Elle aura tout raflé cette saison : une médaille de bronze au Championnat d’Europe, le titre National Elite et ainsi Espoir mais surtout le titre tant convoité au Championnat du Monde. Alors qu’elle vient de recevoir ses équipements arc-en-ciel, nous sommes allés à sa rencontre. Un entretien sans filtre qui nous résume sa saison, ses ambitions et sa vie de cycliste professionnelle axée dans les sous bois.
« À quel moment t’es-tu vu Championne de France ?
Le matin j’avais dit à ma famille « cela fait drôle d’aller à une course où tu sais que tu vas gagner !!!! » Non honnêtement lorsque j’ai vu que la stratégie que j’avais mise en place était conforme à la course, je savais comment j’allais accélérer, où et à quel moment.
Comment as-tu vécu ton après Championnat de France ?
J’ai plutôt eu du mal à réaliser que j’étais Championne de France mais je me suis vite remise dans le bain puisque le lendemain du championnat j’étais au départ d’un cross avec ma tenue tricolore malgré une très courte nuit. J’ai vraiment eu du mal à trouver le sommeil après une journée pareille.
Championne de France sous les couleurs d’Experza | © FFC
Tu dis vouloir avoir ton propre staff. Mais de qui est-il composé ?
Mon staff est plutôt simple : j’ai ma maman en assistante elle me connaît par cœur et elle sait de quoi j’ai besoin et à quel moment.
Deux mécanos dont un qui est mon mécano h24 car c’est mon beau-père/entraîneur et un de mon équipe.
Je n’ai vraiment pas besoin de parler ou de leur donner la moindre consigne car ils savent tout de A jusqu’à Z, et je le répète c’est super important pour moi.
Comment gères-tu la relation Entraineur/Beau-père ?
Cela se passe plutôt bien si on regarde les résultats cette année (rires).
Non plus sérieusement il s’occupe de moi comme des autres coureurs qu’il entraîne avec sa société Cycling Concept Training. Je n’ai pas de passe-droit et c’est même plus dur car il peut me surveiller au quotidien dans tout ce que je fais.
Sa famille, le plus important | © MarionNR
Qu’elles ont été les changements majeurs pour cette saison de cross ?
Honnêtement je n’ai pas changé mon alimentation ou d’autres choses en particulier.
Je ne suis pas non plus fan de musculation mais je pense plutôt avoir passé des paliers à l’entraînement où j’ai repoussé la douleur encore plus loin.
J’ai également effectué beaucoup de travail avec ma psy à partir du mois de décembre, ce qui m’a débloquée sur énormément de choses pour les grands rendez-vous.
Championne du Monde ! Raconte nous cette journée exceptionnelle..
J’étais exactement dans le même état d’esprit que le Championnat de France, et j’avais encore moins de pression même je dirais.
Honnêtement, qu’est-ce que j’avais à perdre ? Rien.
Ma saison était déjà réussie, il ne manquait plus que cette cerise sur le gâteau.
Je savais ce que je voulais et ce que j’allais faire. C’était la gagne ou rien.
Je n’ai pas pris le meilleur départ mais je ne me suis pas affolée car je savais que j’étais prête. J’ai senti que j’avais ma meilleure forme de la saison ce jour-là et que personne d’autre ne pouvait me battre. Les conditions étaient juste parfaites : pluie et boue, c’était génial tout ce que j’adore !
J’ai été soutenue du début à la fin sur la totalité du circuit c’était incroyable !
Cette journée restera gravée.
Quand j’ai passé la ligne d’arrivée c’était magique, ma famille, ma manager, mon fan club enfin tout le monde était là !
Et partager ce podium avec ma coéquipière Anna (Kay), était un moment très émotionnel, car on le voulait vraiment toutes les deux.
Marion après un départ dont elle a pris les commandes | © MarionNR
Penses-tu que le circuit était à ton avantage ? D’ailleurs, peux-tu le décrire ?
Pour être honnête : complètement. Si j’avais couru la veille, le samedi, cela m’aurait moins convenu.
J’attendais cette pluie avec impatience ! Et ce sont les conditions météo qui l’ont rendu plus difficile. Il fallait de la force pour réussir à avancer sur le vélo et savoir courir, tout était parfait pour moi avec ce circuit qui je pense était à mon avantage.
Quelle est la personne dans ton répertoire qui t’a envoyé un message de félicitations et dont tu es la plus fière ? Pourquoi ?
Je suis rentrée chez moi et j’ai regardé le replay sur la tv belge et voir une dame du cyclo-cross comme Ellen Van Loy me citer comme unique favorite, ça fait drôle et chaud au cœur. Mais le message dont je suis là plus fière c’est sans hésitation la triple Championne du Monde, Sanne Cant.
Il y a 4 ans je regardais les Championnats du Monde de Zolder et j’admirais ces deux filles, maintenant je les côtoie tous les weekends et elles sont super gentilles avec moi.
En quoi la fédération Française peut encore faire des efforts ?
La fédération au global ça je n’en sais rien.
Je suis licenciée à la Belgian Cycling en raison de mon lieu de résidence, je n’ai jamais eu aucun problème. Tout est si simple avec eux.
Je pourrais en dire plus en termes d’équipe de France plutôt que de fédération.
On va dire que je suis lourde avec ça mais l’équipe de Belgique fonctionne de la meilleure façon lors des sélections.
Ils laissent faire les coureurs avec une certaine liberté, tout en leur laissant leurs habitudes.
Pour ma part j’ai connu pas mal de mésaventures auparavant. Mais cette année j’ai eu la chance d’avoir été plus libre. Je suis vraiment contente que François (Trarieux) m’est fait confiance en me laissant avec mes habitudes que j’ai tout au long de l’année.
Et je pense qu’il l’a bien compris avec Éric Salvetat.
Si on me laissait libre, et avec les mêmes personnes que j’ai toujours autour de moi tout le temps, c’est comme ça que cela fonctionnerait.
La preuve, j’ai décroché ma première médaille au Championnat d’Europe, et je suis allée chercher le titre au mondial.
J’ai réussi à avoir confiance en eux et cela s’est super bien passé tout au long du week-end.
Qu’aimerais-tu qu’elle mette en place ?
La discipline du cyclo-cross ne peux pas être mise de côté plus qu’une autre.
Il y a tellement de choses à faire ! Dans d’autres pays frontaliers le cyclo-cross est à la même échelle que le football par exemple. Il y a énormément de choses et de possibilités pour mettre en avant notre discipline en France, il faut juste réussir à s’y investir pleinement sans hésiter. Et je le répète, s’inspirer ou prendre exemple des autres nations n’est pas une critique ou une honte loin de là.
Savoir écouter et regarder ce qui se fait à côté plutôt que de jalouser bêtement.
C’est tout simplement permettre à notre discipline d’évoluer et de voir beaucoup plus loin.
Quand raccrocheras-tu tes vélos de cross en cet fin d’hiver ?
Il me reste encore 5 cross à faire donc fin février la saison sera malheureusement finie.
Si tu devais changer une chose à cette saison, qu’est-ce que ça serait ?
Je balayerais les petits cailloux qui sont sur le petit chemin blanc de Nommay, ça m’aurait sûrement évité de casser mon dérailleur. Quand tu joues ta première victoire en Coupe du Monde, ça fait mal, mais c’est le jeu….
Mais plus sérieusement, je n’ai pas grand-chose à regretter sur cette saison. J’avais défini avec mon entraîneur des objectifs en début de saison et nous avons réussi à les atteindre maintenant c’est que du positif pour moi.
Marion Norbert Riberolles Championne du Monde U23 | © Yefrifotos
Penses-tu que pour réussir dans le monde du cyclo-cross, il est primordial de « s’expatrier » en Belgique ou en Hollande ?
Je ne sais pas si c’est « LA » solution, en tout cas pour moi, ça a été mon choix et la meilleure solution pour progresser.
L’avantage d’être en Belgique c’est la fréquence des cross tous les weekends.
Tu n’as pas 600kms à faire pour te rendre à une course et les organisations sont superbes, ce sont les mêmes qu’en Coupe du Monde et parfois même mieux.
Mais pour moi la Belgique est l’un des meilleurs passages pour un athlète qui veut réussir dans le cyclo-cross. Il ne faut pas hésiter, ma famille et moi avons fait un choix en venant vivre ici.
Pour leur vie personnelle ils ne regrettent rien et pour ma carrière sportive ils le referaient si c’était à refaire.
Où vas-tu mettre ce joli maillot ?
Le maillot de la cérémonie va être mis dans un cadre à la maison, comme celui des France. Mais c’est vrai que lorsque je le regarde dans ma chambre, je me dis « c’est à moi ça ? ». C’est fou comme sensation. »