Des routes à hauteur de l’océan Pacifique soumises à l’assaut des embruns, la mer sculptée par le vent d’un côté, les falaises à la végétation dense y plongeant de l’autre, un cocktail magique de senteurs et de parfums suaves, des noms colorés… Rouler au paradis porte un nom : la Ronde Tahitienne. Pour les cyclos en quête de sensations, il existe deux types de destinations. Ou bien l’on choisit de s’attaquer à des lieux de légende, ou bien on prend un billet pour aller rouler dans un coin de paradis. En cela l’épreuve portée depuis trois ans par le dynamique Vélo Club de Tahiti piloté par l’épatant Benoît Rivals a naturellement trouvé son créneau. Elle s’inscrit désormais sans conteste comme la plus belle cyclo exotique du calendrier national.
Tout y est : la convivialité que l’on prête aux Tahitiens, le folklore polynésien, le soleil incandescent, et bien sûr les paysages majestueux, à condition de s’autoriser à lever la tête du guidon de temps en temps ! Pour cette 3ème édition, et avec 290 engagés l’an passé, les organisateurs s’étaient mis en tête de franchir le cap des 300. Le succès populaire a dépassé toutes leurs espérances. Ce sont 428 cyclosportifs, soit le plus gros peloton jamais rassemblé en Polynésie, qui se sont élancés du vélodrome de Pirae, haut-lieu des Six Jours de Papeete, hier matin. Chacun dans le maillot correspondant au circuit retenu et offert à l’inscription : rouge pour la Ronde Loisir (15 km), bleu pour la Petite Ronde (55 km) et vert pour la Grande Ronde (110 km).
Avant que ne soit coupé le ruban végétal réalisé avec les plus belles fleurs du fenua, c’est un véritable show qui enflamme le vélodrome. Danses tahitiennes au rythme des percussions précèdent le spectacle offert par le départ groupé des 428 participants, qui n’enclencheront les cales qu’une fois le peloton béni par un pasteur, comme le veut la tradition à Tahiti. On quitte alors Pirae et les faubourgs de Papeete par des routes au rendement parfait. Direction la côte est, sauvage, par la route unique ceinturant l’île. Très vite se dresse la difficulté majeure de la Ronde, l’ascension de la colline du Tahara’a, 1100 mètres à 10 % avec de beaux lacets. Il faut se faire violence pour basculer avec les meilleurs en haut, où se dresse l’arbre imposant qui valut à la colline d’être baptisée « One Tree Hill » par l’explorateur James Cook.
A la bascule, le vent se manifeste aussitôt. Sur la Côte au Vent, sans récif, la houle déferle, faisant de la baie de Matavai, bordée de cocotiers, l’un des hauts-lieux du surf tahitien. Le peloton des cadors formé à la faveur du Tahara’a fend l’air pour franchir la Papenoo, la plus grande rivière de l’île, et découvrir alors un littoral plus accidenté et sinueux, la route longeant le Pacifique en corniche. A la sortie de chaque courbe se dessine un nouveau paysage saisissant. On passe des cocoteraies aux bananiers, dans une alternance de panoramas maritimes et tropicaux, le tout dans des couleurs magnifiques. Bientôt, la vue sur la presqu’île annonce la mi-course et le virage retour à Taravao, puisque la Ronde Tahitienne a pour particularité de revenir sur ses pas. Mais c’est tellement beau qu’on reprend volontiers un tour pour rentrer par la même route… que l’on redécouvre au demeurant sous un angle nouveau.
Commence alors le chassé-croisé entre les concurrents de tête et ceux qui évoluent dans les autres paquets disséminés sur un coup d’accélérateur du peloton avant le virage de Taravao, que le vent semble avoir pris avec les coureurs. Pas de quoi déstabiliser Samuel Layzell, l’Australien tenant du titre qui s’extirpe du paquet en deux temps pour franchir seul le Tahara’a et rentrer victorieusement dans le vélodrome de Pirae, où se conclut la course à la manière de Paris-Roubaix, et où il est acclamé par les participants des autres circuits ayant pris place dans les tribunes. Le jeune homme, grand favori, a eu chaud. Il est tombé au milieu du paquet avant la mi-course, la faute à un chien hasardeux, et s’est amoché l’épaule, le coude et le genou gauches. Il faut souligner le fair-play du peloton, qui s’est arrêté tout entier pour attendre son invité australien. Un bel esprit cyclosportif dans la tendance de la Ronde Tahitienne.
Côté sécurité, l’avantage d’une route unique, c’est qu’il n’y a pas de carrefours à garder ! La gendarmerie ouvre la route, les bénévoles à moto la sécurisent, chaque paquet bénéficiant de son ange gardien. A l’arrivée au cœur du vélodrome, avec vue sur la montagne, une copieuse salade de fruits permet de reprendre des forces pendant qu’est orchestrée rapidement la cérémonie de remise des prix au rythme du tamouré que les différents lauréats récompensés sont invités à danser avec les plus belles miss de Tahiti !
Vraiment, il est extraordinaire de voir ce qu’un club comme le VC Tahiti, trente licenciés, est capable de faire pour le cyclisme en Polynésie française. Certes, le voyage jusque dans le Pacifique sud est long, une vingtaine d’heures depuis Paris, mais rouler à Tahiti demeure une expérience inoubliable. Un voyage extraordinaire qui mêle tous les plaisirs. A l’évidence, le beau succès naissant de la Ronde Tahitienne n’en est qu’à ses prémices.
Classement 110 km :
1. Samuel Layzell en 2h40’29 »
2. Laurent Le Goff (AS Pirae) en 2h40’42 »
3. Moana Taruoura (AS Arue) en 2h40’42 »
4. Torea Vernaudon (AS Venus) en 2h40’44 »
5. Opeta Vernaudon (AS Venus) en 2h40’49 »
6. Gilles Chauveau (AS Pirae) en 2h40’53 »
7. Frédéric Tete (AS Pirae) en 2h41’07 »
8. Tuarii Teuira (Papeete Cycling) en 2h41’16 »
9. Mike Cowan (AS Venus) en 2h41’24 »
10. Guillaume Blum (VC Tahiti) en 2h41’28 »
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22 et 1ère Dame. Poe Van Bastolaer (AS Pirae) en 2h49’46 »
Classement 55 km :
1. Yoann Hotellier (Kona Tri) en 1h17’24 »
2. Jean-Nicolas Winter (Marara Tri) en 1h18’08 »
3. Carlquist Manate (XTR) en 1h18’08 »
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38 et 1ère Dame. Laurence Costa (Marara Tri) en 1h24’22 »