Pour la deuxième fois sur le Tour de France, l’échappée va au bout, cette fois-ci avec près de 20 minutes d’avance sur les favoris. Dans la dernière difficulté, les hostilités ont pu commencer entre les meilleurs puncheurs du groupe de fuyards. Alors que Jasper Stuyven (Trek-Segafredo) était seul à l’avant, Omar Fraile (Astana) a été l’unique coureur à attaquer, dans le premier kilomètre d’ascension. Au train, il a réussi à boucher la cinquantaine de secondes qui le séparait du Belge pour filer vers la victoire, jamais revu par Alaphilippe (Quick Step Floors) qui a lancé son effort trop tard. « C’est un jour incroyable pour moi. Nous avons rêvé de cette victoire et nous avons travaillé dur pour l’obtenir s’est réjoui l’Espagnol. J’avais de bonnes jambes et je savais que si on arrivait à maintenir l’avantage de Stuyven en-dessous de deux minutes, la victoire était envisageable. Le vent soufflait de face et il a dépensé beaucoup d’énergie à rouler en solitaire. C’est ma plus belle victoire, c’est incroyable, c’est la plus grande chose qui puisse arriver à un coureur cycliste. J’avais bien étudié la montée finale, que je connaissais pour l’avoir pratiquée sur d’autres courses, par exemple le Tour du Gévaudan 2016. Mais elle m’a paru encore plus longue que les fois précédentes ! Je me sens très fier de poursuivre la liste des coureurs espagnols qui se sont imposés ici. »
Parti dans une entreprise au long cours, lorsqu’il est sorti du groupe d’échappée à 60 kilomètres de l’arrivée, Jasper Stuyven est passé tout près d’accrocher un succès de renom à son tableau de chasse. Mais le Belge, qui a roulé pendant de longs kilomètres en solitaire s’est épuisé et n’a pu avoir le jus nécéssaire dans la Montée Jalabert pour résister au retour d’Omar Fraile, puis d’Alaphilippe dans un second temps. « Comme l’année dernière lors de la sixième étape du Giro, je me suis fait avoir » a expliqué au micro de la RTBF le classicmen, déçu de voir la victoire lui filer entre les doigts après son superbe numéro. « Je savais que j’avais besoin de beaucoup d’avance. C’était raide. J’avais beau me dire : ‘Vas-y à bloc’, je devais trouver mon rythme et je ne pouvais pas faire beaucoup plus. Peut-être que si Fraile m’avait rejoint 200 ou 300 mètres plus loin, j’aurais pu l’accompagner jusqu’au sommet. Mais il ne me restait plus rien dans les jambes. Elles étaient vides. C’était difficile, seul contre le vent. J’ai quand même voulu y aller. Je me sentais très bien. Je roulais bien surtout dans ces parties un peu en déclin. La veille, j’hésitais encore entre un vélo léger ou aérodynamique. Je pense que l’aérodynamique avait son avantage.»
Au sein du groupe de favoris, une vingtaine de minutes plus tard, les leaders se sont quelque peu découvert dans cette pente raide, avec ses passages à plus de douze pour-cent. L’attaque de Romain Bardet (AG2R La Mondiale) se faisait attendre, alors que l’Auvergnat avait fait rouler ses hommes en tête de groupe au pied de la côte. Mais c’est finalement Primoz Roglic (LottoNL Jumbo) qui a été le plus offensif dans le final. Le Slovène a porté une accélération à plus de deux bornes de l’arrivée et a réussi à prendre quelques secondes sur ses concurrents directs. « Chaque seconde compte a avoué l’ancien sauteur à ski. C’est toujours mieux de gagner huit secondes que d’en perdre. Je veux finir aussi haut que possible. C’est pourquoi je dois me battre pour chaque seconde. J’ai vu que personne n’attaquait. J’ai pensé: peut-être que les autres coureurs sont trop fatigués pour attaquer. Mais cela ne fait pas une grande différence si vous courez devant ou dans le groupe. C’est un gros effort pour tout le monde. »