Flavien, merci de nous rappeler votre passé sportif et cycliste en particulier?
J’ai toujours été fan de sport et de cyclisme particulièrement, mon père et mon grand père étant cyclistes, j’avais ça dans le sang. Après avoir pratiqué plusieurs sports différents, j’ai commencé en club à 13 ans au VCCO La Rochelle. J’ai longtemps subit les courses pour être franc, mais la passion et le plaisir me faisaient continuer les entrainements et les courses puis j’ai bien progressé et j’ai pu m’amuser durant mes années juniors. Ensuite je me suis blessé aux deux genoux consécutivement en Espoirs 1 et j’ai décidé de me consacrer à mes études tout en continuant de pratiquer pour le plaisir depuis.
Quelle formation avez-vous suivi pour arriver au poste où vous êtes?
J’ai effectué une licence STAPS en passant mes deux premières années à Angoulême puis ma licence 3 entrainement sportif à Besançon. Parallèlement, j’ai passé mes diplômes fédéraux dispensés par la FFC. J’ai ensuite continué en Master Entrainement Management et Ingénierie du Sport à Besançon pour apprendre auprès des spécialistes comme Frédéric Grappe, Julien Pinot, Anthony Bouillod, Samuel Bellenoue ou encore Matthieu Nadal. Enfin, j’ai passé le DEJEPS Cyclisme Traditionnel au CREPS de Poitiers
Flavien Soenen chez FDJ Nouvelle Aquitaine Futuroscope | © Thomas Maheux
Quelles équipes avez-vous coachées, pilotées et avec quels rôles?
Durant mes formations, j’ai pu encadrer les jeunes du comité cyclisme de Franche Comté sur les compétitions puis du pôle espoirs de Besançon sur la partie entrainement. J’ai ensuite répondu favorablement à l’offre des dirigeants du VC Morteau Montbenoit pour créer et diriger une équipe de Division Nationale Femmes. Durant 4 ans, jusqu’à octobre dernier, j’ai donc endossé le rôle de manager, directeur sportif, entraineur de l’équipe. J’ai également créé ma société « Fanaperfe » spécialisée en entrainement il y a 5 ans, avec laquelle j’ai pu entrainer des coureurs hommes et Femmes, de cyclosportifs à élite hommes (DN1) ou professionnelle femmes.
Sa société d’entraînement : Fanaperfe | © Flavien Soenen
Aujourd’hui, vous diriez que vous êtes Directeur de la performance chez FDJ-NA Futuroscope, c’est ça ?
Actuellement je suis entraineur de l’équipe. Pour le moment on ne peut pas vraiment intituler mon poste Directeur de la performance car je suis le seul entraineur contractuel de l’équipe mais l’idée est là. Je coordonne les aspects performances en faisant le lien avec les entraineurs perso et l’équipe ainsi que le travail de positionnement ou d’analyse pour les athlètes qui en ont besoin par exemple. Mes missions doivent tendre vers celles des directeurs de la performance que l’on rencontre dans les équipes qui ont intégré des entraineurs dans leur staff depuis un moment en travaillant en collaboration avec les mécaniciens, les médecins etc. Pour moi le directeur de la performance dirige la cellule performance de l’équipe et nous en sommes pour le moment au début de ce principe grâce à la volonté des dirigeants d’investir dans du staff supplémentaire à l’inter saison. L’objectif étant de progresser petit à petit, je vais tacher de faire évoluer cette cellule de performance progressivement.
La qualité passe par un travail de positionnement | © Thomas Maheux
En quoi consiste le job et combien de personnes, d’entraîneurs, coordonnez-vous ?
Le poste d’entraineur consiste tout d’abord à entrainer les athlètes de l’équipe qui n’ont pas d’entraineur. Gérer la planification, les charges d’entrainement et l’accompagnement des athlètes au jour le jour durant la saison sur tous les domaines qui peuvent apporter à l’athlète. Ensuite, pour celles qui ont un entraineur perso, le but est de créer de la communication avec d’un coté l’athlète et son entraineur et, d’un autre coté l’équipe. L’idée de ce poste est de créer un intermédiaire permettant aux DS de se concentrer à 100% sur leurs tâches. Suivre au jour le jour la forme des athlètes et en faire le rapport pour affiner les choix tactique en course avec le staff concerné. Mon rôle est donc de travailler en collaboration avec le manager, les 2 directeurs sportifs, les deux médecins, les assistants et les mécanos pour optimiser l’environnement des athlètes. Je ne chapeaute donc pas l’ensemble car chacun a des tâches bien distinctes mais nous travaillons tous ensemble dans le même but.
On sait que pas mal d’athlètes ont leurs entraîneurs perso, comment gérez-vous cet aspect-là ?
Grâce à la communication. L’idée est de permettre aux filles d’être dans les meilleures conditions possibles et la confiance est primordiale pour l’athlète de haut niveau. Si ce dernier travail bien avec un entraineur perso, il est alors plus intéressant de bien faire le lien entre le duo et l’équipe plutôt que de casser ce duo et faire perdre ses repères à l’athlète. Cependant les regroupements équipe passent avant l’aspect individuel. Pour que cela convienne a chacun nous essayons de prévoir en amont les dates et les programmes pour que chaque entraineur puisse l’intégrer au programme des athlètes.
Y-a-t-il des obligations de ce côté-là, par exemple, travailler avec les mêmes outils?
L’équipe a fait le choix de ne pas obliger le changement d’entraineur lors de mon arrivée. A moi donc de m’adapter aux méthodes d’entrainement autres que la mienne. À mon sens, il existe autant de façon d’entrainer que d’athlètes, l’idée étant donc de comprendre comment chacun travail pour suivre au mieux chacune des filles de l’équipe. Cependant les outils utilisés sont similaires dans la plupart des cas ce qui facilite les échanges. La plus grosse différence au départ, étant la façon de s’exprimer en terme de zones de travail avec certaines étrangères par exemple car il existe plusieurs écoles dans l’entrainement mais il s’agit là uniquement de compréhension et de communication pour s’y adapter.
Au total, quelle est la part des filles de FDJ/NA qui travaillent avec un entraîneur hors équipe et celle des filles qui sont coachées en interne?
6 athlètes de l’équipe sont actuellement coachées en interne et les 7 autres ont donc un entraineur perso.
Faîtes-vous des réunions entre tous, des briefings individuels, des rendez-vous visio ?
Pour le moment j’ai surtout pu contacter les entraineurs individuellement par message ou par appel ainsi qu’en direct pour certaines mais le modèle de performance de l’équipe est en pleine construction donc cela évoluera surement dans le temps pour optimiser ce qui peut l’être.
Quelles qualités faut-il pour harmoniser tout cela ?
Comme évoqué précédemment, il s’agit surtout de communication et parfois d’adaptation ou de patience. Souvent, le fait de devoir travailler en groupe impose des contraintes aux entraineurs perso ce qui ne plait pas toujours mais il faut faire avec. Comme évoqué précédemment nous mettons l’accent sur l’équipe, un excellent collectif aidera les individualités à s’exprimer. Il est important pour ça d’avoir la confiance des athlètes donc c’est également du travail de fond pour prouver à chacune que tout ce qui est fait est pensé pour elle.
Le travail d’analyse mené par Flavien | © Thomas Maheux
Aujourd’hui, vous diriez que c’est un poste obligatoire dans une équipe aux ambitions internationales?
C’est un peu prêcher pour ma paroisse mais évidemment je suis convaincu que le poste d’entraineur dans une équipe pro est primordial. Aujourd’hui chaque équipe essaye d’optimiser chaque détail pour amener les athlètes au plus haut niveau. Un entraineur peut amener de l’expertise dans de nombreux domaines en amont des courses avec du travail physique tactique et technique. Le fait d’encadrer les athlètes aussi et de leur montrer qu’elles sont soutenues à tous les échelons dans l’équipe est important. C’est un métier à complémentarité avec celui de directeur sportif et plus l’équipe monte en niveau plus les postes doivent être occupés par des personnes différentes pour bien dissocier les rôles et permettre à chacun de bosser à 100% son domaine.
Les équipes étrangères ont-elles aussi votre profil de directeur performance?
Oui on retrouve des entraineurs dans pas mal d’équipes maintenant, avec, certaines équipes qui imposent l’entraineur équipe à toutes les athlètes et d’autres qui composent comme nous le faisons chez nous.
Si vous avez travaillé avec les hommes, quelle est la différence d’approche avec les filles? sont-elles plus pros? plus réceptives? plus fermées aux évolutions ou le contraire?
Je n’ai pas encore 20 ans d’expérience derrière moi pour comparer les deux manières de travailler mais pour le moment je dirais que c’est plutôt similaire. On va retrouver chez les hommes des coureurs très pros dans tous les domaines, très ouverts à ce que vous pouvez leur proposer et d’autres qui ont beaucoup plus de mal à être modelé, à changer leur schéma si c’est nécessaire. Chez les femmes c’est pareil ce sont des athlètes avant tout. Si je devais sortir un point différent tout de même entre les hommes et les femmes, je dirais que les femmes demandent plus de détails, posent plus de questions pour être rassurées et pour bien cerner ce que vous leur demandez mais comme pour tout il ne faut pas généraliser. Pour moi, quelque soit le cas en question, la qualité première est l’adaptation de la part de l’entraineur pour trouver la façon d’entrainer qui convient le mieux à l’athlète car comme dit précédemment, il existe autant de manière d’entrainer que d’athlètes.
Comment voyez-vous votre fonction dans 5 ans?
J’apprécie travailler dans le cyclisme féminin donc j’espère que le poste d’entraineur sera toujours d’actualité et que le domaine de l’entrainement pourra évoluer dans le cyclisme féminin comme chez les hommes et voir apparaitre ce poste de directeur de la performance. J’ai pu travailler un peu avec la cellule d’entrainement de Groupama FDJ ainsi qu’avec Samuel Bellenoue aujourd’hui directeur de la performance chez Wanty Gobert. Ce sont des gens qui travaillent avec plusieurs entraineurs dans l’équipe avec certains qui sont plutôt terrain, d’autres très scientifiques, des spécialistes en nutrition, matériel, podologie, psychologie ou autres. Le fait d’avoir des moyens alloués à la performance permet, au sein même du domaine de l’entrainement, de détailler différents profils et métiers pour se compléter les uns les autres pour être encore plus précis au prés des athlètes. L’idéal serait donc de prendre exemple sur les structures professionnelles masculines.