Hervé, quel souvenir gardez-vous de votre dernier jour dans la peau d’un coureur pro ?
Un bon. C’était sur Paris-Tours en 2009. Je n’avais pas pu m’exprimer comme je l’aurais voulu, la course s’étant terminée au sprint, mais j’étais dans le coup pour la gagne et c’est toujours plaisant de finir sur une note positive. Pour autant, je ne savais pas encore qu’il s’agirait de ma dernière course. J’avais encore l’espoir de retrouver un contrat ailleurs. J’ai eu quelques touches qui n’ont pas abouti et je suis passé à autre chose.
Quels étaient vos plans de secours ?
J’ai une chance, celle d’avoir un papa qui a fait du vélo et qui m’a fait faire des études avant que je pense à ne faire que du vélo. Je suis passé chez les pros avec un bac+3 en poche qui m’a permis de réintégrer directement une école de commerce pour faire un Bachelor Marketing et Management. En termes de perspective de reconversion, j’avais des choses intéressantes. J’ai profité de mes années de chômage pour me remettre à niveau. J’ai passé mon Brevet d’Etat en parallèle de mon Bachelor.
Quel était le discours de votre père, Gilbert Duclos-Lassalle, en matière de poursuite des études ?
Lui a fait une longue et belle carrière et n’a pas été confronté à ça. Mais il m’a mis en garde et rappelé que je n’étais pas à l’abri d’une blessure, que j’étais jeune, et que si je ne devais faire que deux ans chez les pros parce que ça n’irait pas ou que je n’aurais tout simplement pas les capacités physiques, qu’est-ce que je ferais ? Avec le recul, je le remercie car son raisonnement était plutôt bon.
La reprise des études à la sortie de votre carrière sportive a-t-elle été compliquée ?
Ça pique, en effet, car on est sorti du cursus. Se replonger dans les bouquins pendant plusieurs heures, ce n’est pas évident. Le point positif, c’est qu’on aborde les choses différemment que les jeunes qui ont 20 ans et sont dans un cursus normal. On a une autre vision des choses qui nous permettent de relativiser pas mal aux moments importants.
Vos études terminées, avez-vous trouvé facilement du travail ?
Assez rapidement en tout cas. J’ai eu l’opportunité de rentrer chez Cycleurope. Je suis aujourd’hui responsable du secteur Sud-Ouest. Je m’occupe de la commercialisation et du développement des marques Gitane, Peugeot, Bianchi et Definitive. Je visite les magasins, clients ou prospects pour développer ces marques sur mon secteur géographique.
Parmi les vélos dont vous assurez la commercialisation, lequel a votre préférence ?
De par ma sensibilité d’ancien coureur, je suis très attiré par Bianchi. Nous avons un super produit avec l’Infinito CV. Lars Boom a démontré sur le dernier Tour de France que c’était un super vélo sur les pavés. Sa fibre de carbone a la particularité d’absorber les vibrations et de les annuler. En termes de confort, il fait partie des meilleurs vélos. Et s’il est utilisé chez les pros c’est qu’il a une rigidité suffisante et nécessaire à la performance.
Quelles retombées pour une marque véhicule une victoire sur le Tour comme celle de Lars Boom à Arenberg ?
Disons qu’en termes d’image c’est toujours positif de voir ses vélos à l’avant, de voir ses coureurs s’exprimer. La victoire de Lars Boom sur l’une des plus belles étapes du Tour est évidemment positive pour la marque Bianchi et pour le business.
On vous sent épanoui dans votre nouvelle activité…
J’ai la chance d’avoir une sensibilité avec le produit, c’est toujours plus facile de vendre quelque chose pour laquelle on a une certaine sensibilité. Ce qui me plaît vraiment c’est qu’aujourd’hui j’ai appris à découvrir le vélo sur d’autres aspects. Il n’y a pas que le vélo de course et le VTT mais aussi toute la partie urbaine en pleine explosion avec les vélos à assistance électrique dont on a de supers produits avec Gitane et Peugeot. Mais je vais au 1er janvier intégrer Giant-France comme responsable commercial du secteur sud-ouest.
Du temps de votre carrière, vous intéressiez-vous déjà au matériel que vous utilisiez ?
Au produit course, oui. J’aimais bien savoir comment étaient montés nos vélos, les différents groupes etc. Mais je m’y suis davantage penché, de par mon boulot, à la fin de ma carrière.
Votre expérience de coureur est forcément un avantage dans votre métier ?
Je suis un peu plus éloigné du monde pro, mais les gens qui tiennent des magasins sont des passionnés. On parle de business mais on parle aussi du Tour, des courses… On me demande mon avis sur l’actualité. Mon expérience de coureur est c’est vrai un avantage pour tisser des liens avec les magasins.
Pour organiser une sortie vélo avec vous, quelles conditions faut-il réunir ?
Il faut qu’il fasse beau, qu’il n’y ait pas de vent, qu’il ne fasse ni trop chaud ni trop froid. Ça limite pas mal ! Je roule très peu, de temps en temps. Je prends plaisir à aller faire un tour de vélo, à mon rythme. Quand j’ai envie d’aller courir, je vais courir. Si j’ai envie d’aller jouer au foot avec des potes, je vais jouer au foot. Je pratique toujours des activités physiques, mais rien d’astreignant ou de régulier. Je fonctionne beaucoup plus à l’envie.
Que reste-t-il de votre carrière dans votre cœur ?
De supers souvenirs. J’ai eu la chance de vivre sept ans de ma passion, ce n’est pas donné à tout le monde. Ce sont des souvenirs, des courses avec les copains, les quelques victoires que j’ai pu obtenir, les grands et bons moments que l’on passe sur et à côté du vélo.
Si vous deviez faire un parallèle entre votre carrière de coureur et votre activité d’aujourd’hui, quel serait-il ?
Je dirais que c’est toujours le même fonctionnement : on a des objectifs, il faut y arriver !