Le territoire italien pullule de petites ascensions aux pourcentages vertigineux. Sous l’impulsion d’Angelo Zomegnan, le Giro est allé s’aventurer sur le Monte Zoncolan. L’an dernier, on découvrait sur le Tour du Trentin le Punta Veleno et ses 9,1 kilomètres à 12% de moyenne. À la fin des années 2000, Tirreno-Adratico avait l’habitude de donner rendez-vous aux puncheurs à Montelupone, arrivée remplacée par celle à Chieti qui a vu triompher Joaquim Rodriguez (Team Katusha) hier. Depuis cet après-midi, le nom de Sant’Elpidio a Mare fera autant frémir que ces monstres transalpins, si ce n’est plus. Le panneau indiquant la déclivité affiche 30%, un véritable mur qui ferait presque passer celui de Huy pour un faux plat prononcé.
Les conditions météo des trois premiers jours de courses refont leur apparition. Après un week-end maussade, mais sans pluie, les trombes d’eau reviennent aujourd’hui, comme pour faire rentrer cette étape un peu plus dans la légende de Tirreno. Dès le départ, on sent que l’étape pourrait faire basculer cette édition 2013. Un groupe de quinze coureurs prend la fuite et il y a là de sacrés clients. Dumoulin et Sprick (Argos-Shimano), Impey et O’Grady (Orica-GreenEdge), Intxausti et Visconti (Movistar Team) Nocentini et Montaguti (Ag2r La Mondiale), Boom (Blanco), Cancellara (RadioShack-Leopard), Cunego (Lampre-Merida), Finetto (Vini Fantini-Selle Italia), Martínez (Euskaltel-Euskadi), Selvaggi (Vacansoleil-DCM), Vicioso (Team Katusha) et Voss (Team NetApp-Endura) constituent le groupe de tête.
Le peloton ne laisse pas faire, mais peine à faire descendre l’écart sur des routes où les portions planes sont rares. L’écart grimpe jusqu’à quatre minutes avant d’aborder le final. Avant d’attaquer ce fameux passage où la pente flirte avec les 30%, Damiano Cunego et Tom Dumoulin décident de se débarrasser de leurs compagnons d’échappée. Les deux seront ensemble au pied du mur de Sant’Elpidio a Mare. Beaucoup ne verront pas cette ascension. Mark Cavendish (Omega Pharma-Quick Step) quitte la course, tout comme Andy Schleck (RadioShack-Leopard). Cela fait presque un an que le Luxembourgeois n’a pas terminé de course par étapes.
Les images offertes sur cette ascension semblent venir d’un autre temps. Les coureurs zigzaguent sur la route alors que certains comme Mickaël Delage (FDJ) décident de monter à pied. La souffrance se lit sur tous les visages. Les coureurs, collés à la route, ont beau avoir tout à gauche, la fréquence de pédalage est rendue faible par la déclivité impressionnante. Pour les organisateurs, un seul passage ne suffit pas, et elle est de nouveau au programme à moins de vingt kilomètres de la ligne. Cette première ascension aura servi de répétition, la seconde va bouleverser le classement général de Tirreno-Adriatico.
Dumoulin et Beñat Intxsausti ont beau avoir pris de l’avance, ça ne suffira pas aujourd’hui. Les plus costauds sont décidés à venir titiller Christopher Froome (Team Sky) qui semblait avoir course gagnée après avoir pris la tête hier. Seulement le natif de Nairobi va sombrer aujourd’hui. Le Britannique va être distancé par tous les favoris dans la dernière montée de Sant’Elpidio a Mare. En difficulté, le Kenyan Blanc ne peut pas compter sur le train Sky qui paraissait encore intouchable il y a 48 heures à Prati di Tivo. Sergio Henao et Rigoberto Uran ne sont plus là. Le maillot bleu est isolé. Pour la première fois depuis de longs mois, la belle machine britannique s’enraye.
Si le général de Tirreno se joue en partie à l’arrière, une belle explication a lieu devant. Après le sommet, Vincenzo Nibali (Astana) attaque. Le Sicilien montre une nouvelle fois toutes ses qualités de descendeur. Il est le vainqueur sortant de Tirreno-Adriatico et n’est certainement pas décidé à rendre les armes sans avoir combattu. En compagnie d’un autre descendeur d’exception, Samuel Sanchez (Euskaltel-Euskadi), et de son ancien coéquipier Peter Sagan (Cannondale), Nibali va creuser l’écart. Alberto Contador (Team Saxo-Tinkoff) semble dans le dur. Pas Joaquim Rodriguez (Team Katusha) qui fait le bond pour rejoindre Nibali et Sagan qui ont distancé Sanchez.
Le trio se dirige vers l’arrivée. Le natif de Messine tient à distancer un peu plus Contador qui devient son plus sérieux adversaire pour la victoire finale à la veille du dernier contre-la-montre. Nibali ne compte pas ses efforts et sait qu’il ne pourra rien faire au sprint face à Peter Sagan. Le Slovaque l’emporte aisément tandis que son ancien coéquipier prend la deuxième place, les bonifications qui l’accompagnent et chipe le maillot bleu de leader à Christopher Froome pour 34 secondes.
Rien n’est donc joué avant le contre-la-montre final de 9,2 kilomètres dans les rues de San Benedetto del Tronto.
Classement 6ème étape :
1. Peter Sagan (SVQ, Cannondale) les 209 km en 5h46’17 » (36,2 km/h)
2. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) à 2 sec.
3. Joaquim Rodríguez (ESP, Team Katusha) m.t.
4. Mauro Santambrogio (ITA, Vini Fantini-Selle Italia) à 44 sec.
5. Samuel Sánchez (ESP, Euskaltel-Euskadi) m.t.
6. Chris Horner (USA, RadioShack-Leopard) m.t.
7. Alberto Contador (ESP, Team Saxo-Tinkoff) m.t.
8. Jurgen Roelandts (BEL, Lotto-Belisol) à 50 sec.
9. Thor Hushovd (NOR, BMC Racing Team) m.t.
10. Simon Geschke (ALL, Argos-Shimano) m.t.
Classement général :
1. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) en 27h57’26 »
2. Chris Froome (GBR, Team Sky) à 34 sec.
3. Joaquin Rodríguez (ESP, Team Katusha) à 37 sec.
4. Alberto Contador (ESP, Team Saxo-Tinkoff) à 48 sec.
5. Michal Kwiatkowski (POL, Omega Pharma-Quick Step) à 58 sec.
6. Chris Horner (USA, RadioShack-Leopard) à 1’05 »
7. Mauro Santambrogio (ITA, Vini Fantini-Selle Italia) à 1’20 »
8. Przemyslaw Niemiec (POL, Lampre-Merida) à 2’54 »
9. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) à 2’58 »
10. Wouter Poels (PBS, Vacansoleil-DCM) à 3’08 »