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Infographie présentant l’ensemble des parcours du 3 Grands Tours au XXIe siècle | © Romain Courvoisier
L’export, une classique
La première chose frappante, sur cette carte, c’est justement le nombre de carte. Outre la botte italienne, figurent les contrées danoises, irlandaises, néerlandaises et même israéliennes, sans oublier que si cette infographie était mise à jour en mai prochain, elle comprendrait également la Hongrie. Par rapport à la Vuelta, le goût pour l’étranger du Giro est saisissant. Dans sa volonté de rivaliser avec le grand Tour des Grands Tours, il a tout fait pour élargir et amplifier sa médiatisation et aller conquérir de nouveaux publics sur leurs terres. En effet, au vu de la topographie de ces premières étapes, il est clair que cette politique n’est pas liée à des critères sportifs. L’incursion en terres saintes en a d’ailleurs été le paroxysme, avec le souvenir de longues traversées du désert, au sens propre du terme.
Le passage du Giro en Israël | © Giro d’Italia
En fait, cet export traduit l’évolution de la course, quittant soudainement une ère 100% italienne entre 1997 et 2007 pour voir son peloton, ses vainqueurs et ses sponsors se diversifier à vive allure. Les Italiens se font de plus en plus rares sur les podiums, l’épreuve connaît une popularité croissante à l’étranger, et c’est tant mieux pour le prestige du Giro. Finalement, le fait qu’Attila Valter endosse le maglia rosa en prélude à son Grande Partenza national est une manière de boucler la boucle.
La course aux hauteurs
Infographie de l’ensemble des parcours du Giro au XXIe siècle | © Romain Courvoisier
Face à la légende du Tour en tant que « plus grande course du monde », le Giro s’est historiquement bâti sur la réputation de l’épreuve « la plus dure du monde », et ce dès ses débuts. Routes empierrées, montées infernales, conditions météorologiques dantesques… Les organisateurs successifs n’ont pas manqué d’inventivité pour rendre la vie dure aux coureurs. Si leurs plus folles idées ont aujourd’hui été abandonnées (on retiendra notamment la descente chronométrée du Poggio en 1987), la ruée vers les sommets enneigés est restée dans la tradition. La concentration de l’infographie sur les massifs et montagnes en témoigne, couvrant de rose les Alpes et les Dolomites, parcourant les Apennins et sillonnant les environs de l’Etna. Elle traduit la composition ordinaire du parcours du Giro, remontant en une dizaine de jours l’Italie pour laisser ensuite place à une seconde partie de course consacrée aux grandes étapes de montagne, propices aux belles envolées et aux grandes luttes.
Le pouvoir de l’argent
Carte présentant la qualité de vie selon les provinces italiennes en 2006
Enfin, il est intéressant de s’apercevoir que ces disparités géographiques sont corrélées avec des inégalités économiques au sein du territoire italien. En effet, il est connu que le niveau de vie augmente à mesure que l’on remonte vers le nord du pays, enrichi au XIXe siècle par une industrialisation rugissante. Or, accueillir le Giro coûte cher. S’il n’y a pas de tarifs fixes comme pour le Tour France, les négociations privées commencent à 10 000 euros pour une arrivée et peuvent s’envoler jusqu’à 120 000 euros pour une arrivée (le Grand Départ d’Israël a même rapporté 4 millions d’euros à RCS, l’organisateur du Tour d’Italie). Dans de telles conditions, il est difficile d’imaginer comment des collectivités durement touchées par la pauvreté puisse s’offrir le passage des girini. Ainsi, en ce sens, l’infographie traduit parfaitement les difficultés économiques des Pouilles, de l’ouest de la Sicile ou du sud de la Sardaigne tout en consacrant la richesse lombarde ou trentinoise. Même dans le sport, l’argent a toujours son mot à dire.
Par Jean-Guillaume Langrognet