Felice, pouvez-vous nous rappeler les grandes lignes de votre carrière ?

J’ai débuté comme cycliste professionnel en 1965, j’étais dans l’équipe Salvarani jusqu’en 1973. Huit mois après être passé pro, j’ai gagné ma première course: le Tour de France, en 1965, devant Poulidor. Il n’y avait pas de meilleur moyen que de débuter sa carrière. J’ai participé 9 fois au Tour d’Italie et je l’ai remporté 3 fois. J’ai gagné 2 fois le Tour de France et 1 fois le Tour d’Espagne. J’ai gagné les championnats du Monde, Milan San Remo.. Un moment très difficile pour moi, mais pourquoi il était là à chaque fois Eddy Merckx ! (rires).

Après 14 ans d’une carrière comme la vôtre chez Salvarani et Bianchi et après autant de records, comment avez-vous vécu votre reconversion ?

Là aussi, ce fut un moment difficile. J’ai dû repartir de zéro et retourner à l’école assez humblement. J’ai alors étudié pour me reconvertir dans les assurances. Au même moment, j’étais toujours chez Bianchi mais comme Team Manager. J’y suis toujours mais dans le VTT pour travailler sur le développement des produits.

Auriez-vous pu imaginer travailler dans le monde des médias italiens comme à la Rai ou à la Gazzetta dello Sport par exemple ?

Oui effectivement la Rai me l’a proposé mais je me suis dit que c’était plutôt un emploi pour 3, 4 ou 5 ans, pas plus, vous comprenez ? J’ai fait quelques articles pour le Corriere della Sera pendant 10 ans avec un traducteur. Mais j’avais vraiment en tête d’avoir un métier qui me permette de rester aussi à la maison avec ma femme et mes enfants. J’ai été beaucoup absent étant plus jeune donc j’avais besoin de me rattraper à ce niveau là.

Quand a débuté votre collaboration avec Bianchi en tant que développeur produits ?

On a commencé notre partenariat en 1963 au Championnat du monde amateur car là j’ai rencontré le Team Manager Pinella qui m’a dit « Tu aimes courir sur un Bianchi ? », je lui ai répondu « Oui, bien sûr ! Je viens du nord et là bas on a l’habitude de courir sur des Bianchis quand on est petit ! ». Deux jours après, je sortais de chez moi à Milan et j’ai trouvé un Bianchi sur le pas de ma porte ! Nous sommes en 2017, depuis cette date, je n’ai pas quitté mon Bianchi !

On a pu vous voir au Roc d’Azur pour le mountain bike, cela veut-il dire que vous avez également travaillé avec Bianchi sur les VTTs ?

Oui, j’étais au Roc d’Azur pour y participer mais après 1h30, j’étais épuisé et j’attendais une voiture pour rentrer à l’hôtel. Oui, j’ai collaboré à la conception des VTT. J’en avais acheté un à New York et je l’avais ramené en Italie. J’ai travaillé avec de grosses équipes régionales et on a gagné des Jeux Olympiques d’ailleurs. Je suis toujours administrateur délégué du team Bianchi VTT, dirigé par Massimo Ghirotto.

Si vous deviez faire un TOP 3 des grands champions qui ont été équipés par Bianchi, depuis que vous y travaillez, quel serait-il ?

Cela m’est impossible ! Mais je peux vous citer Pantani ou Ullrich par exemple. Tout ce que je peux vous dire, c’est que Bianchi et moi, c’est une longue histoire !

Est-ce que quand vous étiez coureur vous vous intéressiez déjà à tout cet aspect technique ?

Oui tout à fait, quand j’étais professionnel et qu’on me montait mon vélo avant les courses, je demandais toujours à changer le cylindre central pour avoir un vélo plus rigide car quand on sort de col, c’est bien pratique.

Est ce que, comme Eddy Merckx ou Maurizio Fondriest, vous auriez aimé créer votre propre marque de vélo ?

Oui, c’est arrivé, pendant un temps Bianchi a fait un vélo Gimondi pour le marché américain, mais j’ai opté pour le monde des assurances, il n’y a pas de risques pour son capital et on est plus tranquille.

Y a t-il un coureur que vous admirez particulièrement pour sa reconversion ?

Il y en a plusieurs que l’on pourrait citer mais je pense que l’essentiel c’est de « volare non troppo alto », de ne pas vouloir voler trop haut pour ne pas se brûler les ailes comme Icare. C’est mieux de voler plus bas, rester humble, et apprendre. Vous savez, j’ai fait du cyclisme 24 heures sur 24 pendant des années, alors le monde des affaires, je n’y connais rien …

Les cyclistes sont souvent intéressés par le milieu de la diététique comme Dario Cioni qui produit de l’huile d’olive artisanale, cela vous aurait-il plu de produire de l’huile ou du vin par exemple ?

Bien entendu, mais il faut habiter la bonne région ! Lui, il est en Toscane, moi à Bergame, c’est tout de suite plus compliqué ! Mais cela m’aurait bien plu, c’est plus sympa que les assurances !

 

                                                                                                                                                      Mathilde Duriez, vélo101