Il y a deux semaines se déroulait la 5èmemanche de la Coupe de France. Quels étaient les objectifs ? Sont-ils atteints ?
Nos objectifs sur cette 5èmemanche, étaient de conserver notre 3ème place par équipe. Pas facile compte tenu de notre effectif réduit (Absence de Marine Stappazzon depuis plusieurs semaines suite à sa chute en Bretagne et plus récemment celle d’Océane Tessier qui s’est de nouveau cassée la clavicule sur une Coupe de France piste). J’ai ce classement à cœur et nous y sommes arrivés grâce à une super équipe et une Sandrine Bideau impériale sur le chrono.
Les 4 mousquetaires de St Michel Auber-93 pour la Coupe de France | © Nicolas Vaucouleur
Portez-vous la casquette d’entraineur ou uniquement celle de directeur sportif ?
Je porte uniquement la casquette de directeur sportif. C’est une activité qui prend du temps malgré les apparences. La majorité du travail se fait souvent dans l’ombre des compétitions. Une fois assis dans la voiture, je n’ai plus grand-chose à faire. Le suivi d’une athlète, c’est une autre activité que je sais faire mais que je préfère déléguer dans un souci d’efficacité et de confort.
Une de vos athlètes, Kristina Nenadovic est l’une des espoirs Français en piste. Comment l’aidez-vous dans ce double projet ?
Pas facile la gestion du calendrier de Kristina, souvent en équipe de France ou en stage de préparation. C’est le jeu, nous la soutenons, on travaille ensemble avec Jeremy Fromonteil son entraineur et Julien Guiborel afin que « notre » calendrier s’adapte à ses objectifs. C’est une fierté d’avoir une athlète en devenir dans son équipe et malgré son jeune âge, Kristina est un véritable moteur pour l’équipe !
Du côté de St Michel-Auber 93, nous l’aidons aussi grâce à nos partenaires et notamment Mavic pour le matériel piste. Elle possède également une bourse du département de Seine Saint Denis dans le cadre des JO 2024.
Kristina Nenadovic, la pépite du St Michel-Auber 93 | © Nicolas Vaucouleur
A l’instar d’un Mathieu Van Der Poel, d’une Marianne Vos ou encore d’un Wout Van Aert, pensez-vous que le cyclo-cross est un véritable atout pour le cyclisme sur route ? Encouragez-vous vos athlètes à aller dans les sous-bois l’hiver ou sur la piste ?
Evidemment que c’est un atout, surtout dans notre région ou parfois, la période hivernale est assez délicate pour s’entrainer. Agilité, puissance, dextérité, placement, ce sont des atouts +++ pour la route ! Cette année nous avions Marine Strappazzon dans les sous-bois et 3 pistardes ; Océane Tessier, Barbara Fonseca et Laura Da Cruz. Le vélodrome de St Quentin en Yvelines est un atout pour les Parisiens. Sans nous jeter la pierre, nous devons nous améliorer sur ce point afin de peut-être mieux accompagner les filles sur ces terrains.
Durant l’année, vous avez participé à des courses internationales en Belgique notamment. Dans quel but ? Quelles différences avez-vous observé avec les courses en France (niveau, tactique, parcours…) ?
Je ne sais pas comment le décrire mais le cyclisme en Belgique est totalement différent de la France. Sportivement plus dur, plus long, mais aussi plus excitant, magique. Les filles ont adoré et surtout, les retours en France sont plus faciles. Du KM 0 à l’arrivée, cela ne débranche pas une seconde et peu importe les conditions… pluie, vent, bordures, routes pavées…ça forge un caractère !! Pour s’aguerrir et préparer des échéances, il n’y a rien de mieux !
Deux de vos filles ont chuté à la mi-saison, cela vous a-t-il fait modifier vos objectifs ? Quels sont les mots qu’un directeur sportif dit à ses coureuses pour les soutenir ?
Modifié nos objectifs, non pas vraiment. Disons que cela a contraint certaines filles à faire toute la saison et que physiquement et moralement ce n’est parfois pas facile. J’ai bien senti le coup de mou sur les Championnats de France (à la Haye-Fouassière) malgré une belle prestation tout de même ! De mon côté, ce n’est parfois pas facile de contraindre mais elles ont toutes joué le jeu sans rechigner. C’est là que tu te rends compte que tu as réussi à construire une belle équipe !
Les mots d’un directeur sportif ? Il n’y a pas de règles évidemment, il faut s’adapter aux tempérament des filles. J’ai essayé d’être proche sans pour autant être papa poule, j’ai rassuré, je leur ai fait comprendre que malgré la blessure, elles faisaient partie intégrante de cette équipe. Qu’il fallait prendre le temps de revenir et de ne pas précipiter les choses. Elles savent que je suis là si besoin.
Sandrine Bideau en échappée lors du Championnat de France Elites | © Thomas Maheux
A ce jour, seules 2 équipes féminines en France sont professionnelles, comment expliquez-vous cela ?
Grande question ! Je pense que les partenaires sont encore un peu frileux sur le cyclisme féminin. Mais la tendance semble tout de même s’inverser. Les dernières audiences TV sur les Championnats de France montrent bien que le féminin attire tout autant que le masculin ! Après sportivement, avons-nous un vivier assez conséquent en France sans devoir aller chercher des filles à l’étranger ? Y a-t-il de la place pour plusieurs équipes UCI en France ? Franchement, je n’en suis pas sur… il faudrait d’abord réussir à élever le niveau des DN. Peut-être que la nouvelle réforme qui arrive va aller dans ce sens, espérons-le !
C’est une question qui ne cesse d’être posée depuis juillet mais pensez-vous qu’un Tour de France féminin peut refaire son apparition ?
Je pense que oui, un Tour de France féminin à toute sa place ! Après pour bien connaitre les enjeux et la logistique ASO sur le Tour de France masculin, impossible de le faire en même temps. A titre d’exemple, une équipe homme, c’est près de 15 véhicules dont 2 poids lourds… si on multiplie par 22… plus les filles… Il faut savoir convaincre ASO avec tact pour organiser cela à un autre moment ou faire un partenariat. On a tendance à plutôt les accabler, pas sûr que ce soit la bonne technique !
On a vu que vous cherchiez à recruter pour 2020, quelles sont vos mots pour attirer les coureuses ? Avez-vous des idées de recrues en tête ?
Depuis 2 ans, cette équipe progresse sur le plan sportif mais aussi sur la partie encadrement et logistique. Même si pour le moment nous sommes encore en DN, toutes les filles sont rémunérées, équipées, et ou défrayées. On fait en sorte que la pratique ne soit pas contrainte et que les filles se consacrent à la performance… et au plaisir. Tout n’est pas parfait mais on s’améliore avec le temps.
Je voudrais que 2020 soit encore mieux que 2019… des noms pas vraiment, ce serait prématuré mais de nombreuses pistes oui !
Ravito pour les coéquipières fait par Barbara Fonseca | © Stéphane Tillet
Quel est le projet à moyen ou long terme de cette équipe féminine St Michel-Auber 93 ?
A court terme, comme je disais, faire mieux que 2019 tout en prenant en compte la nouvelle réforme qui arrive.
A plus ou moins long terme, j’ai envie de dire qu’il faudrait passer le cap et tendre vers l’UCI mais cela dépend aussi de la volonté de nos partenaires. St Michel Auber 93, c’est l’équipe dames, mais c’est aussi des hommes pro, des amateurs en passant par l’école de vélo, les minimes, les cadets et la DN.
Par Jade WIEL