Un énorme défi, c’est ce que propose Extra Sports en relançant Bordeaux-Paris, la course légendaire née en 1891 et stoppée en 1988 pour les pros, et qui, pour les cyclos, avait été abandonnée elle aussi. Les 30 et 31 mai prochains, c’est un superbe challenge qu’auront à relever les avaleurs de bitume : 610 kilomètres et un peu plus de 4000 mètres de dénivellation d’une traite. Départ à 8 heures du matin, place des Quinconces et arrivée au vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines, au petit matin pour les plus rapides, au grand soleil pour la plupart.
Quelle belle idée de relancer un tel mythe : rejoindre la capitale mondiale du vin et la capitale de la France, que ce soit pour les coureurs qui seront partagés entre les cyclos et les ultras selon qu’ils choisissent la formule moins ou plus de 32 heures (les meilleurs devraient carburer autour de 35/36 km/h) ou les organisateurs. À l’heure où les cyclos traditionnelles « tournent en rond » avec des parcours toujours un peu plus courts, et où on passe trois fois au même endroit, les beaux défis sont remis au goût du jour. Que ce soit à travers des cyclos par étapes, ou des épreuves comme Bordeaux-Paris. Quelque chose nous dit que, les organisations professionnelles arrivant dans le paysage, la liste va s’allonger et c’est tant mieux.
1000 coureurs sont attendus pour cette première version de Bordeaux-Paris, version Extra, moitié Français, moitié venant des pays voisins ou autres. Pas besoin de ranger les vélos en quinconce, la place est grande, la plus grande de France et le départ sera assurément festif. On longe la Garonne et on sort vite de Bordeaux, direction Libourne, Pomerol, Lalande de Pomerol. Les vignobles, les routes sont larges, le macadam rend bien, les jambes légères, ça va pétroler très fort sur ces 110 premiers kilomètres.
Nous avons eu la chance de reconnaître ce parcours avec de super rouleurs, au-delà d’être de super gars et les meilleurs vont donner le tempo. Derrière eux vont s’accrocher des grappes de coureurs qui vont peut-être un peu trop s’entamer pour la suite. La particularité de ce parcours qui traverse la Gironde, la Dordogne, les Charentes, le Loiret, la Beauce puis les Yvelines est qu’on peut le découper en quatre étapes.
Première étape plate donc. Les 4000 mètres de dénivelé ne sont pas là. On le disait, les jambes, l’envie, l’enthousiasme d’être sur la première d’une renaissance, tout ça va contribuer à alléger le coup de pédale, même si avant le Poitou, on passe à l’âne mort ; même avec les éclairages de rigueur les vélos et les coureurs seront en mode légèreté.
C’est la deuxième étape qui va commencer à marquer les esprits, les coeurs et les jambes. Après 110 kilomètres, on attaque les Charentes et tout de suite, des côtes jamais très raides, mais usantes. L’écrémage se fera entre ceux qui sont très costauds et ceux qui ont fait le maximum pour s’accrocher. Montbron, Persac, Saint-Savin, puis Angle-sur-l’Anglin, un des plus beaux villages de France, on est dans des passages vallonnés, toujours en prise. Le vent est toujours d’ouest. Les villages sont vraiment chouettes, bucoliques, avec la rivière à truites, bref les ravitos et postes de dépannage, massage, repos (placés tous les 90 kilomètres) seront appréciés ne serait-ce que par l’environnement et le décor. Côté macadam, la plupart du temps on est sur de bonnes routes, campagnardes, pas très larges, pas trop fréquentées par les véhicules. Qui plus est, les voitures d’assistance seront interdites. Super idée, elles seront là où les postes organisations sont placés.
Mine de rien, cette partie va être usante, très usante pour les organismes et ça sera vraiment la deuxième lame, celle qui coupe les jambes, encore un peu plus. Entre les kilomètres 110 et 400, c’est le programme varié que chacun devra gérer au mieux, on est loin d’Angoulême, donc plus question de coincer la bulle. D’ailleurs, les organisateurs ont le bon goût de ne pas traverser de grosses villes. Des villages, des grosses bourgades oui, mais sans plus. Avec le fléchage au sol, avec des flèches et les signaleurs aux principaux carrefours, sans compter les puces et les balises GPS, personne ne devrait sortir du parcours et faire du rab, il ne manquerait plus que ça !
La dernière étape, celle où se sont joués beaucoup de Bordeaux-Paris chez les pros, c’est la vallée de Chevreuse, Rambouillet, les forêts giboyeuses, et un très bel environnement pour faire du vélo, sans trop de voitures là aussi. C’est la quatrième étape, celle qui pourra faire la décision entre les tout meilleurs et celle où on comptera les kilomètres pour la grande majorité de ceux qui veulent le label finisher tant mérité et la fête à l’arrivée au vélodrome de Saint-Quentin, nouveau siège de la FFC.
610 kilomètres, 4000 mètres de dénivellation, des dizaines de villages à découvrir, des litres de sueur, 100 motards, des dizaines de signaleurs qui vont vraiment avoir du mérite, car l’amplitude sur les derniers carrefours va être large, très large, c’est le moins qu’on puisse dire. Et puis de ce côté-là, l’organisateur de la Scott-1000 bosses (qui va devenir 1000 Beauce pour l’occasion) nous a habitués à du très bon, du très haut niveau. Donc sur Bordeaux-Paris, là non plus, on ne devrait pas être déçus tant l’accent est mis sur la sécurité, l’assistance, la qualité. On est avec des coureurs-organisateurs ou l’inverse et ça se sent.
En conclusion, on dira « alors, on vient à combien sur un tel Everest, un tel défi qui se prépare bien 11 mois à l’avance, comme c’est le cas à partir de maintenant ». Tout dépend du prix, on nous annonce entre 250 et 350 euros selon les dates d’inscription et les formules. Trop cher pour réaction spontanée chez beaucoup, à creuser pour mettre en face les coûts engendrés par une telle infrastructure (sans compter les cheveux blancs liés aux soucis inhérents à l’organisation d’un tel « chantier »). Malgré tout, on peut être à peu près certains de deux choses sur cette première édition qui risque d’être déficitaire comme souvent d’une part, et d’autre part il faut féliciter et encourager des organisateurs qui se lancent encore dans de tels défis. Quand on dit organisateurs, on pense aussi aux coureurs qui vont se lancer dans l’aventure. Bon courage et bonne préparation.