Erwann, après deux années prometteuses chez les pros de Bretagne-Séché Environnement, tu fais ton retour cette saison à l’échelon amateur. Que s’est-il passé ?
Je n’ai pas été conservé dans l’effectif, sans explication particulière. On m’a seulement dit que je manquais de résultats, mais je ne crois pas en cet argument. En deux années, à 22 et 23 ans, j’ai obtenu plus de résultats que certains mecs qui courent depuis dix ans. On ne m’a informé que je ne serais pas reconduit que fin septembre, soit au tout dernier moment. Il m’a été impossible de me retourner. J’ai appelé à droite, à gauche, mais tous les effectifs étaient quasiment bouclés. Il n’y avait plus de place nulle part.
D’où ton retour dans le peloton amateur. Comment es-tu arrivé au VCP Loudéac ?
J’étais d’abord à deux doigts d’arrêter le vélo. Etant donné les circonstances, j’étais vraiment dégoûté. J’ai terminé 4ème du Samyn et 10ème du Tro Bro Leon l’an passé, 7ème du Tour de Picardie et 9ème des Boucles de l’Aulne en 2013, je ne pensais absolument pas ne pas être gardé. Tout le monde s’est montré surpris. Et puis j’ai reçu un coup de fil de Patrice Etienne, principal sponsor du VCP Loudéac. Il m’a proposé un beau projet. Beaucoup de gens m’ont manifesté leur soutien et m’ont encouragé à continuer, estimant que ce serait du gâchis que je m’arrête. Ça m’a relancé.
Toi qui a déjà acquis beaucoup d’expérience, quel rôle t’a été confié ?
Malgré mes 23 ans, j’ai un peu le rôle de capitaine de route dans l’équipe, avec deux saisons chez les pros derrière moi. J’y ai acquis une expérience de la course qui n’est pas négligeable, même si chez les amateurs ça ne court pas pareil. Mais je sens la course et c’est important d’avoir un mec comme ça dans une équipe. Cyrille Patoux a lui aussi beaucoup d’expérience entre ses années amateurs et ses années chez les pros. Nous sommes deux piliers de l’équipe, et nous l’avons ressenti dès le stage cet hiver.
Le groupe a subi un gros turn-over cet hiver, quelle atmosphère y as-tu trouvé ?
Il y a eu un gros renouvellement de l’effectif, Patrice Etienne ayant le projet d’accéder à la DN1 en 2016. C’est un projet important que de rejoindre le haut niveau amateur, ce qui a nécessité un recrutement en conséquence. Autour de Kévin Guillot et Luc Tellier, qui étaient déjà là et sont des coureurs importants, capables de gagner à tout moment mais aussi de mettre l’ambiance, sont arrivés Cyrille Patoux et Vincent Colas. Nous avons également deux coureurs étrangers, l’Américain Andrew McCullough et le Finlandais Samuel Pökälä, très bon en contre-la-montre. Nous avons en outre une belle équipe réserve à Loudéac, ce qui nous assure d’être toujours compétitifs.
Le passage en DN1 nécessitera de réaliser une grande Coupe de France DN2. C’est là que tu comptes t’illustrer ?
C’est l’objectif du club mais pas spécialement le mien. J’y serai pour tâcher de marquer des points et faire de mon mieux pour le groupe, bien entendu, mais j’ai d’autres ambitions personnelles. Il y a de très belles courses en France et en Bretagne, je vais me préparer pour. C’est difficile de les annoncer mais je les ai dans un coin de la tête.
Tu n’as en tout cas pas tardé à avoir des résultats avec déjà deux podiums en quatre courses…
J’ai vraiment bien bossé cet hiver, de là à faire deux podiums et une 4ème place en quatre courses, c’est pas mal en effet ! J’ai fait ma rentrée à l’Essor Basque. J’ai terminé 4ème des Boucles de l’Essor, 2ème du Circuit de l’Essor, puis je suis tombé malade. La grippe. J’ai repris à la Route Bretonne le 1er mars mais j’ai dû bâcher au bout de 100 bornes. Je n’étais pas confiant en me rendant sur Manche-Atlantique dimanche. J’avais seulement en tête d’atteindre le circuit final et de finir la course. Mais, sans être au top (mon entraîneur estime que je n’étais même pas à 50 %), j’ai retrouvé de bonnes sensations. J’ai pu faire le sprint mais j’ai commis une erreur côté braquet en voulant repasser la plaque dans la côte de Cadoudal. Ça n’est pas passé, j’ai perdu de la vitesse et des places précieuses. Je fais néanmoins un gros finish pour finir 2ème.
Tu as choisi cette année, et pour la première fois, de faire appel à un entraîneur, quels en sont les gains à ce stade de la saison ?
Je n’avais en effet jamais eu d’entraîneur par le passé, mais j’ai décidé de faire ça à fond cette année. Je ne veux avoir aucun regret. J’ai vraiment bossé très dur cet hiver, plus que je ne l’avais jamais fait. Je vois que ça paie direct, sans être en grande forme. Autant dire que j’ai hâte d’arriver à 100 % sur mes objectifs pour voir ce que ça peut donner. Je devrais avoir mon premier pic de forme à la fin du mois pour la première Coupe de France DN2 au Tour du Canton de Saint-Ciers. C’est prévu comme ça.
L’apport d’un entraîneur doit te permettre d’explorer de nouveaux domaines ?
Complètement. Par le passé je n’avais jamais fait de sprint, de séries, de PMA, tous ces trucs que je ne connaissais pas du tout. Mon entraîneur m’a tout expliqué cet hiver et je suis son programme à la lettre. Chaque semaine, je bosse tout ça. Et je le fais vraiment, sans tricher, je me mets minable. Ce qui est certain, c’est que j’ai beaucoup plus mal à l’entraînement qu’en course.
Tu n’as encore que 23 ans. Si ta carrière pro est pour l’heure interrompue, tous les espoirs sont permis pour un retour au plus haut niveau la saison prochaine ?
Je ne suis pas vieux pour repasser pro, c’est vrai. J’ai des résultats d’entrée de jeu chez les amateurs et je sais que je n’ai vraiment pas eu de chance de ne pas être gardé chez les pros. Ça a surpris tout le monde mais c’est le sport et ses aléas, je n’y peux rien. Je garde quand même l’espoir de repasser pro dans un avenir proche.
Propos recueillis le 11 mars 2015.