Le mot de la journée est incroyable. Incroyable d’être parvenu à bout de cette journée. Incroyable de franchir ces cols mythiques, que l’on voit à la télé en juillet et qui nous paraissent impossibles à gravir si l’on n’est pas un champion du Tour de France. Incroyable de faire du vélo dans un décor majestueux qui donne des frissons quand on y pense. Incroyable d’être sur des routes marquées par l’histoire de la petite reine. Incroyable de rouler sur des endroits qui nous rappellent des souvenirs de jeunesse. Clara est passée aujourd’hui par ce sentiment en enchaînant les fameux cols de l’Izoard et du Galibier par le Lautaret. Un jour magique comme il n’en existe que trop rarement.
Les deux montées ont un profil similaire. Une trentaine de kilomètres, des pourcentages très abordables sur le début et une pente finale plus raide tournant autour des 8-9 %. Et des sommets en très haute altitude qui rendent ces cols très intenses. La journée commence pourtant dans le frais et sous un ciel couvert. Mais Clara est confiante, elle possède un ami expert dans la météo locale qui lui a assuré, à raison, qu’elle ne recevrait pas une goutte de pluie aujourd’hui. Elle retrouve rapidement des gens avec qui elle a roulé les deux jours précédents et entame, en quelque sorte protégée, l’ascension de l’Izoard.
Rapidement rattrapée par un concurrent français avec qui elle a bien sympathisé, ils vont grimper au sommet ensemble mais surtout faire la descente à bloc. Autant « casses-cou » l’un que l’autre, ils dévalent les pentes à pleine vitesse, doublant à la hâte de nombreux concurrents. Pour retrouver d’autres copains en bas et faire la partie plane menant au bas du Lautaret en groupe. Mais Clara va distancer tout le monde avant même les premières pentes ascendantes. Car curieusement, les coureurs se sont retrouvés au sein d’embouteillages dans un village de la vallée. Alors Clara a cru être de retour à son slalom quotidien aux heures de pointe à Paris. Elle zigzague à merveille entre les voitures et les passants avant de se faire à nouveau rejoindre après quelques kilomètres du col.
La suite était plus compliquée bien que le plaisir soit de la partie. Toujours avec son ami français, ils vont progresser à leur rythme malgré la défaillance du cardiofréquencemètre de Clara. Ne pouvant plus s’occuper l’esprit avec les chiffres qu’il lui envoyait, voyant la fringale arrivée malgré une alimentation presque excessive sur cette route menant au Galibier, il ne lui restait plus qu’une solution. Parler, parler et parler pour ne plus penser à ses jambes qui la tiraillent. Parler de tout, des vaches, des paysages, ou de choses moins sensées tant l’altitude semblait lui monter à la tête. Enfin arrive le sommet.
Moment d’émotion pour Clara, où des souvenirs d’enfance et ses frères montant en vélo sur cette même route ressurgissent. Elle qui était en admiration devant eux quand ils lui narraient leurs exploits, là voilà tout en haut d’un des cols les plus impressionnants. Un beau chemin parcouru, quatre ans après avoir commencé le vélo. Et jamais elle n’aurait pu imaginer que ce sport lui procure des moments pareils, à en être émue aux larmes.