La 17ème édition de la Serre-Che Luc Alphand s’est déroulée cette année sous le signe des duos, organisée sur deux jours, le premier réservé au parcours Val de Susa 205 kilomètres, et le dimanche 29 juin avec les deux parcours courts 109 et 85 kilomètres. Une première ou presque sur cette cyclo toujours confrontée à la concurrence d’autres cyclos de haute montagne, qui garde sa personnalité. Cette édition 2014 aura marqué les organismes et les mémoires des 310 partants sur le parcours royal, samedi matin aux aurores ou presque, 7h30.
7h30, 310 participants : bravo aux organisateurs d’avoir renoué avec des parcours cyclos dignes de ce nom ! La saison s’y prête, les coureurs ont eu le temps de s’entraîner comme il faut et les candidats sont là, la preuve. Double bon point que cette cyclo en deux jours, puisque toute l’attention était portée sur les seuls cyclos du 205 kilomètres, que ce soit la sécurité, les motos, les fléchages, et ne parlons pas de l’après-course, on y reviendra.
Duo également, côté pays. On part de France, on bascule en Italie pour la vallée et le deuxième col, puis retour en France. L’Europe se construit aussi du côté du sport, et on entend parler italien, dans les sas de départ, preuve que la Serre-Che irradie au-delà des sommets, et c’est parfait. D’autant plus que les Belges, en sont aussi. Serre-Chevalier, et les communes avoisinantes comme Saint Chaffrey et bien sûr Briançon sont de la partie côté organisation. Briançon est contourné en convoi neutralisé pour rallier le pied du col de Montgenèvre, une bonne idée. D’abord parce qu’il y en a assez après pour éviter le recours à la photo-finish et surtout à cause des travaux routiers. C’est parti pour la première difficulté du jour, Montgenèvre qui fait la frontière avec l’Italie. On est à 1326 au pied, on grimpe à 1856 mètres une bonne entrée en matière ! Il y aura un peu plus de 4200 mètres de dénivelé au total. Le bon côté, c’est la météo, fraîche au départ, mais jamais très chaude, et surtout sans pluie ou froid, c’est l’essentiel.
La redescente sur l’Italie et la vallée de Susa se fait facilement : quelques tunnels (galleria, on est en Italie), la présence de la polizia et des carabineri sur le bord des routes, l’enthousiasme des gens sur le bord des routes, pas de doute, on est dans un pays de vélo et ça fait du bien. D’autant plus que le soleil se lève, la température monte et on baisse progressivement les manchettes, et on met le gilet dans les poches arrière. Cesana Torinese, Oulx, Susa à 503 mètres d’altitude, les traversées de villes se font bien, la sécurité est parfaite et on peut attaquer le Mont Cenis sereinement. Surtout pour ceux qui profitent du premier ravito à Susa. Pas de pâtes al dente sans doute, mais ça permet de recharger les accus, il en reste et pas des moindres. Le Mont Cenis nous amène à 2083 mètres en son sommet, le col n’est pas très difficile, il vaut par sa longueur, par sa frontière avec la France qui, côté Italien, est bien loin du sommet et par son beau lac d’altitude, qui n’est pas tout à fait le sommet. Ce Mont Cenis paraît interminable, mais c’est bien connu, on est en Italie, pays qui aime le vélo, qu’on aime pour plein de raisons, et quand on aime, on évite de regarder le compteur !
La bascule nous ramène dans la vallée de la Maurienne, deuxième vallée du jour, via Lanslebourg (clin d’oeil à l’Iseran, à droite), Modane et Saint-Michel-de-Maurienne. En tout, ce sont plus de 40 kilomètres, légèrement descendants, où il vaut mieux voyager accompagné et avec des coureurs qui se relaient plutôt qu’en solo, même si le vent n’est pas de la partie. On n’ira pas demander un col supplémentaire, comme le vainqueur Loïc Ruffaut sur le podium, mais c’est sûr que cette longue vallée est usante, et qu’il faut en garder car un duo de champions nous attend !
Le Télégraphe est-il un col qui compte pour le classement de la montagne sur les épreuves pros ? Vaste débat, à chaque fois posé. Toujours est-il que les 11 kilomètres pèsent dans les jambes, d’autant plus qu’il faut mettre petit plateau après des kilomètres grand plateau, ça pique légèrement d’autant plus qu’un invité s’est présenté au bout de quelques kilomètres. Les routes de montagne souffrent et la sortie de l’hiver est propice aux travaux, c’est le cas dans le Télégraphe. Des tranches de 500 mètres de rupio, une couche intermédiaire qui n’est pas du billard et après laquelle on n’a plus besoin de secouer son bidon. Sur 5 kilomètres, ça marque, mais on se dit que c’est pareil pour tous (sauf ceux qui ont des points de suture) et le sommet à 1566 mètres est atteint quand devant, on est déjà au sommet du Galibier.
C’est là que l’explication a eu lieu entre les cinq de tête, qui avaient pris les devants au sommet du Montgenèvre, avant d’accentuer leur avance dans la descente (3’30 » d’avance au pied du Mont Cenis) et mis les voiles dans la vallée de la Maurienne d’autant plus que, derrière, l’organisation n’était pas au top. C’est au pied du Télégraphe que Loïc Ruffaut a choisi de respirer l’air des grands cols, mais seul, cette fois, avec la ferme intention de faire un mano à mano avec la voiture de tête, histoire de donner en direct ses impressions sur le parcours.
Valloire, Serre-Chevalier, on salue deux beaux champions de l’hiver, le slalomeur Jean-Baptiste Grange et le descendeur Luc Alphand, absent samedi, mais dont la bière (qui tire un peu plus de 4°) s’apprécie sans modération surtout après tant d’efforts. 17 kilomètres pour rallier le sommet, Sa Majesté le Galibier se mérite. Les marmottes sont déjà là, la cyclo éponyme peut se lancer samedi matin à Bourg d’Oisans, les troupeaux aussi, à défaut de spectateurs ! Après Plan Lachat (où « ça commence réellement ») un ravito et les pentes les plus dures. Depuis Valloire, le vent de face s’est invité, pour ceux qui voient le verre à moitié vide, c’est la mauvaise nouvelle, pour les autres, c’est plutôt bien, tant qu’on a le vent, on n’a pas les précipitations! 14,9 au passage aux granges et la stèle Pantani. Kézako? Pas forcément le pourcentage de pente, pas non plus la vitesse même des meilleurs sur le dernier kilomètre du Galibier, mais tout simplement le prix au kilo du Beaufort, produit sur place. Ceux de la Marmotte, préparez la monnaie !
Au sommet du Galibier, (2645 mètres, la Cima Coppi de cette Serre-Che), majestueux, l’oxygène y est plus rare. On met le coupe-vent et c’est parti pour le Lautaret, 2058 mètres, et le retour sur Chantemerle. Adieu les dénivelés positifs et bonjour le vent de face qui lamine encore un peu plus les organismes. Un vent à battre son record dans la montée, et qui nous fait rester en prise, pas en brise, jusqu’au bout. On apprécie d’autant mieux le super buffet mis en place à l’arrivée avec viande froide, salades de riz, de pâtes, pois chiches, fruits, compotes, etc. Tout est prêt pour accueillir les arrivants sur une échelle de temps qui va de 6h15 pour le vainqueur à plus de 11 heures pour les ultimes arrivants qu’il faut féliciter. Un peu plus de 290 classés, preuve en est que ceux et celles qui se sont inscrits ont choisi et bien choisi.
Classement :
1. Loic Ruffaut (Team Scott-Vélo 101-Risoul) en 6h19’31 »
2. Fabien Muzette (Team Mavic) en 6h24’03 »
3. Andrea Paluan (Team Carimate Kemo) en 6h30’52 »
4. David Polveroni (Team Scott-La Clusaz) en 6h30’52 »
5. Stefano Sala (Team Carimate Kemo) en 6h33’06 »
6. Michel Roux (Team Scott-Vélo 101-Risoul) en 6h33’07 »
7. Joris Vanlommel en 6h34’31 »
8. Kenny Mijssen en 6h39’14 »
9. Jean-Noël Sarlin en 6h41’15 »
10. Rodolphe Lourd (AS Fontaine) en 6h44’45 »