Le GP La Marseillaise, avec ses calanques, ses crêtes et son soleil, constitue un splendide théâtre naturel pour l’ouverture de la saison française. Accueillant nos héros dans son enceinte pour relancer leur lutte, il donne lieu à toutes sortes de rêveries, autant touristiques que sportives. Du reflet de la Méditerranée aux attaques saillantes de Guillaume Martin, tout scintille dans nos pupilles. La Provence annonce l’horizon glorieux des monuments et des Grands Tours, mais n’en jalouse ni le cadre, ni le spectacle. En effet, si Amaury Capiot a raflé la mise au terme d’un sprint massif, cette issue fut longtemps incertaine, combattue par moultes animateurs bien sortis de l’hiver.
Gougeard et Debeaumarchais, vaillants résistants
Tout d’abord, l’échappée matinale n’avait rien de publicitaire. Composée du belge Louis Blouwe (Bingoal Pauwels), du néerlandais Danny Van der Tuuk (Kern Pharma) et des Français Jordan Jegat (Team U Nantes Altantique), Julien Amadori (Nice Métropole Côte d’Azur), Clément Carisey (Go Sport – Roubaix Lille Métropole), Nicolas Debeaumarchais (St Michel – Auber 93) et d’Alexis Gougeard (B&B Hotels – KTM), celle-ci a rapidement compté 7 minutes d’avance, ne rendant au peloton ce bien qu’après une lutte acharnée. Il faut dire que les deux derniers énergumènes cités n’entendaient pas rendre les armes si facilement. Auteurs d’une première attaque en duo dès le 100e kilomètre, les deux hommes ont remis ça au sommet de la route des Crêtes, profitant du sprint de la montagne pour se faire définitivement la malle.
Alexis Gougeard et Nicolas Debeaumarché ont particulièrement animé l’échappée du jour | © GP la Marseillaise
Et ils ont tenu longtemps à l’avant, à se relayer corps et âme pour prolonger au maximum l’aventure. Le retour de l’italien Diego Ulissi (UAE Emirates) et du normand Sandy Dujardin (TotalEnergies) n’a même pas réussi à sonner leur glas ! En effet, l’octuple vainqueur d’étapes sur le Giro, parti en éclaireur au milieu d’un chaos semé par Alberto Bettiol (EF Education – Easy Post), n’a jamais réussi à s’en débarrasser définitivement. S’il s’en est allé seul dans la descente vers Cassis, la locomotive Guillaume Martin (Cofidis) a ramené tous ces wagons dans sa roue au pied du col de la Gineste, Alexys Brunel (UAE Emirates) en option.
Un temps, Diego Ulissi occupa seul la tête de la course | © GP la Marseillaise
Brunel et Martin, impressionnants attaquants
Les deux Français n’ont cessé d’impressionner à ce moment clé de la course. L’un en attaquant, l’autre en protecteur, tous deux ont fait étal d’une force épatante et d’une combativité à toute épreuve. Sur différents aspects, l’intersaison semble leur avoir fait le plus grand bien. Tandis que le normand a fait preuve d’une explosivité qu’on ne lui connaissait pas jusqu’alors, le nordiste est apparu métamorphosé sous son nouveau maillot, lui qui fut bien transparent l’an passé sous les couleurs de la Groupama-FDJ. Leur spectaculaire retour sur l’homme de tête ne leur ayant pas suffi, ils ont également pris les choses en main dans l’ultime difficulté de la journée, déclenchant les péripéties finales. Reléguant d’une attaque sèche Ulissi et consorts aux seconds rôles, Guillaume Martin n’a pas non plus tardé à faire exploser Alexys Brunel, enfin à bout.
La cavale solitaire de Guillaume Martin n’a pas suffit à vaincre le peloton | © GP la Marseillaise
Capiot et Hubert, heureux vainqueurs
En ce faisant, le coureur de la Cofidis dessinait le scénario final de la journée : David contre Goliath. Seul face au peloton. Avec une trentaine de secondes d’avance à 20 kilomètres de l’arrivée, ses chances de succès étaient minces. Et aucune mésentente ne lui a apporté secours. Tandis que l’ensemble des poursuivants étaient repris, chaque formation se regroupait et s’organisait. UAE roulait à bloc pour Joel Suter, et Trek relayait au service de Mads Pedersen. Le rapport de force était déjà suffisamment inéquitable pour que Guillaume Martin ne cède, et ne finisse sa course englouti par la meute à l’entrée de Marseille.
La large victoire d’Amaury Capiot | © GP la Marseillaise
Sur le boulevard Michelet, long et droit comme une voie ferrée, les trains étaient lancés, avec l’objectif d’emmener leur sprinteur à bon port. Longtemps, les TotalEnergies d’Edvald Boassen Hagen ont mené l’attelage. Puis ils furent débordés sur la voie de droite par le TGV Arkea-Samsic, plaçant Amaury Capiot en première classe. Idéalement placé à la levée des fessiers, le belge s’est engouffré dans l’aspiration de ses prédécesseurs avant de délivrer toute l’ampleur de sa force et s’étirer finalement sur la ligne d’arrivée, satisfait par cette victoire magistrale.
Dans son sillage, Mads Pedersen ne pouvait qu’admirer le fait accompli, et Benoît Cosnefroy, 5e, se frustrer d’un retour trop tardif. Après 5 ans de mainmise, la France abandonne donc le GP d’Ouverture à ses voisins belges, mais poursuit sa série en termes d’équipes. Effectivement, après Marc Madiot, Jean-René Bernaudeau et Vincent Lavenu, c’est aujourd’hui Emmanuel Hubert qui triomphe. L’an passé, il avait dû attendre la fin du mois d’avril pour connaître une telle joie. Le voilà vraisemblablement délivré de cette angoisse !
Le Top 10 de la course | © GP la Marseillaise
Par Jean-Guillaume Langrognet