Où en sont vos démarches pour assurer le passage en World Tour ?
Les démarches pour accéder au peloton professionnel sont malheureusement au point mort. Durant l’été, j’avais une « touche » vraiment intéressante avec quelqu’un qui avait le budget nécessaire, cependant cette personne a décidé que finalement ça ne l’intéressait plus pour cette saison et je suis revenu au point de départ. Dans tous les cas l’objectif était d’y accéder en deux ans pour bien se préparer et ne pas faire les choses à la va-vite, mais pour le moment le projet est en stand by…
Vous avez une démarche constructive sur une discipline et une pratique d’avenir, qu’est-ce qui bloque au niveau des sponsors potentiels ?
Je n’ai sûrement pas exploité toutes les possibilités au mieux, mais je ne suis pas un spécialiste. J’essaye de faire avec mes compétences pour proposer un dossier de partenariat intéressant, mais c’est sûrement moins convaincant que si un professionnel l’avait fait. Je n’ai peut-être pas les connaissances nécessaires dans mon réseau pour atteindre le potentiel futur sponsor principal de l’équipe, mais il ne faut pas baisser les bras. Parfois il faut y aller au culot alors nous continuons à travailler pour permettre un jour aux filles de poursuivre leur saison chez nous au niveau supérieur. J’ai essayé d’interpeller en montrant ma motivation et celle du club dans les médias en parlant du projet UCI des fois que quelqu’un lise les articles et se dise pourquoi pas nous, mais pour le moment rien de nouveau. Je regrette une chose cependant, c’est que malgré les excellents résultats de cette année, l’équipe n’est pas forcément plus soutenue financièrement. On pourrait croire qu’avec les résultats de l’équipe des portes pourraient s’ouvrir, mais non, pourtant on a gagné la Coupe de France par équipe, en individuelle, gagner deux titres de championne de France. On nous félicite et on nous dit de continuer, mais sans évolution au niveau supérieur, un jour l’effectif tournera et nous retournerons dans la masse, car les filles passent pros ou bien stoppent leur carrière cycliste pour leur vie perso et professionnelle, ce qui est compréhensible. Nous existons depuis 3 ans maintenant alors que d’autres équipes sont implantées depuis longtemps. Personnellement, j’ai découvert le métier de DS il y a 3 ans lorsque les dirigeants du VCMM m’ont donné cette opportunité. À la base mon domaine est l’entraînement alors j’ai encore à apprendre pour mener le projet à bien, mais c’est ça qui est intéressant, évoluer en même temps que les filles.
À votre niveau et avec vos objectifs, une saison 2018 en World Tour, ça serait un budget de quel ordre ?
Après discussion avec des personnes ayant l’expérience du milieu UCI et un calcul des charges en fonction des objectifs, nous savons qu’il faut au minimum 150.000 euros pour faire une petite UCI. Ensuite bien sûr, plus le budget augmenterait, plus le calendrier pourrait évoluer.
Pour 2018, comment va évoluer l’effectif, on sait le départ (inéluctable de Evita Muzic) ?
N’ayant pas d’évolution de budget, je ne pouvais pas me permettre de changements par rapport à notre stratégie précédente. Depuis le départ, nos athlètes sont toutes originaires du coin, au maximum elles ont une heure de route pour venir au point de rassemblement alors cette année nous avons fait pareil. De plus, le Championnat de France pourra être disputé sous le maillot de club comme chez les garçons normalement donc j’ai voulu recruter des filles espoirs ou séniors qui pourront constituer l’équipe. Nous accueillons Chloé Charpentier en provenance d’Orléans Loiret, étudiante à Besançon et Jennifer Mark en provenance du Bassin Houiller, étudiante en doctorat en Suisse. Bien sûr le départ d’Evita chez FDJ enlèvera une belle carte à l’équipe, mais avec un niveau homogène l’équipe a encore d’excellentes cartes à jouer pour cette nouvelle saison. Et puis nous sommes tout de même fiers de voir passer nos filles dans les rangs professionnels. Du côté des arrêts, Esther Eustache va lever un peu le pied pour se consacrer à ses études et Éléonore Saraiva va sûrement se consacrer à sa discipline de prédilection le fixie après une saison 2017 exceptionnelle avec sa victoire sur le Red Hook Criterium. J’ai aussi décidé de ne pas conserver Alessia Bugeia donc nous partirons cette saison avec 8 filles. Il s’agit d’un choix réfléchi pour permettre à chacune d’être présente sur chaque déplacement si elles le souhaitent.
Recruter en Suisse et intéresser des partenaires suisses, est-ce envisageable ?
Le recrutement en Suisse n’a jamais été exclu, car nous sommes même plus proches de la Suisse que de Besançon par exemple. D’ailleurs dès la première année, Lise Marie Henzelin a rejoint l’équipe après une candidature spontanée. Elle est restée chez nous deux saisons ou elle a obtenu de beaux résultats (2ème derrière Edwige Pitel par exemple en Coupe de France sur une très belle épreuve qui était le tour de Haute Saintonge en 2016). Cette année j’ai cherché un peu, mais les Suissesses « libres » ont des projets multidisciplinaires avec une dominante pour le VTT donc ça ne collait pas tout le temps. Et puis certaines de leurs meilleures athlètes sont dans le team Remax qui fait déjà des très bonnes choses pour elles.
Où allez-vous porter les objectifs, maintenant que vous avez presque tout gagné en France ?
Cette saison nous sommes un peu plus libres en termes d’objectifs. Le fait d’avoir gagné la Coupe de France par équipe et individuelle cette saison nous permet d’être plus sereins. Bien sûr si nous pouvons réitérer cela, nous ne nous en priverons pas, mais je vois les choses différemment cette année. Les filles sont jeunes et je veux leur partager ma vision du cyclisme. Mettre des choses en place tactiquement, tenter sa chance quitte à perdre, apprendre pour la suite. Nous avons dans la région une équipe homme qui doit être un modèle pour nous. La DN1 d’Etupes, avec Jérôme Gannat a sa tête, a une philosophie de la course offensive. C’est ce que j’aime. Parfois ça marche, parfois non, mais quand ça marche qu’est ce que c’est beau à voir ! C’est ça que je voudrais voir chez les filles et je sais qu’elles en sont capables, car je l’ai déjà vu à Pujol cette année. Elles m’avaient tout simplement bluffé. Nos objectifs seront en France du coup comme notre budget ne nous permet pas encore d’évoluer, mais nous avons un rôle d’apprentissage auprès des filles alors nous irons sur les belles épreuves françaises et également en suisse pour mettre en application « le beau vélo ».