La tour géante qui ressemble à une cheminée d’usine, implantée à Korbach à deux heures au nord de Francfort, domine son monde depuis 1907 et voit défiler depuis tout ce temps la production de pneus vélos. Continental, le géant allemand du pneumatique (créé en 1871), est typique de l’industrie allemande. Un siège et la partie administrative à Hanovre, d’où le cheval cabré du logo symbole du land, et une production éclatée en trois endroits. L’Inde pour la version entrée de gamme, la Chine pour la gamme Performance, et donc Korbach pour le haut de gamme. Ici, 400 personnes s’activent six jours sur sept sous le régime des trois-huit pour assurer une production de haut niveau.
28 % du chiffre d’affaires, c’est ce que représente la division pneus chez Continental, une des cinq branches d’activité qui compose l’ensemble : 220 000 employés et 40,5 milliards d’euros en 2015. Parmi les autres entités, la partie prospective œuvre entre autres sur les moteurs électriques, où l’on devrait retrouver Continental dans les prochaines années. Vélo, VTT, gravel, city, moteurs électriques, l’heure est à la mobilité douce. A l’échelle d’une société où le pneu auto-moto et tout ce qui va à l’industrie est largement majoritaire, c’est une révolution. Mais il faut s’accrocher, coller aux tendances, anticiper les évolutions, en un mot Get The Grip, le slogan de Conti.
Côté anticipations, l’équipe marketing de Continental a tous les atouts pour noircir les feuilles blanches. Implanté dans 55 pays, avec 317 représentations sur les cinq continents, présent sur tous les segments (sauf peut-être les pneus d’avion), Continental n’a pas choisi d’être présent sur la Formule 1 mais fournit tout ce qui se déplace. Que ce soit côté urbain ou côté campagne, synonyme de route, de VTT, de gravel, etc. Un état d’esprit incarné par le partenariat signé avec Danny MacAskill, l’extraterrestre du vélo, star de YouTube et des réseaux sociaux. Cliquez sur ce nom, montez le son et appréciez ! Même ses manqués sont plutôt réussis, c’est dire…
Toutes les tendances du moment (vélos connectés, disques, électrique, marché féminin avec les 650, aérodynamique poussée, gravel…), toutes les novations du vélo ont une influence directe sur les pneus route. Pour le VTT, c’est l’enduro, le 27.5, le B+, le E-MTB, le marché féminin, voire aussi tout ce qui est rando, voyages avec des sacoches bien pesantes. Même chose côté urbain. Le style, la mode, le vélo à assistance électrique, les coursiers à vélo, quel que soit le monde et le mode de transport, le pneu est impacté et Continental se doit d’agir et d’être proactif sur son marché. Sur ses marchés.
Le facteur humain est décisif. Tout part d’une carcasse en nylon extensible dans un seul sens qu’on va croiser, de tringles rigides et/ou souples à base de kevlar. On parle de TPI (threads per inch, soit le nombre de fils par pouce) : 110 TPI pour le Continental Grand Prix, 60 pour le VTT qui suppose moins de pression qu’en route, 28 pour les pneus d’entrée de gamme. Un pneu est composé pour 30 à 60 % de gomme, pour 15 à 30 % de silice et pour les 10/15 % restant de composants qui vont donner sa couleur au pneu par exemple. La qualité de gomme est donc l’élément décisif d’un pneumatique. La composition d’une gomme est essentielle et chaque marque protège ses secrets. Le Black Chili sera différente selon qu’on la destine au VTT cross-country où le rendement va être essentiel, ou qu’on la destine au VTT descente ou le grip est primordial pour accrocher au terrain et, partant, accrocher un résultat. Le rendement, l’accroche et la durée de vie, voire la résistance à la crevaison, tels sont les maîtres-mots pour qui réfléchit à l’élaboration d’une gamme.
Autre paramètre essentiel pour rendre passionnant le sujet « recherche », la composition des flancs et de la bande de roulement n’ont pas le même cahier des charges. Accroche d’un côté, meilleur roulement de l’autre, et résistance à la crevaison. D’où l’utilisation du Vectran, un tissu très fin et très résistant, sur les modèles les plus haut de gamme comme sur le Grand Prix 4000 qui reste, année après année, le modèle phare de Conti. A côté du Vectran, on trouvera le Duraskin, comme sur le Grand Prix 4 Seasons, modèle où la résistance à la crevaison et aux abrasions est le critère primordial.
Un peu comme une course à étapes placée en avant du Tour, six étapes sont nécessaires à l’élaboration d’un pneu. D’abord, il y a le rouleau sur lequel on pose le nylon, ensuite on rajoute les tringles, puis c’est le rollover (le nylon est rabattu en diagonale, car extensible d’un seul côté, puis on met trois plis sur la bande de roulement contre deux sur la carcasse). En étape quatre, on rajoute le Vectran ou ses cousins pour assurer la protection en même temps que le renfort nylon sur les tringles. Vient alors la pose de la gomme puis du label, avec les logos de la marque et du produit. L’étape finale, comme sur tout bon scénario de course, consiste à placer la vulcanisation. C’est l’opération la plus spectaculaire car c’est là, sous présence humaine essentielle, que le pneu est cuit, que la gâteau prend son aspect définitif. A découvrir demain dans notre galerie photos.
Les étapes suivantes incluent contrôle qualité avec des paramètres comme la vitesse poussée à certains maximums, la pression pour le déjantage, la dimension exacte du pneu, la variété des obstacles rencontrés, le poids du pilote et la charge à porter, tout cela en milieu hostile (clous, lames, silex, chaleur, humidité). Redemandez-en encore, la sécurité du consommateur est à ce prix !
Côté nouveautés, pour 2017 et déjà un peu 2018, Continental a développé le pack Force et Attack avec un pneu avant en 23 millimètres pour l’aérodynamique et le poids, un pneu arrière en 25 millimètres pour le confort (en baissant de 0.5 bar par exemple) et un meilleur roulage : on gagne entre 9 et 12 % d’efficacité au roulement entre le 23 et le 25 millimètres. Entre 2011 et 2016, Continental est passé de 11 % des ventes pour le 25 mm à 42,7 %. Le pack avant-arrière permet donc de matcher parfaitement les plus de chaque pneu et section tout en répondant à la demande vers de plus larges sections.
Autres nouveautés, sous forme de festival. Le Grand Prix 4000 S II. De la couleur (bleu, rouge, jaune, vert, rose et orange) pour l’Ultra Sport II. Un Grand Prix Urbain en 35 mm. Un Grand Prix 4 Season en 28 et 32 mm en gravel, ou encore le Speed King CX proposé en 32 et 35 mm. Pas mal de produits nouveaux sur tous les types, que ce soit pneus ou boyaux, toutes les sections, tous les usages, et à tous les niveaux de performance.
Trop long pour tout vous présenter ici, c’est justement là que le facteur humain intervient de nouveau. Pour la France, les agents Conti sont le Continental Circus à ma droite, CPA comme Artistes! 4 commerciaux pour couvrir le territoire, et une escouade de cinq mousquetaires associés à ma gauche, tous en SARL : double Stéphane, Damien, Jean et David, un spectacle a eux tous, un mélange de farces à l’accent provençal et attrapes bonne humeur. Assurément ils font le show sur des vélos, Eddy Merckx en plus. Si vous les poussez un peu, et surtout si vous commandez les cinquante paires plus une (vous voyez !), ils pourront vous faire un spectacle privé lors du Roc d’Azur. Chiche !