Jean-Paul, chez Swiss Side, toutes vos mesures s’effectuent avec un vent à 45 km/h et à une vitesse de 45 km/h. Quelle en est l’explication scientifique ?
A 45 km/h, les forces sont plus élevées, ce qui nous permet de mieux mesurer des différences en comparant deux configurations de roues. Bien sûr, nous effectuons des essais à vitesse moins élevée, pour être certains que des effets de vitesse n’aient pas d’influence sur la qualité aérodynamique de la roue.
L’aérodynamique ne doit pas être réservée qu’aux pros. Au contraire, moins le coureur est performant, plus il a intérêt à être aérodynamique.
Tout à fait, et ce pour deux raisons. Premièrement, un coureur plus lent a besoin de plus de temps pour boucler un même parcours et bénéficiera logiquement plus longtemps des effets aérodynamiques. Le deuxième élément concerne la traînée. Plus la vitesse est réduite, plus l’angle de vent est élevé. On peut donc plus facilement diminuer la traînée sur des vitesses moins élevées.
Dans les mesures de vent latéral, vous mesurez degré par degré.
Nous mesurons jusqu’à 20 degrés. Nous ne mesurons pas au-delà parce que le flux se détache de la roue à partir de 17, 18, voire 19 degrés. Au-delà, cela ne vaut donc pas la peine de mesurer. Il faut savoir qu’un athlète subit des angles de vent de plus ou moins 15 degrés.
Recommanderiez-vous aux coureurs et coureuses les moins puissants d’avoir une hauteur de jante à l’avant inférieure à celle de la roue arrière ?
Tout à fait. Si nous avons des hauteurs de jantes différentes, c’est pour faire face aux conditions de vent. Quand il souffle plus fort, cela devient de plus en plus difficile de gérer et de contrôler une roue avant à profil haut. Il est donc plus intéressant de rouler avec des roues au profil moins élevé, surtout pour des gens plus légers ou moins expérimentés.
Vous cassez en outre un autre mythe : celui de la roue légère qui serait plus efficace.
Nous voyons effectivement que le poids n’a pas de grande influence sur le temps nécessaire pour effectuer un parcours donné. Mais aussi pour l’aspect stabilité. Avec plus de poids, la roue avant est moins influencée par les coups de vent. Pour cette raison, le coureur est moins influencé par ces conditions de vent et peut rester plus longtemps dans une position aérodynamique. Dans ces cas-là, les bénéfices sont très élevés.
Le marché de la roue a connu une évolution majeure avec l’arrivée du disque. Quelles solutions apportez-vous à ce sujet ?
Je considère qu’il s’agit d’une bonne chose. Cela permet une meilleure qualité de freinage. Il y a tout de même une pénalité aérodynamique que nous avons estimée à 2 Watts à 45 km/h. Bien sûr, il est possible de faire des intégrations sur le cadre pour essayer de réduire ces pertes.
Les jantes alvéolées prônant un effet balle de golf ont-elles un réel intérêt ?
Pour nous, la seule chose qui compte, c’est ce que nous mesurons. Nous avons établi des mesures avec des roues alvéolées et nous n’y avons pas vu d’effet positif particulier sur la roue. Ce n’est donc pas quelque chose que nous suivons de notre côté. Cela vaut aussi pour les marques qui arrivent avec des postes avant du vélo alvéolés. Cela relève du marketing pour parler ouvertement. L’aérodynamique est un facteur difficile à comprendre pour le client lambda. Ils savent néanmoins que les balles de golf fonctionnent bien avec ce profil alvéolé et ils l’associent à un bénéfice aérodynamique. Mais à la vitesse d’un cycliste, cela n’a aucune influence.