Les Britanniques l’avaient rêvée en ouverture des Jeux Olympiques londoniens samedi. Mais d’un rêve, la médaille d’or est rapidement devenue une obsession quand les athlètes de la délégation britannique ont échoué les uns après les autres dans des disciplines où on les pressentait invincibles. Ce matin, au cinquième jour des Jeux 2012, le pays hôte n’a toujours pas goûté à l’or. Mais revoilà le cyclisme à l’affiche avec ses épreuves chronométrées. Cette fois, il n’est plus question de stratégie. La force pure fera la différence. Et en la matière le vainqueur sortant du Tour de France Bradley Wiggins est pour l’heure inégalable. Avant son départ, les Britanniques Helen Glover et Heather Stanning ont fini par lui montrer la voie en aviron en s’imposant en deux de pointe féminin, mais Brad Wiggins a-t-il vraiment besoin qu’on lui montre comment faire ?
A Londres, chaque nation a délégué son plus bel atout, mais tous ces atouts n’abordent pas l’échéance olympique avec la condition désirée, dans la foulée d’un Tour de France ou d’une course olympique en ligne qui ont laissé des traces. Tombé samedi, le tenant du titre Fabian Cancellara est amoché. Il a choisi de prendre le départ malgré tout, mais les bandages qui se devinent sous le fin maillot de l’équipe de Suisse ne laissent rien présager de bon. Ce seront 44 kilomètres de calvaire pour l’Helvète, dont l’horloge est déréglée. Bien que parti sur des bases similaires à celles de Bradley Wiggins, précédés l’un comme l’autre de 5 secondes par l’Allemand Tony Martin au premier poste intermédiaire (km 7,3), Fabian Cancellara trébuche très vite. Le podium se dérobe sous ses roues, et c’est à bout de forces physiques et psychiques que le champion olympique sortant regagne Hampton Court Palace, 7ème à 2’14 » du lauréat.
L’amoindrissement de bien des favoris avait laissé croire un instant que notre représentant national Sylvain Chavanel serait en mesure d’aller chercher bien mieux qu’un accessit dans cet exercice dans lequel il a fait d’indéniables progrès cette saison. 3ème du prologue du Tour (l’unique course chronométrée que Bradley Wiggins n’est pas parvenu à s’adjuger cette saison), 5ème des contre-la-montre de Bourg-en-Bresse au Dauphiné puis de Besançon au Tour de France, le Châtelleraudais lorgnait sur une médaille. Ce sont finalement les étoiles qu’il a vues, et pas celles qu’il convoitait. Handicapé par un problème technique, le quadruple champion de France du chrono coince mécaniquement puis mentalement. C’est un jour sans pour Sylvain Chavanel. Un jour à oublier qui lui vaut malheureusement un rang indigne du sien, 29ème à 5’28 ».
Bradley Wiggins devient le coureur cycliste le plus titré de toute l’histoire des Jeux.
Mais des déceptions, ce contre-la-montre olympique en aura présenté d’autres tout au long des 44 kilomètres. Victime d’un saut de chaîne dès son premier coup de pédale puis interrompu par une crevaison, l’Espagnol Luis-Leon Sanchez est classé 32ème à 6’20 ». Rattrapé par Jonathan Castroviejo, le Canadien Ryder Hesjedal ne fait pas mieux que 18ème à 5’27 ». Contenté par l’inattendu titre olympique décroché samedi sur la route, le Kazakh Alexandre Vinokourov met ce qui devrait être un point final à sa carrière sur un 23ème temps à 4’58 ». Ereinté par un Tour de France passé au service de sa majesté Wiggins, l’Australien Michael Rogers ne peut aller plus haut que 6ème à 2’12 ». Quant à l’Américain Taylor Phinney, qui rêvait d’égaler ses parents Connie Carpenter et Davis Phinney médaillés olympiques en 1984, il échoue encore au pied du podium, 4ème, comme il avait conclu samedi la course en ligne, battu au sprint pour le bronze.
Mais comment être déçu, au fond, dans une course olympique dont on promettait la plus belle des issues à un homme seul : Bradley Wiggins. Cette saison, le Britannique a tout planifié pour venir à bout de ses objectifs. Il savait pertinemment où il allait. Aussi, quelques heures seulement après son triomphe sur les Champs-Elysées, il y a dix jours, l’Anglais avait déjà rejoint Londres, concentré sur l’échéance suivante. Autour de Hampton Court Palace, cette ancienne résidence royale du sud-ouest londonien, le vainqueur du Tour de France n’a pas échoué. Roue pleine à l’arrière, sans gants, sans bidon, il n’a laissé échapper aucun détail pour parcourir les 44 kilomètres à 52,113 km/h de moyenne et se présenter à l’arrivée avec 42 secondes d’avance sur l’Allemand Tony Martin et 1’08 » sur son dauphin du Tour, l’Anglais Chris Froome.
Et voilà Wiggins qui écrit une nouvelle page dorée de son histoire et entre un peu plus encore dans la légende du sport britannique. Premier Anglais vainqueur du Tour de France, il devient, avec sept médailles, l’athlète britannique le plus décoré de tous les temps aux JO. Devant le rameur Steve Redgrave, quintuple champion olympique et une fois médaillé de bronze de 1984 à 2000. A l’échelle du cyclisme, Bradley Wiggins devient aussi ce soir le coureur, toutes disciplines confondues, le plus titré de toute l’histoire des Jeux, lui dont le parcours est quand même très atypique. Médaillé d’or en poursuite individuelle à Athènes et Pékin et en poursuite par équipes à Pékin, médaillé de bronze en poursuite par équipes à Sydney et d’argent à Athènes, médaillé de bronze de l’américaine à Athènes, il dépasse Leontien Van Moorsel et Chris Hoy avec sept médailles : quatre d’or, une d’argent, deux de bronze. Notre Michael Phelps à nous.
Classement :
1. Bradley Wiggins (Grande-Bretagne) les 44 km en 50’39 » (52,1 km/h)
2. Tony Martin (Allemagne) à 42 sec.
3. Christopher Froome (Grande-Bretagne) à 1’08 »
4. Taylor Phinney (Etats-Unis) à 1’59 »
5. Marco Pinotti (Italie) à 2’10 »
6. Michael Rogers (Australie) à 2’12 »
7. Fabian Cancellara (Suisse) à 2’14 »
8. Bert Grabsch (Allemagne) à 2’38 »
9. Jonathan Castroviejo (Espagne) à 2’50 »
10. Janez Brajkovic (Slovénie) à 3’30 »