Kevin, cette saison, le trio de vitesse par équipes n’a jamais été le même d’une manche de Coupe du Monde à l’autre. Est-ce à dire que sa composition n’est pas fixée à six mois des Jeux Olympiques ?
Le relais n’est pas encore fixé, c’est clair. Les coachs vont prendre leur temps pour établir la meilleure équipe qui soit. J’espère en faire partie. Tout le monde a pu avoir sa chance. Sur les trois Coupes du Monde, les compositions ont été différentes. Les cartes sont maintenant dans leurs mains. Disons qu’avec Grégory Baugé et Michael D’Almeida nous partons avec une longueur d’avance d’expérience. Cela fait dix ans que nous courrons ensemble. Nous nous connaissons bien. C’est l’avantage que nous avons.
Le point faible de l’équipe de France est clairement identifié. Le démarreur est toujours resté au-delà du Top 10 en Coupe du Monde cette année. La position de Grégory Baugé est-elle menacée ?
J’ai envie de répondre par la négative, même si je ne suis pas entraîneur et que je n’ai aucun pouvoir de décision. Ce que je peux dire, c’est qu’il est le démarreur historique de l’équipe de France. Qui plus est, nous avons essayé tout au long de la saison de changer les postes et de mettre d’autres coureurs en démarreur. Je l’ai occupé aux Championnats d’Europe, mais ce n’est pas un poste que j’affectionne du fait que je ne le travaille pas. Quoi qu’il en soit, nous n’avons pas trouvé quelqu’un qui marche mieux que Grégory Baugé.
Le manque de repères peut-il être un handicap sur les grandes échéances ?
Ça fait plusieurs années que j’occupe le poste de relayeur en vitesse par équipes. Personnellement, je ne m’inquiète pas. Je sais comment prendre un relais et le passer. Mais si un coureur moins habitué arrive en compétition, ça peut être plus délicat. Les relais sont très importants en vitesse par équipes et font partie intégrante du résultat. On l’a vu à Saint-Quentin-en-Yvelines quand les Néo-Zélandais sont déclassés pour un passage hors zone. C’est un facteur important dans la quête d’un titre.
De l’intérieur, comment expliquez-vous la saison difficile que viennent de vivre les sprinteurs français.
Nouvelle piste, nouveau staff, nouvelles techniques d’entraînement, donc nouvelle façon de préparer les Jeux Olympiques, sans vouloir griller les étapes. Nous essayons d’être prêts et nous le serons pour Rio. Auparavant, nous marchions beaucoup sur les Coupes du Monde et nous loupions notre médaille d’or olympique. Cette fois, nous ne travaillons que dans l’optique des Jeux, sans perdre trop de places au classement mondial. C’est ce qui explique cette saison un peu moins bonne que d’habitude.
En sommes, vous vous êtes inspirés du modèle britannique de 2008 et 2012.
Nous ne choisissons pas un modèle mais c’est dans cet esprit-là que nous avons travaillé effectivement. Celui de ne pas être sur la première marche du podium trop tôt pour se louper ensuite. Les Championnats du Monde ne seront cependant pas trop tôt, ils constituent une étape importante. Mais nous concernant, ils seront pris dans l’état de forme du moment puisque la préparation est fixée sur les Jeux Olympiques. Aller chercher le titre, c’est toujours rassurant. Dans notre esprit de compétiteur, seul le fait d’aller sur la première marche du podium compte.
Il n’y a pas de raison de s’inquiéter ?
Non, tout est calculé. Nous nous faisons confiance, nous connaissons nos qualités, nous avons tous une grande expérience dans le domaine de la compétition. Tout va bien se dérouler. Depuis toujours nous courrons pour aller chercher cette médaille d’or, pas pour participer aux Jeux ou aller chercher une médaille. Nous l’avons vu sur le podium à Londres. Avec Grégory et Michael, nous n’avions pas de mine réjouie avec l’argent autour du cou. Ça a surpris beaucoup de monde, mais nous n’étions simplement pas venus là pour ça.
Votre qualification olympique passera-t-elle uniquement par la vitesse par équipes ou espérez-vous encore une place en vitesse individuelle ?
Non, j’ai toujours l’espoir de faire la vitesse individuelle, mais je ne fais pas d’illusion non plus. Je n’ai pas fait de résultat sur les deux manches de Coupe du Monde auxquelles j’ai participé. D’autres coureurs sont plus forts que moi. Je croise les doigts pour la faire, mais la vitesse par équipes restera mon fil rouge pour la qualification olympique.
Dans quelle mesure le fait d’avoir rejoint l’Armée de Terre l’an dernier peut-il vous aider ?
D’un côté c’est rassurant parce que je peux vivre à nouveau de mon sport. D’un autre côté, j’ai un fonctionnement proche d’une équipe pro. C’est plus simple pour moi pour me concentrer uniquement sur ma préparation.
Propos recueillis à Roubaix le 22 janvier 2016.