Il y a vingt-cinq ans, quand Gary Burell et Min Kao créaient l’entreprise Garmin, les deux hommes étaient loin de se douter de ce qu’elle deviendrait près de trois décennies plus tard. En 1989, les deux Américains lancent l’entreprise Pronav qui sera rebaptisée Garmin quelques mois après sa création : les trois premières lettres des prénoms des deux cofondateurs. Ce qui n’est à l’époque qu’une petite entreprise américaine se lance dans un système révolutionnaire qui sera amené à exploser : le Global Positioning System, plus connu aujourd’hui sous le sigle de GPS. D’abord utilisés dans le domaine militaire par l’aviation et la marine américaine, les produits Garmin vont progressivement se démocratiser.
C’est au début des années 2000 que s’opère le tournant pour la firme américaine. D’une part car le marché du GPS automobile s’étend. Aujourd’hui, Garmin, c’est plus de 100 millions de GPS vendus et 30 % de parts de marché du système de navigation automobile. Avec une capacité de production qui s’élève à 20 millions d’unités par an dans ses trois usines implantées à Taïwan, Garmin est sans conteste le leader mondial pour les appareils motorisés, mais pas seulement. En 2000, l’entreprise va s’installer dans un domaine d’activité qui va bouleverser son image : celui du sport outdoor. Depuis maintenant treize ans, Garmin propose des produits de navigation pour le running et la natation. La société s’est lancée il y a peu dans le golfe avant de bientôt investir le marché de la chasse. Très vite, l’entreprise se tourne vers le cyclisme, où les possibilités sont nombreuses, sur route comme en VTT.
Ce qui fait la différence pour la multinationale, c’est la recherche constante. L’an passé, la firme a lancé deux nouveaux appareils destinés aux cyclistes, les Garmin 510 et 810. Deux bijoux technologiques qui s’accompagnent de l’application Garmin Connect, une plate-forme communautaire visant à rendre le GPS sociable et connecté. Les performances de l’utilisateur peuvent être suivies en temps réel et peuvent être décortiquées une fois la sortie terminée. Des outils précieux à destination des cyclistes en quête de données sur leurs performances qui ont pu être développées avec l’aide de l’équipe professionnelle sponsorisée par l’entreprise.
Il y a six ans, Jonathan Vaughters est à la recherche d’un sponsor pour venir compléter l’apport de Slipstream et de Chipotle. « Ça a été un très long processus, confie l’Américain. À l’époque, il fallait convaincre le patron de Garmin que le cyclisme était le sport où il devait investir. Puis il a fallu le convaincre que notre équipe était la meilleure avec laquelle s’engager. » L’histoire d’amour dure depuis maintenant six ans et Garmin s’est installé comme un partenaire-cadre de la petite reine.
Le choix du cyclisme était en quelque sorte évident. L’entreprise sponsorise de façon isolée des athlètes ou des événements de running ou de trail, mais rien qui ressemble à l’appui fourni à l’équipe Garmin-Sharp, socle du partenariat sportif de Garmin. « Les retombées du sponsoring dans le cyclisme sont toujours bonnes, estime Frédéric Saint-Étienne, responsable communication chez Garmin France. Le vélo est un sport renommé pour être particulièrement attractif et représente un vrai intérêt pour les marques. Aujourd’hui, il y a très peu de sports dans lesquels on donne un nom de marque à l’équipe. Mis à part la voile avec des événements très importants, mais pas aussi réguliers que le Tour de France par exemple. On a un événement majeur qui est le troisième le plus important au monde en termes de couverture média. Et qui en plus se situe dans une période estivale très importante pour nous en termes de vente au niveau des GPS automobiles. C’est au moment des départs en vacances que les gens s’équipent beaucoup pour partir. »
Bien sûr, le sponsoring de l’équipe professionnelle n’est pas une décision qui a été prise à la légère. Elle correspond à un double objectif. D’abord celui de faire la promotion des produits dédiés à la pratique du cyclisme. « Quand le sponsoring de l’équipe a commencé, les Edge venaient d’être lancés. La majorité du business de Garmin, c’étaient des GPS automobiles. Maintenant, le département de produits sportifs est en pleine expansion. C’est lui qui connaît la croissance la plus rapide de l’entreprise et c’est devenu très important. Très clairement, le sponsoring de l’équipe a contribué à cela. Aujourd’hui, Garmin est sans doute le n°1 du GPS vélo quand en 2008 on n’existait pas. C’est un exemple de sponsoring mondial efficace. Ça a totalement changé l’entreprise », juge Jonathan Vaughters.
Autre objectif, celui de s’installer sur le marché européen. Car si la marque est reconnue aux États-Unis et en Asie, de par l’origine des deux cofondateurs, elle a plus de mal à exister sur le Vieux Continent. « La légitimité pour Garmin de surinvestir dans le cyclisme était liée à un déficit de notoriété, notamment en Europe, explique Frédéric Saint-Étienne. Le sponsoring de l’équipe est un des leviers qui a permis d’acquérir une notoriété en Europe avec de grosses parts de marché. On est clairement affiché comme un concurrent majeur dans les principaux marchés dans lesquels on travaille. Ce sponsoring a contribué à l’accroissement des ventes et des parts de marché en Europe, que ce soit en France ou dans d’autres pays où c’était très compliqué comme pour les pays du Benelux, l’Allemagne et l’Italie ou en Espagne. »
À l’échelle française, le recrutement de Christophe Le Mével en 2011 a permis à Garmin de s’installer un peu plus sur le marché hexagonal. Pendant deux saisons, le Breton a été le visage de la multinationale en France. « Ça a été un moyen d’activation très intéressant au niveau local, confirme Frédéric Saint-Étienne. Il y a d’abord toutes les retombées médias que l’on peut avoir au niveau mondial. Ensuite, Christophe nous a permis de travailler à l’échelon national en termes de présentation produits, de relations publiques, de shoot photo. C’était une vraie valeur ajoutée. On était triste de le voir partir. »
Le double objectif poursuivi est réussi. Garmin s’est créé un nom dans le cyclisme et sur le marché européen. Et la société a choisi l’an passé de prolonger l’expérience. Si toutes les filiales de Garmin dans le monde, et notamment les quatorze en Europe, participent au financement du budget de l’équipe, c’est outre-Atlantique que le sort de l’équipe a été scellé. Plus précisément au siège de l’entreprise au Kansas. Les États-Unis sont les principaux contributeurs, bien loin devant la Grande-Bretagne. La France, comme l’Allemagne ou l’Australie, viennent ensuite. « Si on prend le budget au niveau mondial en termes de dépenses de communication, c’est certes un investissement important, mais ce n’est pas un investissement stratégique. D’autant que le sponsoring représente un vrai gain de notoriété et un vecteur d’image pour la marque », poursuit Frédéric Saint-Étienne. Sans compter que Garmin possède avec l’équipe des ambassadeurs de luxe et des atouts indéniables pour perfectionner encore un peu plus ses produits déjà haut de gamme.