Lundi 25 mai. Les dernières étoiles scintillent encore pour quelques instants dans le ciel austral, dont les doux reflets laissent deviner l’aurore. Bientôt, de premiers rayons s’échappent de l’océan dont les vagues se brisent au pied des falaises. Les cimes dentelées aux flancs verdoyants se découpent progressivement dans le paysage. Les chants des coqs rivalisent maladroitement avec ceux plus harmonieux des oiseaux exotiques, des parfums exquis nous enveloppent, un souffle chaud nous gagne. Tahiti vient d’apparaître.
C’est dans ce petit coin de France isolé en plein cœur du Pacifique sud, sur la face bleue de la planète, qu’est en train de s’élever l’une des cyclos les plus savoureuses du calendrier. Par son décor féérique, son exotisme, son authenticité aussi. Combien seront-ils dimanche à partir à l’assaut des routes de la 4ème Ronde Tahitienne ? Vraisemblablement plus encore qu’ils ne l’étaient l’an passé quand le record de participation avait été porté à 428. Une vraie performance, déjà, pour cette épreuve du bout du monde lancée en 2011 par le Vélo Club de Tahiti sur un territoire qui se passionne avant tout pour les sports nautiques, aux premiers rangs desquels le va’a et le surf. Une certitude : la participation étrangère est en hausse.
Dimanche, on viendra de Nouvelle-Zélande, du Chili, de Hong Kong, et donc de France pour rouler dans ce paradis terrestre à la beauté préservée, tous les sens en éveil sur 110 kilomètres entre mer et montagne, cocotiers et bananiers, sur un tracé côtier qu’il aura été donné à chacun des participants étrangers d’explorer en avant-première ce matin. C’est qu’on ne fait pas un si long déplacement en Polynésie française pour un seul week-end. Les vingt-deux heures d’avion de Paris à Papeete sur Air Tahiti Nui et son magnifique avion bleu à la fleur de tiare, plus les douze heures de décalage horaire à encaisser, exigent ici une halte plus longue qu’ailleurs.
Cela, les dirigeants du Vélo Club de Tahiti, à la tête duquel le Castrais Benoît Rivals, l’ont bien intégré. Depuis l’an passé, ils ont mis sur pied une formule séduisante, invitant les participants venus de loin à découvrir à leurs côtés la richesse de leur pays à travers un package combinant sport et tourisme. C’est un séjour inoubliable que réserve en fait à ses hôtes ce petit club polynésien composé d’une trentaine de licenciés. Un séjour que nous allons vous faire partager à l’occasion de cette semaine où tourisme et cyclisme riment mieux que jamais.
Dès l’atterrissage à Tahiti, de nuit, le ton est donné ! L’accueil polynésien, réputé pour être l’un des plus chaleureux au monde, se traduit non seulement par les nombreux colliers de fleurs que l’on vous passe derrière la nuque, les embrassades et les formules de salutation (ia orana na, maeva, mañava) qui les accompagnent à notre descente de l’avion, mais il est bercé pour la circonstance par les danses et chants polynésiens, chaque participant à la Ronde étant invité à danser le tamouré avec les vahinés. La magie opère instantanément. Et la fatigue d’une journée entière au-dessus de la Terre s’efface momentanément.
Les vélos récupérés, il convient toutefois d’aller reprendre des forces, car au petit matin le Vélo Club de Tahiti nous attend pour une sortie de décrassage de 90 kilomètres, en fait une reconnaissance d’une partie du tracé de la Ronde Tahitienne.
Ce sont les premiers tours de roue sur le sol tahitien, et ils sont riches en enseignements. Certes, les sensations demeurent faussées par un long transfert aérien et un organisme qui doit s’acclimater à l’important décalage horaire, mais il convient également de s’habituer à la forte chaleur et un important taux d’humidité qui surprend dès la descente de l’avion. Le tracé offre des points de vue à couper le souffle, entre l’océan Pacifique d’un côté, les falaises et leur riche végétation y plongeant de l’autre. On aura l’occasion d’y revenir mais c’est un vrai dépaysement dont les petits pépins mécaniques rencontrés et les pauses qu’ils obligent ici et là permettent de profiter. On ne s’en plaindra pas ! C’est certainement le moment de lever la tête du guidon car dimanche, on roulera fort sur les routes de la côte sauvage.
Et d’ici là les sensations seront sans doute revenues ! Les jours prochains devraient en effet permettre de récupérer avant un nouveau test de jambes dans deux jours le long du lagon de Moorea, prochaine destination des participants à la Ronde.