Thibaut PinotThibaut Pinot | © Groupama-FDJ
Toute la France du cyclisme repose sur ses épaules. Héros malheureux de l’Hexagone l’été dernier, le franc-comtois repart à la charge cette année, en espérant bien décrocher enfin le Graal, dans cette sublime et terrible quête qu’il poursuit depuis l’entame de sa carrière, et ses premiers exploits sur la Grande Boucle. S’il a déjà terminé sur le podium de l’épreuve reine, en 2014, le haut-saônois a prouvé l’année dernière qu’il avait les jambes pour se hisser sur la première marche, en endosser une tunique dorée qui perdure à fuir les épaules tricolores sur la plus belle avenue du monde. Et si l’on ne sait jamais avec Thibaut Pinot dans quel état de forme il se situe, le morgelot semble encore avoir « les cannes » cette année, à en juger sa satisfaisante reprise d’août. Après une encourageante 4e place au classement général du Tour d’Occitanie, le coureur de la Groupama-FDJ est monté d’un cran sur le Dauphiné, dont il fut un temps le leader virtuel, avant d’être devancé par Daniel Felipe Martinez.
Mais si ce « pré-Tour de France » a confirmé le bon état de forme de Thibaut Pinot, il en a également souligné les éternelles failles, semblant le condamner pour toujours aux places d’honneurs. Abandonné par son équipe au cours d’une cinquième étape de folie, le français a longtemps résisté aux multiples attaques de ses adversaires avant de s’effondrer dans la côte de Domancy, et montrer de nouveau ce triste visage abattu et agacé que l’on a horreur de voir. Si Thibaut Pinot faisait un parfait dauphin de Primoz Roglic, il fut un piètre leader. Et la désertion de ses équipiers dans les dernières ascensions rend particulièrement inquiétante l’hypothèse d’un maillot à défendre sur la Grande Boucle, face à un plateau de cadors extrêmement relevé. Alors, pour la victoire, pour le suspense et pour le spectacle, rien ne serait mieux que la conquête du fameux paletot jaune sur ses terres, au sommet de la Planche des Belles Filles, la veille de la paisible étape des Champs-Elysées. On y croit, on y rêve.
Mikel LandaMikel Landa | © Bahrein-Merida
Après avoir été prisonnier du rôle de lieutenant de luxe chez Sky, après avoir été enfermé dans la stratégie à trois têtes de Movistar, Mikel Landa est enfin libre de briller, désigné comme leader unique du Team Bahrein-Merida pour le classement général. Et si son équipe visera aussi les étapes avec Sonny Colbrelli, Pello Bilbao et Matej Mohoric, il pourra compter sur un collectif solide et dévoué pour l’accompagner vers les sommets, notamment grâce à la fraîche arrivée de Wout Poels.
Et si son récent Critérium du Dauphiné ne donne pas lieu à un débordement d’optimisme quant à sa condition physique, l’espagnol a cependant les références pour rassurer. Second du Tour de Burgos, début août, derrière l’intouchable Remco Evenepoel, le basque s’était déjà classé 3e du Tour d’Andalousie en début de saison. Surtout, le natif de Murgia a l’expérience des Grands Tours, et possède dans son palmarès une impressionnante de places d’honneurs aux classements généraux. 3e du Giro en 2015, il était passé à une seconde de monter sur le podium des Champs-Elysées lors du Tour de France 2017. De même, son aptitude à enchaîner une quatrième place au Giro puis une sixième place sur la Grande Boucle l’an passé souligne ses capacités de récupération et sa régularité. Ainsi, les yeux cette fois rivés sur le Tour, Mikel Landa a de quoi espérer mieux qu’un nouvel accessit.
Miguel Angel LopezMiguel Angel Lopez | © Astana
Décidément, « Superman » est un mystère. Annoncé comme véritable prodige du cyclisme colombien au début de sa carrière, Miguel Angel Lopez n’a jamais su réellement confirmer les attentes placées en lui, sauf par intermittences. Et ce manque de régularité est bien son plus grand problème. Parfois brillant triomphateur, le natif de fait aussi souvent figure de terrible déception. Tantôt volant à l’avant, tantôt chutant dans les méandres de la course, le coureur d’Astana s’avère relativement à suivre dans ses performances. Mais si cet écueil l’a pour l’instant empêché d’accrocher un Grand Tour à son palmarès, ses journées d’exceptions lui ont déjà permis de grimper par deux fois sur le podium de ses épreuves majeures, lors d’un brillant doublé Giro-Vuelta en 2018.
Cependant, son état de forme actuel reste encore un point d’interrogation. Inexistant sur le Tour d’Occitanie et le Mont Ventoux Dénivelé Challenge, Miguel Angel Lopez s’est adjugé une discrète 5e place sur le Dauphiné, placé sans briller. En deçà pour l’instant du niveau des cadors, le colombien semble toutefois monter en puissance depuis la reprise, et ne met pas Primoz Roglic et consorts à l’abris de ses fabuleuses envolées.
Adam YatesAdam Yates | © Michelton-Scott
Pour son dernier Tour avec son équipe de toujours, la Michelton-Scott, avant de s’envoler chez INEOS, Adam Yates va une nouvelle fois tenter ce à quoi il n’est pour l’instant pas encore parvenu : grimper sur le podium de la Grande Boucle. Moins en réussite que son frère sur l’épreuve français, le natif de Bury ne compte qu’un top 10 (4e en 2016) pour quatre participations. Décevant en 2018, de nouveau à la rue en 2019, l’anglais peine à confirmer les espoirs placés en lui sur les Grands Tours, lui le spécialiste des courses d’une semaine. Or, s’il avait remporté haut-la-main l’UAE Tour en février, l’anglais ne s’est pas montré à son aise sur le Critérium du Dauphiné, régulièrement lâché lorsque la route s’élevait.
Alors, en cas de nouvelle défaillance, Adam Yates pourra compter sur une équipe forte et rodée pour l’accompagner. Avec Esteban Chaves ou encore Mikel Nieve à ses côtés, il aura vraisemblablement des roues auxquels s’accrocher, même s’il s’agira surtout de retrouver sa forme coutumière de épreuves de début de saison pour atteindre enfin les sommets.
Emmanuel BuchmannEmmanuel Buchmann © Bora-Hansgrohe
Après sa douloureuse chute sur le Critérium du Dauphiné, dans une descente ayant également jeté à terre et contraint au forfait le néerlandais Steven Kruisjwijk, difficile de connaître le réel état de forme d’Emmanuel Buchmann. Pourtant, avant ce coup d’arrêt dans sa préparation, l’allemand détonnait sur l’épreuve organisée au sein de la région Auvergne Rhône-Alpes. 3e au col de Porte, 4e à Saint-Martin-de-Belleville, le coureur de la Bora-Hansgrohe figurait fièrement à la 3e place du classement général avant de devoir quitter prématurément la course. Déjà vainqueur du Trofeo Serra de Tramuntana dès l’entame de sa saison, le natif de Ravensburg alimente surtout les mémoires par son étonnante prestation du Tour 2019, où il avait su se montrer régulier et tenace pour accrocher la 4e place du classement général final, s’illustrant alors à un niveau inédit dans sa carrière.
Et c’est bien pour cette raison qu’Emmanuel Buchmann fait partie de ce top 5 des outsiders : à la vue de sa constance et de son excellence lors des moments importants de la saison, l’allemand ne peut plus être négligé. D’ailleurs, ce choix ne réside pas simplement dans le simple talent du badois-wurtembergeois, mais aussi dans la solidité collective d’une Bora-Hansgrohe impressionnante, forte de sa série de grimpeurs germanophones, de Felix Grosschartner à Gregor Mühlberger en passant par Lennard Kämna, et sans oublier Maximilian Schachmann : une armada capable de porter son leader vers une premier podium sur un Grand Tour.
Par Jean-Guillaume Langrognet