Quelle est l’importance de bien se nourrir avant une course d’une manière générale ?
Adopter une alimentation adaptée, ce n’est pas seulement le faire 2 semaines avant une course, c’est être exigeant sur le contenu de son assiette quasiment toute l’année! Nous pourrions comparer cette situation à celle d’un étudiant qui prépare le baccalauréat. Si toute l’année il ne fait rien et passe son temps à s’amuser et à sortir avec ses copains, le risque d’échouer à l’examen est grand, même s’il se met à réviser sérieusement 2 semaines avant l’épreuve. En diététique, les adaptations métaboliques et physiologiques sont parfois longues à se mettre en place. Des changements judicieux quelques jours avant une course ne suffiront probablement pas à corriger certains déséquilibres.
Combien de temps avant faut-il s’alimenter pour une course dans l’après-midi ?
Le dernier repas devrait en théorie, s’achever environ 3 heures avant le départ. Tout simplement afin de limiter la dépense énergétique liée à la digestion et d’autoriser plus aisément une baisse de l’irrigation sanguine au profit par exemple des muscles, de la peau, du cerveau.
Au départ lors la Marseillaise / ©Vélo 101
Quels sont les aliments à favoriser avant une grosse échéance ? Et quelles en sont les quantités ?
Les quantités sont variables selon les individus. Mais il est préférable d’opter pour un dernier repas digeste, exempt de trop de graisses et d’aliments riches en fibres. Par exemple, un blanc de poulet sans la peau avec du riz blanc et un peu d’huile d’olive pourraient parfaitement convenir. Prudence avec les pâtes au blé dont la richesse en gluten expose parfois le pratiquant à des lourdeurs digestives. Le denier repas ne sert pas à saturer les muscles de glycogène, il est surtout utile pour le foie dont la fonction de maintien d’une glycémie stable à l’effort sera primordiale pour durer dans l’effort sans risquer l’hypoglycémie prématurée et rédhibitoire.
Et pour une course qui commence vers 10-11 h ? Comment bien gérer entre petit-déjeuner et collation ?
Fin du petit déjeuner vers entre 7 et 8 heures du matin. Aliments possibles : pain au pur levain avec beurre et/ou purée d’amandes complètes sans sucres ajoutés, biscottes de pain des fleurs au sarrasin ou à la châtaigne, pancakes à la farine de riz complet, œuf, jambon blanc à la coupe, oléagineux (amandes, noix, noisettes…), gâteau à la patate douce sans sucres ajoutés, boisson chaude sans sucres ajoutés. La collation reste optionnelle (fruit non acide, amandes non grillées…) et doit être achevée 1h à 1h30 avant le départ (afin de réduire le risque d’hypoglycémie réactionnelle d’exercice).
Ce régime spécial « sportif » est à mettre en place plusieurs jours avant l’effort ?
A l’instar de l’entraînement, des soins médicaux, des diverses stratégies de récupération, une diététique adaptée aux exigences de la discipline constitue un élément majeur d’optimisation du couple santé-performance. Le pratiquant devrait y veiller quasiment toute l’année.
Une façon d’alier l’utile à l’égréable pour L.Deignan / ©L.DEIGNAN
Malgré tout, des petits écarts sont-ils possibles ?Si oui, quels sont leurs limites et pourquoi ?
Bien entendu et heureusement. L’idéal est d’effectuer ces derniers à distance des échéances importantes, sans tomber dans l’excès. Certains sportifs sont capables en seulement une soirée ou un week-end, de ruiner les efforts d’une semaine d’entraînement. Mieux vaut réaliser régulièrement quelques petits écarts plutôt que de se priver de tout, d’exploser et de sombrer ensuite dans des excès parfois difficiles à stopper.
Des aliments type chocolat sont des péchés mignons mais ils ont aussi leurs bienfaits ?
Je dirais même que le chocolat est un excellent aliment santé-plaisir. A condition d’une teneur suffisante en cacao (80% minimum). Son cacao posséderait des vertus antioxydantes, supérieures à celles du thé vert et du vin rouge. J’aime faire référence à cette citation : « Sur 10 personnes interrogées, 9 vous diront qu’elles aiment le chocolat, la dixième ment ». Une consommation journalière de 15 à 20 g de chocolat, en dessert ou en collation, pourrait parfaitement convenir aux inconditionnels de cet aliment.
De même, avant une course, sur le plan des boissons que faut-il favoriser pour ne pas avoir de carences ?
De l’eau plate avant une course, une boisson de l’effort durant l’épreuve, une boisson de récupération riche en acides aminés essentiels et en glucides à index glycémique élevé en récupération.
Ensuite, après la course, quels sont les aliments qui permettent aux muscles de bien récupérer ?
Après une course, il est nécessaire d’apporter des aliments aptes aux resynthèses tissulaires et aux réplétions glycogéniques. La première heure est cruciale pour la récupération. Les possibilités de resynthèses et de réplétion sont majorées compte tenu de l’avidité du muscle pour le glucose et les acides aminés (beaucoup de récepteurs membranaires et donc de portes d’entrée). Durant cette période, la prise d’une boisson de récupération adaptée est nécessaire. Elle peut être soutenue par quelques millilitres d’une source de bicarbonates de sodium destinée à aider au retour de l’équilibre acido-basique. Prudence avec le dosage de la boisson de récupération, il doit respecter le délai de reperfusion de l’intestin. Des aliments comme la banane, les amandes, les fruits secs sont possibles. Le repas d’après course devrait proposer des protéines de bonne qualités (viande blanche, poisson…), des légumes, des féculents (privilégier si possible la pommes de terre pour ses vertus « désacidifiantes »). Un petit dessert plaisir est possible bien entendu.
Quelles sont aussi les boissons « miracles » ? On voit beaucoup de coureurs avec des shakers à l’arrivée des courses, quelle est cette composition ?
Il s’agit de boissons riches en acides aminés et en glucides destinées, durant cette fenêtre métabolique et protéique, à optimiser la récupération musculaire et la reconstitution des réserves énergétiques. Elles proposent en général un apport d’environ 20 g de protéines pour 40 g de glucides. C’est la précocité avec laquelle le pratiquant va consommer celle-ci qui va conditionner son niveau de récupération. En outre, ces boissons offrent l’avantage d’être mieux assimilées que des aliments qui demandent une contribution digestive supérieure.
Stéphane Delage est diététicien avec une spécialité dans la nutrition du sport et la micronutrition et exerce en libéral à Bordeaux. Nageur et triathlète, il est adepte des trails et des courses de montagne et est passionné de cyclisme. Stéphane Delage suit et conseille plusieurs athlètes de haut niveau et intervient auprès d’équipes professionnelles. Il est en outre l’auteur de plusieurs ouvrages sur la nutrition et la diététique.