Il est celui dont tout le monde parle depuis la découverte du tracé du Tour de France 2012. Bradley Wiggins ? Non, le chronomètre. Encore que les deux soient intimement liés. Avec 101,4 kilomètres de contre-la-montre répartis sur trois jours de course, les différences chronométriques vont être plus étudiées, analysées, commentées que jamais. Pas question de confier cette mission ô combien sérieuse à n’importe qui. Depuis 1998, c’est la société Matsport qui s’en charge. Chronométrage, classements et diffusion vers les nouveaux médias ou la télévision font partie des missions de l’équipe codirigée par Bruno Cordier, directeur adjoint de Matsport. Sur le Tour, sept personnes de son équipe assurent en permanence le chronométrage des étapes en ligne, jusqu’à seize sur les contre-la-montre.
« Au départ de chaque étape en ligne, c’est le chronométreur officiel de la FFC qui déclenche le chrono quand le drapeau est baissé, explique Bruno Cordier. Il rapporte ensuite sa machine sur la ligne d’arrivée, 10 kilomètres avant que les coureurs n’en terminent. Ce chronomètre officiel va permettre de synchroniser toutes les machines installées sur la ligne d’arrivée. » A 10 kilomètres de l’arrivée, le chrono digital installé sous le portique d’arrivée est réajusté au temps exact de la course. Le chronométrage officiel se fera à la photo-finish.
A cet effet, trois caméras photo-finish et un système de transpondeur sont utilisés. C’est la tangente de la roue avant qui donnera son temps à chaque coureur et permettra d’établir le classement. Avec une règle bien spécifique. « Chacun a le temps du groupe auquel il appartient », précise Bruno Cordier. C’est le fameux m.t. (même temps) que nous diffusons dans nos classements. « Un nouveau groupe est pris en compte à chaque fois qu’une seconde sépare la roue avant d’un coureur de la roue arrière du gars qui le précède. S’il y a plus d’une seconde entre les deux, le nouveau coureur a un nouveau temps. Maintenant, une seconde, sur un sprint, ça correspond à peu près à trois longueurs de vélo, ce qui laisse quand même pas mal d’espace. »
Dans leur bulle située pile poil sur la ligne d’arrivée, le décryptage de la photo-finish est réalisé par les opérateurs Matsport, des spécialistes qui couvrent 150 jours d’événements sportifs par an et sont aguerris à ce type de matériel. Un matériel ultra sophistiqué qui n’épargne pas les chronométreurs de quelques aléas. « Les plus gros inconvénients, ce sont les conditions météos, les dossards cachés. » Pour y remédier, chaque vélo est désormais équipé d’un transpondeur qui permet d’identifier instantanément son propriétaire. Mais cet outil n’intervient pas dans le chronométrage officiel et ne peut avoir qu’un rôle d’information. « Le temps se prend à la tangente de la roue avant, rappelle le chronométreur. Et le transpondeur ne peut pas être placé à cet endroit-là. Un coureur, réglementairement, peut aussi changer de vélo ou l’échanger avec un coéquipier, et c’est pourquoi on ne peut l’utiliser dans le chronométrage officiel. »
Malgré tout, les transpondeurs vont permettre à l’équipe Matsport d’identifier plus aisément un coureur dont le dossard et la plaque de cadre seraient masqués et inidentifiables par les trois caméras photo-finish. Ils leur permettront aussi de réaliser des pointages aux 3 kilomètres afin de savoir où se situe chaque coureur à cet instant. En cas de pépin dans les 3 derniers kilomètres, comme c’est arrivé mardi à Boulogne-sur-Mer ou mercredi à Rouen, le coureur accidenté bénéficiera ainsi du temps du groupe avec lequel il se trouvait au moment du pointage.
Et les contre-la-montre dans tout ça ? Sur ces étapes spécifiques, les temps réels de chaque coureur sont pris au départ, avec un dispositif de cellule. Le même dispositif de cellule se retrouve aux chronométrages intermédiaires comme à l’arrivée, où il est ici doublé avec la photo-finish, qui permet de recevoir une preuve visuelle du temps de chaque coureur. Un dispositif extrêmement précis et fiable, bref, vous l’aurez deviné, réglé comme une horloge.