Peux-tu rappeler à nos lecteurs les grandes lignes de ta carrière et la date à laquelle tu es passé professionnel ?
Alors, je suis passé pro fin ’90 dans l’équipe RMO dans laquelle je suis resté deux années. Ensuite, je suis passé chez Festina en ’93 avec Bruno Roussel. J’ai évolué aussi dans l’équipe Gan quelques années, dans une équipe italienne qui s’appelait à l’époque Aki-Gipiemme et j’ai terminé à la Mutuelle de Seine-et-Marne. J’ai donc été 8 années professionnel.
J’ai fait trois Tour de France, un Tour d’Espagne qui ne me réussissait pas trop donc je n’aimais pas trop y aller. Sur le Tour de France la première fois, je m’étais classé 15ème et premier français. Les deux fois suivantes, cela s’était aussi bien passé car avec la Mutuelle de Seine-et-Marne, j’avais fait une échappée et Jan Ullrich m’avait déposé à 5 km de l’arrivée, mais cela reste un très bon moment !
J’ai donc arrêté en 1998 en même temps que le sponsoring de la Mutuelle de Seine-et-Marne. L’année ’98 est une année assez particulière dans le vélo, notamment avec l’affaire Festina, donc je me suis dit que c’était le bon moment pour arrêter, surtout parce que la Mutuelle de Seine-et-Marne avait proposé à tous ses coureurs un plan de conversion. Cela ne s’était encore jamais fait dans le vélo et je trouvais que c’était une super initiative ! Donc je me suis dit, Banco, je suis et j’adhère !
J’ai donc choisi ma fin de carrière. j’aurais bien aimé continuer, j’étais arrivé quand même à un haut niveau , mais pas à n’importe quel prix.
Comment se déroulait ce plan de reconversion ?
Il s’agissait d’un bilan de compétences et d’un suivi. D’ailleurs, on m’avait proposé d’intégrer la société. J’ai eu plusieurs propositions. Ayant beaucoup voyagé et vu du pays, je me voyais mal déménager en région parisienne et être enfermé entre 4 murs, c’est pour cela que je n’ai pas suivi.
Je ne sais plus vraiment combien de temps cette phase de transition a duré mais comme beaucoup de cyclistes, je souhaitais rester dans le monde du vélo et j’ai donc été avec ASO sur plusieurs courses dans les relations publiques. Cela m’a permis ensuite de travailler avec Laurent Fignon et d’organiser le Paris-Nice. J’étais dans les relations publiques avec lui, sur les événements et j’ai pu aussi développer d’autres projets en parallèle comme le Team building pour les grandes entreprises, comme le groupe Point P. J’ai travaillé avec Laurent Fignon deux ans et demi jusqu’à ce qu’il vende sa société Amaury Sport Organisation.
Dans cette structure, t’occupais-tu plus de la partie organisation, des démarches auprès des autorités ou plutôt du sponsoring ?
Je m’occupais plutôt des démarches commerciales mais comme c’était une petite structure, nous étions tous polyvalents. Je m’occupais surtout de l’aspect sportif, peu de l’aspect administratif.
Quand la structure a été vendue, on ne m’a pas proposé de suivre le mouvement et d’y rester, donc je me suis dit que c’était une bonne opportunité pour retourner me former. Je suis donc allé à l’Université de Rouen et j’ai fait un DESS de marketing et management du sport car je trouvais que j’avais des lacunes à ce niveau et que c’était une occasion d’acquérir de nouvelles compétences.
Ensuite, je me suis orienté vers le domaine commercial car j’ai eu une opportunité et c’était également un challenge dans le monde du vélo, que je connaissais. Donc je me suis dit, je fonce ! Quand on finit sa carrière, on doit se débrouiller donc c’était une découverte.
Et donc, à présent, on te retrouve chez Trek comme responsable de secteur ?
Oui, comme c’est une boite américaine, on appelle cela Territory Manager mais effectivement cela correspond à responsable de secteur. Je suis chargé de visiter les magasins. Je suis fier de représenter la marque Trek et je suis en charge de l’Ouest de la France: Bretagne, Normandie et Pays de Loire.
Au regard de ma carrière passée, les gens sont plutôt bienveillants avec moi, c’est un monde de passionnés donc évidemment cela aide pour la crédibilité.
Nous t’avons croisé plusieurs fois sur le Tour de France où tu travaillais pour Orange…
Oui effectivement, j’ai travaillé pour Orange, cela m’a bien plu, c’est quelque chose que j’adorais faire mais c’était un emploi de vacataire, sur des courtes périodes, j’avais donc besoin d’un vrai métier et j’adore ce que je fais maintenant ! Aller dans les points de ventes, se déplacer, rentrer des gens différents chaque jour… j’adore ça ! Finalement, il y a de grandes similitudes avec le métier de cycliste où il faut constamment se challenger et se fixer des objectifs.
Y a t-il des exemples de reconversion que tu citerais ?
Ce n’est pas simple. Je dirais que lorsqu’on a un grand nom, c’est plus facile d’avoir accès à des postes intéressants. Même si certains ne veulent pas se l’avouer, c’est une rupture de vie et on essaie de retrouver quelque chose de semblable, avec la même adrénaline, mais c’est difficile.
Même si tu étais quelqu’un de discret, qui ne faisait pas de bruit mais qui était au RDV pour faire vibrer les passionnés, aurais-tu aimé vivre dans le cyclisme actuel avec les médias surdéveloppés et les réseaux sociaux ?
Non, je ne regrette rien de ce que j’ai pu vivre auparavant. j’attachais surtout beaucoup d’importance à l’aspect sportif, le reste, je le laissais de côté et je n’en avais d’ailleurs pas vraiment conscience. Mais c’est sur que le monde d’aujourd’hui avec tous ses moyens de communication, j’aurais adoré ça ! Bien sûr, il faut les maitriser mais c’est un bon moyen d’être au contact des fans.
Tu as eu la chance de bénéficier du plan de reconversion de la Mutuelle de Seine-et-Marne, comme le fait le syndicat des coureurs maintenait, penses-tu qu’il s’agissait d’un manque à ton époque ?
Oui effectivement c’était un réel manque à l’époque mais maintenant cela va dans le bon sens, c’est très positif pour les coureurs.
Mathilde Duriez, vélo101