Le temps d’une matinée, les senteurs de fleur de tiaré et autres parfums exotiques que l’on prête aux îles de la Polynésie française s’effacent. Dans les allées du parc Bougainville, sous les arbres majestueux qui offrent un ombrage très apprécié le long du front de mer de Papeete, se diffuse une odeur camphrée. Un demi-millier de cyclistes a rendez-vous avec ce qui est devenu en l’espace de cinq éditions la grande classique du cyclisme polynésien et la destination la plus enchanteresse du calendrier cyclosportif français : la Ronde Tahitienne.
Edition après édition, la merveilleuse épreuve du bout du monde portée par le Vélo Club de Tahiti continue à prendre du galon. Et multiplie les labels, elle qui figure aux calendriers UCI et FFC et porte haut, avec le label Green Cycling, des valeurs éco-citoyennes qui lui sont si précieuses dans cet environnement dont la splendeur ne saurait faire oublier la fragilité. La voilà désormais intégrée au Grand Trophée (dont elle bénéficie de l’expertise en matière de chronométrage et d’animation), gage d’une manifestation de qualité qui tire sa force de ses paysages empreints d’exotisme.
Ce n’est pas la difficulté topographique que l’on vient chercher sur la route unique du littoral tahitien, qui ceinture une île dont le cœur sauvage et montagneux est jonché de pics vertigineux et de profondes vallées verdoyantes. Mais des paysages au caractère authentique, préservés, où il reste possible d’imaginer la vision qui s’offrit aux navigateurs (James Cook, Louis-Antoine de Bougainville…) dont les vaisseaux mouillèrent naguère dans les baies de la côte est. C’est précisément à l’assaut de ce versant que part la Ronde Tahitienne, dont le grand parcours propose un aller-retour de 110 kilomètres entre la capitale Papeete et Taravao, la commune située à l’opposé, et qui fait le lien entre Tahiti et sa presqu’île.
Là, le long de la côte sauvage balayée par les alizés et battue par les vagues du Pacifique dont on ressent les embruns jusque sur le vélo, il est permis de rouler sous les cocotiers et les bananiers. Dans un décor autant sublimé par le soleil qui tanne la peau que par les pluies tropicales qui entretiennent la pousse d’une végétation luxuriante – les deux seront allés de pair dimanche pour les concurrents du grand parcours. D’un côté le bleu profond de l’océan à perte de vue, les plages de sable noir, les baies apprivoisées par les surfeurs. De l’autre les montagnes sauvages drapées de nuages desquelles s’échappent de spectaculaires cascades, les vallées encaissées, et les falaises abruptes à la flore dense qui plongent dans la mer.
L’esthétisme naturel est au rendez-vous d’une cyclosportive pas comme les autres, où tout respire le folklore avec la mise en valeur de la culture polynésienne. Depuis le front de mer de Papeete, où l’épeuve a eu la belle inspiration de migrer cette année au détriment du vélodrome de Pirae, histoire de toucher un public toujours plus large, le peloton s’élance au rythme du tamouré et de l’inimitable déhanché des vahinés. Coupé le ruban végétal, après la bénédiction du pasteur, il part en direction du Tahara’a, la colline qui s’élève à la sortie de la ville (mais que les plus costauds franchissent sans mal sur la plaque), au sommet de laquelle son passage est salué par des jets de fleurs. Une tradition polynésienne entretenue ici par les enfants handicapés de la FRAT, l’association soutenue cette année par la Ronde.
L’épreuve aura intégré ces enfants de différentes façons en permettant notamment aux plus valides d’ouvrir la route aux 517 cyclosportifs en parcourant les premiers mètres accompagnés de Henri Sannier, son ambassadeur, et de Laurent Jalabert, son parrain 2016 venu séjourner pour la première fois en Polynésie française. Quand l’ensemble du peloton de la Ronde Tahitienne porte les couleurs de l’un des six maillots offerts à l’inscription, eux auront défendu celles d’une tenue collector dont la vente permettra de financer l’achat de matériel sportif adapté au handicap des enfants.
Et ce maillot, Laurent Jalabert l’aura mouillé comme il faut, lui qui le temps d’une matinée se sera laissé reprendre au jeu de la « compétition » en allant chercher une 4ème place, la 1ère dans sa catégorie, derrière les Néo-Zélandais Liam Aitcheson (1er) et Fraser Gough (3ème), pros l’un et l’autre chez Avanti Isowhey Sport, et le champion du monde amateur XTerra Christophe Bétard, déjà 2ème huit jours plus tôt du XTerra Tahiti. Sur le podium, après la copieuse et savoureuse salade de fruits frais servie à l’arrivée, les différents lauréats auront été récompensés de trophées et médailles en nacre de Tahiti, et invités selon la coutume à danser le tamouré accompagnés des plus belles filles de l’île !
L’accueil polynésien n’est pas un mythe, et les 61 cyclos étrangers ayant rejoint Tahiti auront pu le vérifier par eux-mêmes tout au long d’une merveilleuse semaine. Car la valeur ajoutée de la Ronde Tahitienne reste le circuit touristique monté par le Vélo Club de Tahiti à l’attention des participants venus de loin – pour une semaine au moins – et de leurs accompagnants qu’il est toujours plus facile de convaincre sur une telle destination quand elle est doublée d’un séjour garantissant l’émerveillement.
Quel que soit l’océan traversé pour gagner Tahiti et ses îles, les cyclosportifs en provenance de Nouvelle-Zélande, du Chili, des Etats-Unis et bien sûr de France métropolitaine auront été pilotés par les licenciés du VCT à la découverte du Fenua. Un séjour aux 101 merveilles parfaitement rodé incluant des sorties cyclistes dans la roue de Laurent Jalabert (reconnaissance d’une partie du tracé de la Ronde Tahitienne et tour de la splendide île de Moorea) et des activités pour tous : jet-ski sur le lagon de Moorea aux multiples tons de bleu, visite du cœur de l’île en quad à travers les champs d’ananas et la vallée d’Opunohu, balade musicale en pirogue au coucher du soleil escortée par les dauphins, pique-nique sur un motu avec initiation aux coutumes polynésiennes, snorkeling pour explorer les coraux et l’abondante faune marine, dîners aux saveurs locales et spectacle de danses polynésiennes, et pour point d’orgue baignade au milieu des raies et des requins à pointe noire !
Le tout dans la convivialité entre cyclistes des quatre coins du monde partageant le goût de l’effort et de la découverte. Plus que jamais, la Ronde Tahitienne confirme son rang de manifestation sportive incontournable en Polynésie et, pour les cyclos métropolitains, d’événement à faire au moins une fois dans sa vie.
Classement 110 km :
1. Liam Aitcheson (Avanti Isowhey Sport) en 2h32’12 »
2. Christophe Bétard (VC Spinalien) en 2h33’10 »
3. Fraser Gough (Avanti Isowhey Sport) en 2h34’05 »
4. Laurent Jalabert en 2h36’18 »
5. Laurent Le Goff (AS Pirae) en 2h37’26 »
6. Alain Maestrati (AS Arue) en 2h37’27 »
7. Thomas Loreille (VC Tahiti) en 2h37’28 »
8. Raimana Mataoa (AS Venus) en 2h43’18 »
9. Patrick Costeux (AS Arue) en 2h43’18 »
10. Teihotaata Terii (AS Arue) en 2h43’19 »
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1ère Dame. Temehau Maihuti (AS Venus) en 3h00’51 »
Classement 55 km :
1. Patrice Bourgon (VC Tahiti) en 1h21’15 »
2. Kenny Chane (NL) en 1h21’15 »
3. Lois Vasapoli (RTT) en 1h21’15 »
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1ère Dame. Kylie Vernaudon (Papeete Cycling) en 1h32’53 »