Benoît Rivals, neuf mois après le formidable succès de la Ronde Tahitienne, 428 participants pour sa 3ème édition, quelle dimension a pris en Polynésie l’événement dont vous êtes l’organisateur ?
En l’espace de quatre ans nous avons franchi un grand nombre d’échelons. Sur le plan des participants puisque nous sommes passés de 253 à 428 en trois éditions, mais aussi nous figurons désormais au calendrier UCI du cyclisme pour tous car nous proposons un package touristique afin de recevoir au mieux les participants étrangers. Grâce à cette inscription au plus haut niveau, nous venons de nous voir intégrer le calendrier des grandes manifestations sportives de la Polynésie Française. Aujourd’hui le ministère des sports croit en notre épreuve et nous soutient, il en est de même pour Tahiti Tourisme, l’office du tourisme polynésien, qui nous aide énormément pour promouvoir notre épreuve. Notre compagnie aérienne polynésienne Air Tahiti Nui est également très proche de nous et suit de très près l’évolution de notre épreuve en nous soutenant de très belle manière. La compagnie au tiare, qui est la fleur emblématique, offre notamment des conditions très intéressantes pour tous ceux qui souhaiteraient se rendre à Tahiti pour l’occasion. A ceux déjà cités se sont joints certains sponsors privés qui nous ont sollicités car ils voulaient communiquer via notre épreuve, et de cela nous sommes particulièrement fiers car il faut bien avouer que pour un organisateur c’est relativement rare.
L’événement a notamment vocation à promouvoir la pratique du cyclisme auprès des Tahitiens. Sa belle réussite a-t-elle eu des répercussions sur le nombre de pratiquants ?
La Ronde Tahitienne est la première des cyclosportives à Tahiti, et vu l’engouement suscité par bon nombre de pratiquants, d’autres épreuves similaires avec une portée plus locale sont en train de voir le jour, ce qui est important pour le développement du cyclisme pour tous et du sport en général. Nous avons énormément de sportifs « touche à tout » en Polynésie et le cyclisme reste une bonne préparation pour eux. Je pense surtout aux rameurs qui pratiquent le va’a (pirogue à balancier), le sport numéro un ici. La preuve : un club cycliste a vu le jour dernièrement sur la presqu’île de Tahiti, composé en partie par des rameurs. Ces sportifs sont très friands de ce type d’épreuves de masse et désormais très assidus au cyclisme, c’est vraiment tout bon pour notre sport. Et il faut avouer que le dimanche matin les groupes de cyclos sont de plus en plus importants. Je pense que notre épreuve incite à cette pratique, preuve en est tous les maillots des Rondes Tahitiennes précédentes portés par ces pratiquants, c’est une réelle fierté pour nous.
L’édition 2015 est en pleine préparation, avec son lot de nouveautés et d’améliorations. A 101 jours de la Ronde, quelles en seront les principales ?
Une des nouveautés cette année est l’offre d’un panel de six maillots à choisir pour chaque participant, dont un maillot spécial « Vahiné » (féminine). Les maillots offerts chaque année ont fait le succès de notre épreuve et leur design est toujours très local, certains souhaitent déjà acquérir toute la collection ! Nous réservons également une petite surprise aux cyclos, notamment à tous ceux qui franchiront le col du Tahara’a, mais pour l’instant je ne peux pas en dire plus, je suis certain que cette initiative aura un bel impact sur les participants. Enfin nous allons équiper chaque concurrent de puces électroniques pour parfaire les résultats. Ce sera une première pour le cyclisme polynésien avec un immense écran à l’arrivée pour que chacun voie son classement quasi instantanément. C’est une avancée importante que nous souhaitions offrir à chaque coureur. La couverture médiatique internationale sera également importante avec, outre Vélo 101, la présence d’un magazine cycliste néo-zélandais et un magazine métropolitain.
Le parrain de la Ronde, Henri Sannier, revêtira lui un maillot collector. Et pas simplement dans le but de l’identifier au sein du peloton…
Effectivement, nous avons dessiné un maillot collector aux couleurs du tourisme polynésien où on retrouve nos partenaires privilégiés que sont Air Tahiti Nui et Tahiti Tourisme. Cette tenue sera portée par Henri Sannier qui, plus qu’un parrain pour nous, est un véritable ambassadeur pour notre épreuve et notre cyclisme. Ces tenues seront mises en vente le jour de l’épreuve avec un but bien particulier puisque les bénéfices engendrés nous permettront de parrainer des enfants polynésiens pour participer à la Saga, un centre de vacances sportives pour les enfants de quartiers défavorisés. Nous menons cette action en collaboration avec le club Kiwanis qui mettra également sur pied tout un peloton d’Harley Davidson sur lesquelles chaque enfant pourra monter, et ainsi être intégré à la course et participer à la fête du vélo. Quand j’ai évoqué cette idée avec Henri Sannier il a été tout de suite partant et très enthousiaste de pouvoir représenter cette action.
Vous l’évoquiez, la Ronde Tahitienne compte cette année parmi les 22 épreuves françaises du calendrier UCI. Quels sont les critères qui vous ont permis d’y accéder et qu’en attendez-vous ?
A n’en pas douter, le package touristique mis en place a été un plus indéniable pour pouvoir intégrer ce calendrier. Je pense aussi que l’application avec laquelle nous organisons notre épreuve et la faisons progresser chaque année a joué en notre faveur. Nous sommes particulièrement fiers de cette distinction qui met en valeur Tahiti au milieu des plus grandes cyclos du monde et nous nous appliquerons à ce que le retentissement soit à la hauteur des attentes de l’UCI. En 2013, quand nous avons obtenu le label Eco Cyclo, son président avait qualifié la Ronde Tahitienne comme exemple du Pacifique, ça a été une phrase importante de reconnaissance du travail effectué. Je pense que le travail écocitoyen est aussi un point important de la qualité de notre épreuve et qu’il a joué un rôle majeur pour intégrer le calendrier UCI.
Les parcours, eux, restent inchangés. Qu’est-ce qui en fera leur attrait le dimanche 31 mai ?
Les circuits sont réellement féériques. Une fois quitté la zone urbaine qui représente quelques kilomètres à peine, nous sommes en permanence entre mer et montagne. Nous escaladons la redoutable colline du Tahara’a qui surplombe la baie de Matavai avec un magnifique point de vue. Ce petit col effectuera une première sélection, ensuite il faudra lutter contre le vent du sud qu’on appelle Mara’amu et qui peut parfois être relativement fort à cette saison. Sur cette côte escarpée il y a quelques lignes droites où on est tout près du lagon. C’est la cas à Papenoo, qui est le refuge des surfeurs, ou encore vers Tiarei où il y a une magnifique plage de sable noir. Nous traversons ensuite la rivière de la Vaiha avec de très belles cascades et une côte qui fera mal aux jambes à certains. Le retour se fait sur la même route, mais cette fois vent de dos, et ça peut rouler vraiment très fort. Le passage du col du Tahara’a à 8 kilomètres de l’arrivée est très dur de ce côté avec des passages à 15 %. Il décide souvent du vainqueur et peut rester dans les mémoires de certains pendant longtemps. Enfin l’arrivée sur le vélodrome est majestueuse et synonyme de délivrance avec en toile de fond les belles montagnes de Tahiti.
Actions sociales, message écocitoyen, promotion touristique, la Ronde Tahitienne se veut finalement plus qu’un simple rendez-vous sportif ?
C’est une épreuve complète que nous souhaitons mettre en place. C’est important pour le développement de notre sport d’avoir un grand rendez-vous comme celui-ci, il faut qu’il serve aussi à faire passer des messages importants comme l’écocitoyenneté. Chaque année nous mettons en place une action particulière, elle peut être en collaboration avec l’éducation, cette année nous avons opté pour une action sociale avec le club Kiwanis et la Saga. La promotion touristique doit à mon sens figurer au programme de chaque grande épreuve. Tahiti est un nom magique qui fait rêver une partie de la planète, et chaque citoyen polynésien doit contribuer à faire perdurer cette image. Pour le monde cycliste, nous n’avons pas de lieux mythiques comme le Tourmalet ou l’Alpe d’Huez, mais pédaler en bordure de lagon dans cette végétation luxuriante aux parfums si exotiques est quelque chose d’inoubliable.
En amont de la cyclo, le VC Tahiti a mis sur pied un séjour touristique à l’attention des cyclosportifs et de leurs accompagnants. Quels seront les points forts du séjour ?
Avec ce package touristique on souhaite vraiment que le visiteur garde un excellent souvenir de son séjour tout en alliant sport et tourisme. Cette année, nous amènerons tous les coureurs étrangers à la découverte de Moorea. Moorea est une île magnifique à seulement trente minutes par ferry de Tahiti. Elle possède un charme particulier, un rythme et un cadre préservé qui en font l’une des destinations de week-end privilégiées. On y passera trois jours avec un programme très alléchant. On débutera par la découverte de l’île en quad, c’est très fun et ça permet de visiter l’intérieur de l’île par des sentiers pittoresques qui débouchent parfois sur des points de vue à couper le souffle. On consacrera une journée entière à une balade en pirogue sur le lagon où tout le monde pourra nager au milieu des raies et autres poissons multicolores. Parfois se joignent à la baignade des requins inoffensifs, sensations garanties ! Nous nous restaurerons sur un îlot privé avec un pique-nique aux couleurs locales. Enfin on proposera une découverte de l’île à vélo avec un arrêt à l’usine Rotui où une dégustation de produits locaux nous sera servie. La soirée sera consacrée à un spectacle de danse traditionnelle, qui est toujours un grand moment.
Plusieurs cyclosportifs étrangers, et notamment français, avaient opté l’an passé pour cette formule. Quels ont été leurs retours ?
Ils ont été excellents car nous avons été très proches d’eux. Je me rappelle que je chambrais gentiment un coureur venu de Bourgogne et qui avait participé à une cyclo outre-mer il y a quelques années. A son retour en métropole il m’a écrit pour me dire que la Ronde Tahitienne était de loin la plus belle. Le vainqueur australien Samuel Layzell a posté sur son Facebook un commentaire très élogieux en disant que c’était l’épreuve à faire absolument une fois dans sa vie. Tous ces commentaires nous motivent à tenter de faire toujours mieux.
Depuis sa création en 2010, l’événement prend chaque année plus d’ampleur. Quelle est l’ambition à terme de la Ronde Tahitienne ?
Nous n’avons aucune ambition particulière, si ce n’est que la Ronde Tahitienne soit présente longtemps dans le paysage cycliste polynésien pour le bonheur de tous les cyclistes polynésiens. Nous avons en revanche un devoir de réussite pour le respect de tous les partenaires qui nous soutiennent. Et de nous voir chaque année gravir les échelons les rend forcément enthousiastes. Enfin, le cyclisme, grâce à cette épreuve, permet de parler de notre beau pays un peu partout dans le monde. Nous avons eu un article sur un magazine cycliste chinois, et un habitant de Hong Kong m’a demandé des renseignements. Je lui ai envoyé une vidéo de notre package touristique où on nous voit plonger au milieu de raies et de requins pointes noires, il ne voulait pas me croire. Alors je lui ai dit : « viens et tu verras ». Il vient de réserver son billet d’avion avec son épouse et sera parmi nous au mois de mai. Alors peut-être notre plus grande ambition est celle-là, pouvoir raconter des histoires de cyclistes venant à la découverte des beautés de Tahiti.