Ruari, tu annonces 26 857 kilomètres en 2018, tu roules autant qu’un pro, comment fais-tu ?
– Ne le dites à ma copine ! En effet on a ce chiffre grâce à Strava, mais je crois que c’est peut-être légèrement exagéré à cause des activités en double et le home-trainer. Mais oui, j’ai fait certainement plus de 20000km l’année dernière puisque j’ai eu de la chance d’avoir la flexibilité avec mon emploi. Bien que je travaille à plein temps, je pouvais me gérer les heures afin de profiter de l’été magnifique en 2018 !
© Ruari Grant
Quel est ton profil, tu es venu au vélo comment ? Par quels autres sports (si) es-tu passé auparavant ?
– À l’adolescence je jouais au tennis principalement; j’aimais aussi le cricket (naturellement, je suis anglais !), mais le tennis était ma passion avant tout. Le cyclisme est devenu une part de ma vie encore à l’université. Je l’ai découvert il y a 7 années quand un ami me l’a introduit et de la ma personnalité accro a pris le contrôle.
Dirais-tu que tu fais partie des newcomers, venus au vélo par les succès de Sky ?
– Non, pas du tout. Tant que je suis de cette génération, c’était les courses professionnelles, et les batailles spécifiques en montagne (Contador/Schleck etc.) qui m’ont inspiré. Pourtant il est bien clair que les succès de Sky ont transformé le statut du cyclisme au Royaume Uni.
Petit, quels étaient les coureurs, les images, les événements dont tu rêvais ?
– Quand j’étais enfant nous avions un poster de Miguel Indurain affiché à la maison, mais je ne me souviens de rien côté sport de celle génération là. Lorsque j’ai commencé le cyclisme, j’appréciais les exploits agressifs de Contador et Nibali, ainsi que Cancellara dans les classiques.
© Ruari Grant
Vu d’Angleterre, comment analyses-tu le succès du Cyclosport chez vous et la déferlante sur les événements majeurs du Cyclosport Européen ?
– On a vu dans les années récentes une vraie révolution cycliste en Angleterre. Je dirais que ce sport s’est maintenant établi, et les événements cyclosport sont par conséquent énormément populaires. La différence majeure par rapport aux événements européens est qu’ici, on ne se bat pas – on participe ; c’est à dire que les cyclosportifs et les courses sont séparés. D’ailleurs le terrain dicte évidemment les parcours : chez moi on a pas mal de belles régions et paysages spectaculaires comme le Peak District, Lake District et Yorkshire, mais on trouve les montagnes connues en France et en Italie, donc pour se battre sur les mêmes parcours que les pros, les cyclistes anglais continueront toujours d’aller à l’étranger. Tout en supposant que nous pourrons nous échapper de ce pays après le Brexit…
Selon toi, est-ce que ça va durer, tenant compte que Sky va arrêter l’équipe donc sans doute son investissement sur le terrain ?
– Ca va être intéressant. Selon moi, Sky a contribué énormément, et maintenant le cyclisme a transcendé cette équipe, donc même si team Sky ne trouve pas un nouveau partenaire du même niveau, le futur du sport est probablement sûr. L’évolution significative de laquelle je suis témoin est la croissance du cyclocross.
En France, il est de bon ton de critiquer Sky au vu des performances, que peux-tu dire sur le travail de terrain qui a été fait depuis plus de 10 ans maintenant ?
– L’équipe a changé le cyclisme, avec un professionnalisme augmenté, avec tellement de soin apporté à tous les petits détails, et évidemment un budget vaste (35 millions d’euros). Ainsi Sky est l’équipe la plus victorieuse de cette période et malheureusement avec l’histoire de dopage, et la méfiance générale du public vis-a-vis de sa domination, il y a une atmosphère de suspicion.
Tu es très performant en Cyclosportives, victoire sur la HR Ventoux, pourquoi n’as-tu pas percé au plus haut niveau ?
– Je n’ai jamais essayé de réussir au niveau professionnel. Je ne prends le cyclisme au sérieux que depuis 3 ans, et étant passé de mes études directement à un travail à plein temps, je n’ai jamais eu cette option !
© Ruari Grant
L’Angleterre permet-elle de progresser vers le très haut niveau ou faut-il obligatoirement venir sur le continent pour un jeune Britannique ?
– Le programme national avec l’académie est évidemment très efficace – Thomas, Wiggins, Cavendish sont tous produits de ce système. Mais pour les autres jeunes – la plupart, il y a sans doute des avantages d’aller à l’étranger, surtout pour les grimpeurs, étant donné qu’il n’existe pas de courses montagneuses ici. Cela dit, le terrain de jeu, ici pour les rouleurs est bien plus fort, et il est tout à fait possible de progresser à travers les chronos et les courses nationales.
Quel sera ton programme 2019 ?
– Cette saison je vais prendre les choses comme elles viennent. Je n’ai pas d’équipe alors pas de responsabilité et ayant eu plus de succès l’an passé que je m’y suis attendu avec les Haute Route, la Marmotte Pyrénées et la granfondo Gavia Mortirolo, donc je peux me relaxer un peu. Le printemps je ferai des courses en Angleterre, ensuite la Marmotte, j’aimerais gagner une troisième Haute Route consécutive, et fin de saison, peut-être le Taïwan KOM ou le championnat britannique de Hill Climb.
Quel est, quels sont les cols que tu aimerais découvrir ? Ceux que tu redoutes le plus ?
– Je ne connais pas les grands cols en Espagne, donc grimper l’Angliru serait cool ; ailleurs, j’ai vécu quatre années en Ecosse mais je ne suis jamais allé à Bealach-na-ba – on dit que c’est le meilleur col dans le Royaume Uni, mais c’est plutôt inaccessible.
© Ruari Grant
Dernière question : la Sky peut-elle faire le hat trick sur les grands Tours pour sa dernière année ?
– Non. Avec un peu de chance tous les coureurs Sky s’affronteront pour un nouveau contrat alors les courses seront moins contrôlées !