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Infographie présentant l’ensemble des parcours du 3 Grands Tours au XXIe siècle | © Romain Courvoisier
Voyager à vélo
Si le Giro s’est construit la tradition d’un long voyage après le premier week-end, marquant la rupture entre l’étranger et la botte, le Tour de France préfère effectuer cette transition à la pédale. Il faut dire que l’Hexagone jouit de nombreux voisins, et dispose là d’un nombre d’options démultiplié dans cette voie. Belgique (Liège en 2004 et 2012 et Bruxelles en 2019), Allemagne (Düsseldorf en 2017), Angleterre (Londres en 2007 et Leeds en 2014) ou encore Luxembourg (2002) ont ainsi lancé la grande messe au XXIe siècle. Même des départs plus lointains, comme aux Pays-Bas (Rotterdam en 2010 et Utrecht en 2015) n’ont pas dérogé à la règle du retour en France à vélo, occasionnant ainsi une traversée du Bénélux, avec ses monts et ses pièges. De ce point de vue, le Grand Départ de Copenhague l’an prochain sonne une petite révolution du côté d’ASO, avec la réintroduction d’une journée de repos dès le premier lundi, coutumière en Italie.
Le Tour a organisé son grand départ de Bruxelles en 2019 | ©
En outre, la Grande Boucle aime également rendre visite aux territoires frontaliers en cours de course, à l’image des nombreuses excursions en Allemagne (2002 et 2005), Suisse (2009, 2012, 2016 et 2022), en Espagne (2006, 2009 et 2016), en Italie (2011) ou encore en Andorre (2009, 2016 et 2021), renouvelant ainsi terrains et paysages pour coureurs et spectateurs.
La Diagonale du Vide à l’honneur sur les parcours du Tour de France
Infographie présentant la compilation de tous les parcours du Tour de 2001 à 2022 | © Romain Courvoisier
Elle est aussi frappante que d’un point de vue économique. En industrie comme en cyclisme, la diagonale du vide reste prégnante. S’étendant de Charente à la Franche-Comté en passant par le Limousin, elle cisaille la France en deux. Et les quelques traits jaunes qui la sillonnent ne font que rappeler que si on la traverse, on ne s’y arrête pas. Plaines infinies, relief uniforme, paysages monotones… Le Tour craint l’ennui.
Et l’argument économique terrasse les collectivités. 80 000 euros pour un départ, 120 000 euros pour une arrivée, dans des régions appauvries par la désindustrialisation et la mondialisation agricole, c’est trop, beaucoup trop. Comme le symbole d’une société fracturée, même le Tour efface ces territoires de ses représentations.
Le suspense haletant du Tour du Limousin ou encore l’étape folle ayant relié Vierzon au Creusot cette année donnent pourtant des indications contraires à cette pensée, et des raisons de s’y intéresser. Si les grands coups de crayons sur la carte sont évidemment à bannir, les difficultés ne manquent pas pour tordre le peloton et créer du spectacle.
Le goût de l’action sur le Tour de France
À l’inverse, les grands massifs telles les Alpes ou les Pyrénées, mais aussi les fameux vallons bretons ou occitans sont largement mis à l’honneur par la carte. Si les seconds se prêtent idéalement aux baroudeurs, les premiers sont les juges mythiques des grimpeurs, dans leur quête de la toison d’or. En tout temps, ces montagnes ont fait la légende du Tour et entretiennent aujourd’hui son mythe. Et la professionnalisation croissante du sport renforce cette tendance. Pour départager les meilleurs, la Grande Boucle doit sans cesse innover pour trouver les tracés les plus propices à la bagarre. Dénivelés monstrueux, forts pourcentages, emprise constante… seuls les grands massifs sont capables d’offrir de tels éléments. Jouissant en outre de collectivités enrichies par le tourisme d’altitude, ils ont ainsi acquis une place invariable sur le parcours de la Ronde de Juillet, que seule une collision tectonique pourrait détrôner.