Tony Josselin, vous êtes coach à distance, que diriez-vous de l’offre de plus en plus large en ce qui concerne le coaching à distance ?
En effet le coaching à distance s’est considérablement démocratisé, et ce dans tous les domaines : sportif, personnel ou même professionnel. Il est parfois difficile de s’y retrouver et de pouvoir tomber sur le professionnel qui vous correspond et vous fera progresser. Concernant le cyclisme, discipline exigeante, pointue, mais aussi un sport passion, je vois de plus en plus de sportifs non diplômés et non expérimentés s’improviser coachs. Je ne suis pas certain que ça aille dans le bon sens pour notre sport, car un athlète moderne a besoin d’un panel de compétences très larges. Pour ma part, c’est certain que mes diplômes d’entraîneur m’ont aidé, mais c’est surtout mes 17 années d’expérience qui m’ont permises de développer une approche globale, car la performance est un tout, le sportif est avant tout un athlète, les dépenses énergétiques nécessitent une préparation physique et nutritionnelle très spécifique, mais aussi d’être bien dans sa tête. Avec tout nouvel athlète, je commence par un diagnostic complet appelé « profilage » , il s’agit là de faire des diagnostics sur le vécu de l’athlète, les aspects physiques, nutritionnels, posturologiques et mentaux ; ensuite j’élabore un programme personnalisé qui est ajusté au fur et à mesure. Pour ce faire j’utilise des outils précis, tel que : les plateformes de suivi d’entraînement, des logiciels d’analyse micronutrionnels et neuronutritionels, voire même l’analyse de la variabilité cardiaque pour détecter à tout moment si un athlète est mentalement stressé ou fatigué.
Seriez-vous favorable à une formule « progresser ou rembourser! » ?
Non, très simplement, car il y a obligatoirement des progrès. En effet, à partir du moment ou coach et sportif sont investis et motivés, et que le coach adapte son entraînement, il y a forcément des progrès. Tout est dans l’adaptabilité et l’analyse du retour du sportif. Au début je teste différents protocoles, pour ne pas imposer un entraînement à l’athlète, mais plutôt trouver l’entraînement qui lui convient. Il est possible que les résultats ne viennent pas immédiatement, ou que les entraînements ne correspondent pas. Pour moi ce n’est pas une mauvaise nouvelle, au contraire, ça nous donne la direction pour travailler. Avec l’expérience et un bon profilage, je sais rapidement quel type d’entraînement va convenir à un certain profil. La mise en place d’un accompagnement repose avant tout sur la confiance.
Que penser des offres qui ne se font qu’à travers le dématérialisé ?
Être disponible, voilà la clé. Les nouveaux outils numériques ont changé notre métier, c’est certain, avant on roulait avec les athlètes, on les accompagnait sur les courses. Maintenant on a des GPS, et tous les capteurs ainsi que les outils de communication email, vidéo, Facetime, Skype, sms… J’arrive à connaitre l’état de stress d’un athlète sans même le voir, tous ces outils, bien utilisés sont une mine d’or. Et pour avoir vu évoluer ce métier, je trouve que certains athlètes s’y retrouvent, je pense que le fait d’avoir par exemple un planning hebdomadaire et de ne pas avoir quelqu’un sur le dos les rend plus sereins et responsables. Au final, ça se retrouve dans la performance sportive.
Depuis combien de temps utilisez-vous la programmation neurolinguiste (PNL), méthode qu’on rencontre plutôt en entreprise?
Les fondements de la programmation neurolinguiste reposent sur l’amélioration de la communication avec les autres et le développement personnel. Autodidacte dans un premier temps, en 2007, je me suis inscrit dans un programme de formation de 3 ans pour devenir praticien en PNL. Nous utilisons tous nos sens pour communiquer, l’ouïe, la vue, le toucher, etc, mais nous ne sommes pas tous sensibles de la même façon. On a tous un ami qui vous parle à 5cm du visage, ou qui ne peut pas vous parler sans vous attraper par l’épaule, ou un autre qui va décrire chaque chose qu’il vit jusqu’au dernier détail et si vous n’êtes pas sur le même canal que lui, ça vous parait détestable. La communication est donc quasi impossible. Qui a tort ? Avec un athlète, un chef d’entreprise ou votre femme c’est la même chose. La PNL me permet de trouver la clé, le décodeur pour qu’on puisse communiquer et se comprendre simplement. Prodiguer des conseils à un athlète à fort caractère ou lui imposer un entrainement sans avoir ce décodeur est quasiment impossible. Au-delà de mieux communiquer avec les autres il est possible de développer sa connaissance de soi, et aussi de reprogrammer nos schémas de pensées. « Le corps humain est fait pour s’adapter, le cerveau pour apprendre ».
Vos élèves passent-ils tous par la case hypoxie ou est-ce une alternative réservée au haut niveau?
Je dirais que l’hypoxie est moins une question de niveau que d’objectif. Les cyclistes pros sont nombreux à l’utiliser, mais à tout niveau on peut en tirer des bénéfices, surtout quand on a un challenge en vue. Le principe de l’hypoxie est d’améliorer de façon naturelle le transport de l’oxygènedans l’organisme, qui est un facteur déterminant de la performance. Le sportif va gagner en VO2max, en économie de locomotion, en récupération… L’hypoxie peut faire alors la différence entre une bonne place et un podium. Nous avons de très bons résultats avec cette technologie.
Vous avez peu ou pas de vététistes, est-ce un choix ou un concours de circonstances ?
C’est plutôt un concours de circonstances, j’en ai eu, mais le VTT est devenu aussi très spécifique. C’est vrai qu’au fil des années avec le développement du cyclisme sur route je me suis un peu plus focalisé sur la route. Il faut dire que le niveau amateur s’est élevé, maintenant la plupart des meilleurs cyclosportifs ont un coach, idem pour les coureurs pros et élite. Avec les années, j’ai développé des protocoles propres à la route, en me reposant sur mes 10 expériences au cours desquelles j’ai accompagné des cyclistes de la catégorie « junior » jusqu’au niveau professionnel. Je prends aussi beaucoup de plaisir avec les cyclosportifs, car ils font vraiment le métier et les épreuves sont exigeantes avec parfois 150km et 3500 mètres de dénivelé. La plupart ont passé l’âge de se prendre pour des pros et s’entrainent à fond uniquement pour le plaisir. Ils ont un environnement professionnel et familial stable et font vraiment le choix de s’entrainer proprement et de façon organisée. Dans ce schéma on peut réaliser de belles progressions. Je travaille par exemple avec Marion Bessone qui n’avait pas de licence de vélo il y a 3 ans et qui vient de faire une course internationale dans une équipe professionnelle World Tour Lares Waowdeals en terminant 1ère de l’équipe, une semaine après avoir fait 5ème au Championnat du monde UCI granfondo… C’est ce que j’appelle une progression fulgurante.
On parle de nutrition, mais est-ce que d’abord, tout ça ne passe pas par une analyse de sang par exemple, pour montrer comment le corps de chacun réagit à tel ou tel aliment? Ce qui semble très peu fait, qu’elle est votre position là-dessus ?
Indéniablement c’est un plus. Le bilan à partir d’analyses de sang apporte une foule d’informations sur le « terrain » , car tout le monde ne métabolise pas ce qu’il mange de la même façon. Mais ce sont encore aujourd’hui des examens non remboursés et dont la prescription et l’analyse relèvent de la compétence du professionnel de santé. De plus, dans certains cas il convient d’associer l’exploration biologique à une enquête micronutritionnelle, notamment pour le dépistage de carence en magnésium par exemple, qui reste difficile à identifier surtout chez les sportifs.
Quid de l’utilisation des plantes pour se soigner ou encore mieux, pour bien vivre et ne pas tomber malade ?
«Que ton alimentation soit ta première Médecine » a dit Hippocrate. Il s’agit de la base. La phytothérapie a certainement un grand intérêt, mais je dirais qu’elle intervient une fois que la base est maîtrisée, c’est-à-dire que le sportif a acquis les principes d’une bonne hygiène alimentaire alignée sur ses besoins, ses carences, ses objectifs. L’apport des plantes comme le ginseng ou la spiruline (algue) est alors un plus. Ma formation me permet de délivrer un accompagnement nutritionnel général, mais on peut aller plus loin. C’est pourquoi je vais intégrer prochainement les compétences d’un naturopathe dans l’équipe.
Vous proposez l’étude posturale, vous avez des athlètes de haut niveau, comment résoudre l’équation: chercher à gagner en puissance et perdre en explosivité en montagne ?
La posture est un domaine dans lequel j’ai développé une réelle expertise depuis 15 ans. Je suis certifié Retül et je réalise tous les 2 mois une session de fitting pour la marque de vélo Heroïn-bikes. Le plus gros du travail concerne souvent les cales, qui ont une influence sur la position, le pédalage, la rotation de la cheville et des genoux. Le rendement est directement affecté par la position des cales et surtout vos capacités à rouler ou grimper : 100 km à 75 tours/min représente 36000 coups de pédale… En posture, le dilemme est toujours aéro ou confortable, sachant qu’au final si vous êtes mal vous serez moins efficace sur le long terme et vous risquez de développer des douleurs. Il s’agit surtout de comprendre les qualités intrinsèques du cycliste et d’adapter son vélo à ça. Si le cycliste compte participer à 15 granfondo ou s’il compte faire une saison complète avec 40 courses FFC ce n’est pas pareil du tout. En montagne, on combat plus la gravité que la résistance à l’air,où la composante lente de VO2max reste le facteur déterminant de la performance, versus la puissance explosive qui est ponctuellement utilisée. Il s’agit là de trouver un bon compris. Depuis quelque temps je travaille sur des semelles moulées pour l’athlète avec un renfort en carbone avec un podologue sportif, la posture est un pilier de la performance !
Sur les différents domaines que vous abordez: nutrition, étude posturale, plans d’entraînements, PNL, quels sont les pays en pointe, et à quel niveau situez-vous les équipes françaises? (les pros d’un côté et les équipes amateurs de l’autre)
Nous n’avons pas à complexer par rapport à d’autres nations. En France, nous bénéficions de moyens humains et matériels de qualités pour être dans l’expertise. Les résultats de ces dernières années chez les jeunes comme chez les pros attestent bien que le mouvement fédéral et les Teams pros sont immergés de cette approche.
Vos prestations ont un coût assez élevé, n’êtes-vous pas réservé à une certaine « élite » ?
Tout est une question de point de vue, je suis clairement dans les prix du marché et peut-être même dans les moins chers. Au final, c’est certain, c’est une somme, mais comparé au temps perdu à s’entrainer seul sans progresser ça parait très peu. J’accompagne tout type de sportifs désirant progresser, quel que soit leur niveau. Mon critère principal repose sur le projet de l’athlète, et sa manière de le structurer. J’aime partager avec des « apprenants » qui sont focus sur le développement de leur potentiel, et cette population n’appartient pas uniquement à « l’élite », mais à ceux qui sont capables de mettre en œuvre un projet qui leur tient à cœur.
Vous évoquez beaucoup le mental, ne pensez-vous pas que la prochaine étape pour les pros notamment, sera comment « réparer » la fatigue mentale liée à 3 semaines de bagarre intense à frotter, remonter les leaders, ….? votre position quant à ce sujet ?
Réparer est toujours plus difficile que préparer… la fatigue psychologique a toujours des origines plurifactorielles qui sont parfois difficilement palpables. Le mental a une influence directe sur la performance et encore plus pour des professionnels. Tout ça doit s’anticiper bien en amont des 3 semaines de bagarre, la réparation de l’après Tour ce joue avant le Tour c’est une certitude et je pense que tous les leaders sont maintenant bien préparés mentalement.Ce paramètre de récupération mentale doit être appréhendé au même titre que la charge de travail « dite » physiologique, ça marche pour les pros et énormément pour les amateurs même sur des courses plus courtes de quelques jours. Plusieurs pistes permettent de mieux préparer les athlètes à ce phénomène, comme les diagnostics sur l’équilibre des neurotransmetteurs (messagères chimiques du cerveau qui communiquent avec notre organisme), les questionnaires, le suivi biologique des hormones du stress, ainsi que le suivi de la variabilité cardiaque qui fait appel au système cardio accélérateur et cardio freinateur du coeur… D’autres techniques dites “alternatives” comme l’hypnose, la sophrologie sembleraient aussi avoir des bienfaits sur la préparation mentale. Pour moi, il est important d’être à l’écoute des nouvelles techniques et de considérer toutes les pistes d’améliorations possibles.
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