de vélo : Cofidis, Direct Energie, Fortunéo-Oscaro, peut-être, HP Auber 93 ou ceux qui montent leur projet comme Jérôme Pineau qui roulerait en Orbéa en 2018. Faîtes vos jeux, rien ne va plus, BH quitte Direct Energie et s’intéresse à la future équipe de Warren Barguil. Cannondale-Drapac arrêtera vraissemblablement l’équipe World Tour mais pourrait fournir Cofidis. Time et HP Auber c’est fini et ça pourrait parler Italien ! BMC, chez qui la tendance est à laisser plus de visibilité, donc de prise en charge de budget à Tag Heuer, pourrait aller vers une seconde équipe française de niveau Continental Pro. Côté féminines, FDJ Futuroscope cherche un partenaire casque… Bref les négociations vont bon train et on suivra ça au mieux.
Eurobike 2017 est derrière nous, place au Roc d’Azur dans un peu plus d’un mois, un vrai beau salon de consommateurs, VTT bien évidemment, mais de plus en plus route, Vélo 101 y sera avec un stand extérieur, lecteurs, coureurs, magasins, organisateurs… Vous êtes les bienvenus, on vous annoncera des nouveautés côté éditorial, mais pas que… À bientôt et roulez bien, il y a encore plein de magnifiques épreuves à arpenter.