Il n’est pas apparu sur la ronde espagnole depuis 2015 mais dans la foulée de sa victoire finale, la semaine dernière, au Tour de Burgos, il cristallise sur son nom et son histoire si particulière l’espoir des aficionados de voir un Espagnol monter sur la plus haute marche du podium.
Sur les 75 éditions de La Vuelta déjà disputées, 32 sont revenues, au final, à un coureur espagnol. Au tableau des victoires par pays, suivent la France (9), la Belgique (7), l’Italie (6) et la Suisse (5). Au palmarès, un maximum de six années sépare deux vainqueurs espagnols (entre Melchor Mauri en 1991 et Abraham Olano en 1998, les Suisses Tony Rominger, trois fois lauréat, et Alex Zülle, deux fois, ainsi que le Français Laurent Jalabert se sont imposés). Les six derniers champions couronnés sur la place Cibeles à Madrid étaient des étrangers : l’Italien Fabio Aru (2015), le Colombien Nairo Quintana (2016), les Britanniques Chris Froome (2017) et Simon Yates (2018) ainsi que le Slovène Primoz Roglic (2019, 2020). Il se trouve qu’Alberto Contador avait empoché sa troisième et dernière victoire finale à Saint-Jacques-de-Compostelle, où La Vuelta 21 connaîtra son dénouement le 5 septembre prochain. Est-ce un signe annonciateur de la fin de cette disette courant sur six éditions ?
Le cyclisme espagnol a vécu une période dorée au cours de laquelle Alberto Contador était loin d’être seul en son royaume, dans la mesure où Carlos Sastre, Alejandro Valverde, Joaquim « Purito » Rodriguez et Samuel Sánchez occupaient également le devant de la scène. L’intensité a baissé mais les protagonistes du cru n’ont pas manqué puisque, depuis 2014, une Vuelta sur deux s’est achevée avec un des leurs sur la deuxième marche : « Purito » en 2015, Enric Mas en 2018 et Alejandro Valverde en 2019. La succession du Madrilène semblait devoir être assurée, dans un premier temps, par Mikel Landa. Contraint à l’exil à la fermeture de l’équipe de ses débuts, Euskaltel-Euskadi, après ses deux premières participations à La Vuelta (2012, 2013), il a trouvé refuge dans des multinationales où il n’a pas toujours pu choisir ses objectifs, ni se concentrer prioritairement sur la ronde espagnole. Des chutes ont aussi jalonné son parcours – c’est encore le cas cette année mais il semble avoir bien récupéré de ses blessures du début de Giro d’Italia. Les lois du marché l’ont poussé à changer d’employeur tous les deux ans, ce qui induit pour beaucoup de coureurs en partance des fins de saison en queue de poisson…
Toujours est-il qu’il n’a pris part à La Vuelta que lors de ses deux années chez Astana (2014, 2015), mais pas avec le Team Sky (2016, 2017), ni Movistar (2018, 2019), ni Bahrain-McLaren l’an passé. En quatre participations, sa meilleure place finale est 25e en 2015, alors qu’il compte six top 10 au Giro d’Italia et au Tour de France, et son plus grand fait d’armes reste son unique victoire d’étape, sur la 11e, présentée comme « l’étape la plus dure de tous les temps » car elle offrait aux coureurs 5300 mètres de dénivelé sur 138 km dans la principauté d’Andorre. Landa s’était glissé dans l’échappée matinale au mépris des directives d’Astana et il refusa d’attendre son leader, Fabio Aru, mais l’affaire ne fit pas grand bruit, au final, car la formation kazakhe s’offrit un coup double : étape pour Landa et La Roja pour Aru, deuxième à Cortals d’Encamp, 1’22’’ plus tard, et, surtout, 1’37’’ avant Tom Dumoulin, en rouge jusqu’alors.
Mikel Landa – Bahrain Victorious | ©
Mikel Landa a 31 ans et onze saisons pros derrière lui. Il a aussi gagné trois étapes au Giro où il est monté sur le podium, 3e en 2015, et a remporté le classement de la montagne en 2017, deux Tour de Burgos, un Tour du Trentin… On parle à son sujet de « landismo » pour personnifier un énorme potentiel dont les fans sont persuadés qu’un jour il se transformera en très grande victoire dans une course de trois semaines, un jour où, enfin, il aura été épargné par les chutes et les instructions de son équipe contraires à ses ambitions individuelles.
© Jonathan Biche / Graham Watson
« Ce jour va peut-être arriver sur La Vuelta 21, envisage le directeur général Javier Guillén. Nous lui souhaitons en tout cas que la chance soit enfin de son côté. C’est un coureur très suivi et aimé, qui compte beaucoup de fans. Pour l’impact populaire de La Vuelta, il est toujours intéressant que des Espagnols figurent parmi les grands protagonistes du classement général. La générosité de Mikel envers la communauté cycliste fait qu’il mérite de briller sur notre épreuve et nous sommes ravis de l’accueillir de nouveau après une trop longue absence. »
Murgia, sa ville natale, dans la province basque d’Alava, est à une heure de route de Burgos, d’où s’élancera samedi La Vuelta 21. Il comptera donc d’emblée de nombreux supporters, qui n’oublient pas qu’il a contribué à la relance au niveau continental de la fondation Euskadi dont il prit la présidence fin 2017 jusqu’en mars dernier. Avec la montée en Pro Continentale de l’équipe Euskaltel-Euskadi et son retour dans le peloton de La Vuelta cette année, « mon rôle pouvait entraîner des incompatibilités dont personne ne voulait, expliqua-t-il. Mais mon lien émotionnel avec la fondation Euskadi restera le même et mon cœur est et sera orange pour la vie. »
Landa aborde aussi La Vuelta 21 comme coureur cycliste au sein d’une équipe Bahrain Victorious fortement armée, en particulier pour la montagne, puisque ses coéquipiers sont Damiano Caruso (2e du Giro cette année), Jack Haig, Mark Padun, Wout Poels, Jan Tratnik, Gino Mäder et Yukiya Arashiro. Elle paraît apte à rivaliser avec les mastodontes Ineos Grenadiers et Jumbo-Visma.
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