Van Vleuten – Van der Breggen, Van der Breggen – Van Vleuten, les années se suivent et ses ressemblent pour les deux cracks hollandaises, habituées au sommet de l’affiche depuis de nombreuses années. Non contentes d’avoir remporté les quatre dernières éditions des championnats du monde, les oranje jouent désormais le doublé, et ce avec succès depuis l’an passé. Outrageusement dominatrice individuellement et collectivement, ces dernières ont véritablement écrasé la course de long en large ce samedi, pour en repartir de nouveau avec deux belles breloques, sans compter les deux autres récoltées à l’occasion du contre-la-montre de jeudi.
Ainsi, cet après-midi, il n’y a jamais eu réellement de suspens concernant l’issue de l’épreuve. A peine inquiétées par l’avance prise par une échappée à la mi-course, au sein de laquelle l’espagnole Mavi Garcia semblait en mesure de surpasser Amy Pieters, seule représente néerlandaise du groupe, le train orange a vite repris les choses en main après avoir fait paniquer les italiennes. Wagon après wagon, propulseur après propulseur, la fusée hollandaise est arrivée lancée à pleine balle dans la Cima Gallisterna, véritable épouvantail du circuit avec sa pente atteignant par moments les 15%. Et s’il faudra sûrement demain attendre le dernier tour pour voir la course se décanter chez les hommes, l’époustouflant relais de Marianne Vos suivi de l’infernal tempo d’Annemiek Van Vleuten ont « suffi » à faire exploser le peloton à plus de quarante bornes de l’arrivée. Non contente de l’effet produit, Anna Van der Breggen s’est alors débarrassée avec une aisance restante des trois concurrentes restantes (Cecilie Ludwig Uttrup, Elisa Longo Borghini et Elizabeth Deignan) pour s’envoler à l’avant. Nulle ne l’a plus jamais revue.
Effectivement, le sort de ces dernières a rapidement été fixé. Pointées à plus de trente secondes au sommet de la bosse, celles-ci ont aussitôt commencé à compter leurs coups de pédales dans l’optique de la lutte pour le podium, si bien qu’elles ont même été revues par le peloton. Malgré l’effort des braves gregaris italiennes, quelque peu aidées par la courageuse Sandra Levenez, la tendance ne changea pas. Et Anna Van der Breggen gagna.Anna Van der Breggen vient de glaner à Imola son deuxième titre de championne du monde | © Compte Twitter de la formation Boels-Dolmans, auteur inconnu
Championne des Pays-Bas pour la première fois il y a quelques semaines, vainqueure du Giro Féminin au début du mois et titrée en contre-la-montre jeudi dernier, la native de Zwolle poursuit ainsi le chemin d’une saison extraordinaire, dans la dernière ligne droite de sa carrière, qui prendra peut-être fin au terme des Jeux Olympiques de Tokyo, où elle défendra son titre. Titulaire d’un palmarès ahurissant, ogre des dernières saisons, la néerlandaise s’est ainsi assurée de porter la splendide tunique arc-en-ciel pour le crépuscule de dix années professionnelles d’exception.
Pourtant, avec cette échéance proche, combinée à l’âge canonique d’Annemiek Van Vleuten et au relatif déclin de Marianne Vos, autres héroïnes de la décennie, le cyclisme féminin est peut-être à l’aube d’une nouvelle ère, plus disputée et moins soumise à l’outrageante suprématie de quelques-unes. Débarrassées de cette génération dorée des oranje, les championnes de demain pourront ainsi dépasser les frontières de la Hollande. Encore peu connues par le grand public aujourd’hui, elles s’appelleront peut-être Cecilie Ludwig Uttrup (25 ans), Mikayla Harvey (22 ans), Liane Lippert (22 ans), ou encore Juliette Labous et Evita Muzic (21 chacune). Autrefois nation mère de cyclisme féminin grâce à Jeannie Longo puis renaissante par l’entremise de Pauline Ferrand-Prévot, la France possède en effet un avenir radieux, grâce à l’avènement annoncé de multiples pépites. Pour en finir avec l’hégémonie orange, mais aussi pour mettre en lumière l’intérêt croissant que suscite la Petite Reine chez la gente féminine hexagonale.
Par Jean-Guillaume Langrognet