Elle est celle qui fascine les meilleurs coureurs du monde générations après générations, comment pourrait-il en être autrement auprès des cyclos de toute la planète, qui ont déferlé au nombre de 8000 sur les routes de Liège-Bastogne-Liège samedi dernier ? Vingt-quatre heures avant la 100ème édition de la Doyenne des classiques, les routes de la légende se sont en effet ouvertes aux milliers de passionnés venus goûter à l’atmosphère d’un mythe qui ne laisse personne indifférent. De toutes les versions cyclosportives ou cyclotouristes des grands monuments, Liège-Bastogne-Liège Challenge est la plus belle à tous points de vue, qu’il s’agisse de son parcours comme de son organisation, réalisée conjointement par Golazo et ASO.
On a presque envie d’écrire que LBL Challenge, c’est l’Etape du Tour sans chronomètre, tant dans sa difficulté (4800 mètres de dénivelé) que dans ce qu’il implique de légende, celle qui pousse à se lancer à l’attaque des 279 kilomètres du mythique grand parcours (167 et 85 kilomètres pour les autres circuits).
C’est dans un Liège encore endormi, les candidats au grand parcours s’élançant librement entre 6h30 et 7h30, que l’on donne les premiers coups de pédales. La fraîcheur matinale justifie le port des manchettes, mais pas pour longtemps car une belle journée s’annonce, le grand ciel bleu matinal offrant des paysages sublimes à travers le beau massif de l’Ardenne et ses vallées encaissées. On ne tarde d’ailleurs pas à s’attaquer aux premiers raidards qui, bien qu’historiquement présentés sur le retour Bastogne-Liège, se présentent en fait dès le premier tronçon. La route entre Liège et Bastogne surprend le cyclo non averti. Si une seule côte est répertoriée sur les 120 kilomètres de liaison entre les deux villes, il s’agit en fait d’une suite de montées et descentes pas très pentues mais sans interruption. Si bien qu’à Bastogne on a déjà pris plus de 2000 mètres de dénivelé…
Paradoxalement, on trouvera la partie retour plus spectaculaire mais moins exigeante (les montées sont plus raides mais des morceaux de vallée permettent de récupérer entre les ascensions), mais il faut dire qu’à ce stade de la partie la légende de Liège-Bastogne-Liège nous touche au cœur. L’enchaînement des côtes de Wanne, Stockeu et de la Haute-Levée est redoutable. L’escalade de Stockeu surtout, qui nous cloue sur place, petit braquet de rigueur dans une pente d’un kilomètre constament entre 10 et 20 %, avec plus de 180 kilomètres dans les jambes.
Mais c’est dans la Redoute que la magie de la Doyenne nous rattrappe pour de bon, sur une route qui grimpe sévèrement et que les camping-cars ont déjà prise d’assaut. Entre les barrières et sur cette chaussée bariolée de marquages, les plus nombreux en faveur de « Phil » Gilbert, qui a grandi ici, on sent alors toute la légende de Liège-Bastogne-Liège vingt-quatre heures avant le passage des champions.
Reste encore à franchir la côte des Forges et surtout la Roche-aux-Faucons, dont la fin est terrible, avant de retrouver les faubourgs de Liège pour le final qui passe par la côte de Saint-Nicolas et la montée vers Ans, en haut de laquelle est jugée l’arrivée du parcours des pros, que l’on quitte avant le fameux dernier virage – fatal dimanche à Daniel Martin – pour rejoindre la zone de départ/arrivée et récupérer la médaille de finisher et un beau pavé pour les cyclos ayant effectué le Tour des Flandres Cyclo, Paris-Roubaix Challenge et Liège-Bastogne-Liège Challenge.
Deux petits points négatifs toutefois. D’abord l’absence de vrai parking autour du complexe sportif qui accueille les opérations de départ, ce qui, à moins de venir directement à vélo, représente à la fois des préoccupations logistiques et sécuritaires. Ensuite le défaut d’arche symbolisant le départ et l’arrivée du parcours des pros. Quand on atteint le sommet de la côte de Ans, il faut se contenter d’une modeste pancarte « bravo vous avez fini » sur le bord de la route… ce qui manque franchement de symbole au bout de 280 bornes.
Mais la qualité des routes au revêtement parfait et sans la moindre circulation, le nombre de signaleurs aidant au franchissement des carrefours et participant à l’impression de sécurité qui règne d’un bout à l’autre, les ravitaillements copieux dont certains dans des lieux chargés d’histoire comme la cour de l’Abbaye de Stavelot, l’assistance Mavic aux cinq ravitaillements, la bonne ambiance entre des cyclos des quatre coins du monde, sans chronomètre pour mieux profiter des paysages (quatre côtes faisaient toutefois l’objet d’un chronométrage pour les coureurs avides de challenges), laisseront de cette expérience un souvenir impérissable.