Le sport, même amateur, s’écrit à travers de belles histoires, celle-ci en est une. Anthony Vignès était revenu l’an passé au Brest Iroise Cyclisme après trois années d’exil au club de Nantes-Atlantique. Sa saison 2011 aurait pu se terminer avec un contrat professionnel mais ce ne sera pas encore pour cette année. L’histoire ne devrait pas en finir là.
L’histoire commence au début de la saison 2011, à la présentation d’équipe plus exactement. Anthony Vignès est l’une des onze recrues du BIC 2000, et bien parti pour être un des chefs de file du groupe. Dès février, il annonçait la couleur : « l’objectif est de passer pro à la fin de l’année. » Neuf mois plus tard, le jeune quimpérois est devenu champion de Bretagne, a remporté une prestigieuse étape du non moins prestigieux Tour de Bretagne (avec les pros !), et a livré de bonnes performances la plupart du temps. « Je pense avoir réalisé une très bonne saison, c’est vrai, avec de gros résultats sur des grandes courses, comme au Tour de Bretagne par exemple. Il m’a peut-être manqué un peu de régularité parfois. Et puis il faut avouer que la mononucléose que j’ai attrapée en janvier m’a pénalisé, puisqu’à cause de ça je n’ai pas pu faire de grosses sorties. » Mais tout de même, le jeune homme de 23 ans a réussi à hisser les couleurs vertes et noires de son club au plus haut niveau, et en a même reçu de nouvelles, blanches et noires, qu’il pourra porter jusqu’au prochain championnat régional.
Anthony Vignès avait-il entendu parler de Marguerite Youcenar, qui disait qu' »il faut toujours un coup de folie pour bâtir un destin » ? Ce premier coup de folie remonte au 30 mars, jour de la cinquième étape du Tour de Bretagne entre Morlaix et Plaintel. Jusque-là très discret, voire invisible, tel un phasme (non pas par sa grande taille), mais déjà bien placé au général, le jeune coureur attaque à 5 kilomètres du but. Il ne se relèvera pas de son effort, et remportera ainsi l’une de ses plus belles victoires. « Mon meilleur souvenir de la saison reste le Tour de Bretagne, mais ce n’est pas que pour ma victoire d’étape que je dis ça. L’équipe a super bien tourné cette semaine-là, on a prouvé qu’on pouvait rivaliser avec les professionnels. Et puis l’ambiance était géniale dans l’équipe. » Modestie quand tu nous tiens ! L’histoire était en marche.
Il ne faut pas oublier que le cyclisme est un loisir, un métier parfois, mais surtout une passion. Même les plus forts doivent un jour se remettre en question et faire quelquefois marche arrière. « En 2012, je vais reprendre avant tout mes études, pour entamer une licence professionnelle dans la finance sûrement. Du coup, je ne ferai du vélo que pour le plaisir sûrement, car je suis conscient que je vieillis, et que j’ai de moins en moins de chance de passer pro. Arrivé à un certain âge, les équipes se méfient. » L’histoire aurait pu s’arrêter là, malgré les nombreux contacts établis avec des équipes pros, françaises ou étrangères. Mais tout espoir n’est pas perdu, « c’est vrai que si je regagne une étape au Tour de Bretagne, les choses seront différentes… » Pour le petit qui était fan de Laurent Jalabert, l’occasion d’imiter son ancienne idole n’est pas si perdue que ça finalement, même si l’intéressé se refuse à le croire. Ce n’est pas pour autant qu’Anthony Vignès n’a pas d’objectifs pour la saison à venir : « j’espère tout de même gagner des courses, pourquoi pas en regagner une au Tour de Bretagne ? Il y a aussi les classiques, comme Manche-Atlantique qui m’intéressent, tout comme le Championnat de France amateur. » Chassez le naturel, il revient au galop !
« Toun », comme il est si affectueusement surnommé, sera attendu cette année par ses adversaires. Mais le jeune homme, toujours insouciant et rempli de décontraction, trace sa route. « Après tout, tant que je peux gagner des courses ! » C’est sûr, le noir et blanc lui va si bien. – Mathilde L’Azou