Warren, tu avais choisi en début d’année d’effectuer une année de plus chez les amateurs. Vu ton épatante saison 2012, on imagine que tu n’as pas de regret ?
Non, je n’ai vraiment aucun regret quant au choix d’être resté un an de plus chez les amateurs, bien au contraire ! J’aurais aussi progressé si j’avais rejoint les professionnels en 2012, mais peut-être pas autant… Mes bases n’auraient pas été aussi solides qu’aujourd’hui si je n’étais pas passé par la DN1. Ma signature au CC Etupes cette année m’a permis une bonne évolution, grâce à l’aide de Julien Pinot et de Jérôme Gannat notamment.
Où estimes-tu avoir le plus progressé cette année ?
J’ai vraiment progressé dans tous les domaines : sur le vélo mais aussi au niveau mental, ce qui est primordial pour réussir dans le vélo ! Ça m’a permis de mieux appréhender les grands rendez-vous. J’ai aussi acquis cela grâce à l’équipe de France, et surtout grâce à Bernard Bourreau, qui a su me mettre en confiance dès mes premières sélections en Espoir 1. Bernard est quelqu’un de très dynamique, qui donne envie de réussir ! Je lui dois beaucoup. Lui et Marc Chevènement forment vraiment un beau tandem pour encourager les jeunes à progresser.
Quel restera pour toi le moment fort de ta saison 2012 ?
Le moment fort, ça reste ma victoire sur le Tour de l’Avenir, car elle représente la plus belle victoire de ma carrière à ce jour ! Pour remporter le Tour de l’Avenir, j’ai fait de nombreux sacrifices sur des courses qui précédaient l’échéance. Je devais rester au calme dans le peloton pour ne pas trop laisser de cartouches avant mon grand objectif de la saison. C’étaient les consignes de Julien Pinot (NDLR : son entraîneur, qui est aussi celui de Thibaut Pinot, son frère), donc je les ai appliquées. Je trouvais cette approche assez spéciale, et même contre-nature, mais finalement elle a payé, donc tant mieux !
Cette collaboration avec Julien Pinot, la préserveras-tu l’an prochain ou devras-tu travailler avec un coach d’Argos-Shimano, l’équipe pro que tu vas intégrer ?
Je ne sais pas encore comment cela va se dérouler… Mais en tout cas, ce que je peux dire, c’est que les personnes qui sont entraînées par Julien Pinot ont vraiment de la chance, car c’est vraiment une personne formidable, et qui a pour son âge un énorme recul. Il sait se faire comprendre et explique très bien tout son travail. Toutes ces choses-là donnent vraiment envie de bien travailler ! Je tiens à le remercier pour tout ce qu’il m’a apporté cette saison. J’espère de tout cœur continuer avec lui dans les années futures. Avoir confiance en son entraîneur est très important.
Tu as vraiment fait une année pleine, presque l’année idéale… Cela doit te donner beaucoup d’espoir et de confiance pour les années à venir ?
C’est vrai, mon année 2012 a vraiment été pleine ! Mon objectif, en début d’année, était d’être le plus souvent gagnant, quitte à être moins régulier, mais finalement j’ai réussi à faire les deux ! Cette saison me donne de la confiance, mais je sais, car j’ai pu le constater, que la marche est encore très haute pour être performant sur les plus grandes courses professionnelles !
On dit de toi que tu aurais déjà les capacités de gagner une étape sur le Tour de France et y jouer un rôle important au général, qu’en penses-tu ?
Gagner une étape sur le Tour de France c’est mon rêve, quant au classement général je verrai comment je progresse dans les années qui arrivent. Pour moi, participer au Tour de France serait déjà une grosse satisfaction, alors y faire de bonnes performances serait vraiment quelque chose d’énorme ! Mais je pense d’abord à faire mes gammes chez les pros avant d’arriver sur le Tour de France.
As-tu déjà une idée du programme qui t’attend l’an prochain ?
J’ai déjà eu le programme prévisionnel, mais je dois attendre de savoir si nous sommes en WorldTour ou non pour ensuite définir mon programme complet. Effectivement, mon souhait pour 2013 serait de faire un Grand Tour. On verra tout cela avec l’équipe lors des premiers stages.
Dans le futur, quelles courses rêverais-tu de remporter ?
Mon rêve serait de remporter une étape sur le Tour de France ou une grande classique comme Liège-Bastogne-Liège ! Je ne sais pas si j’en aurai les capacités, mais en tout cas je vais vraiment me donner les moyens de réaliser mes rêves.
Quels sont réellement tes points forts sur un vélo ?
Je suis un puncheur, et je me débrouille plutôt bien au sprint en arrivée en petit groupe. J’aime bien frotter. Mes atouts, s’agissant des courses par étapes, sont que je suis un pur grimpeur et que j’encaisse bien les jours de course. Chez les pros, j’aimerais bien être à la fois un puncheur et un coureur de Grands Tours, mais ce n’est pas si facile que cela ! De toute façon, on verra bien comment je progresse dans les années qui arrivent dans ces deux domaines-là pour ensuite voir où j’aurai les meilleures chances de réussir.
Comment se sont passés tes premiers pas avec ta future équipe Argos-Shimano ?
Je me suis très bien intégré à l’équipe, malgré la barrière de la langue. J’ai vraiment été impressionné par le décor du monde professionnel : arriver avec le gros bus au départ, pouvoir prendre une douche et manger des pâtes dès l’arrivée, c’est vraiment le luxe ! J’ai été vraiment impressionné par tout ce que j’ai vu. Et puis se retrouver à côté de coureurs comme Tom Boonen, Alberto Contador, Vincenzo Nibali ou Ivan Basso, ça fait vraiment bizarre, car avant je les regardais à la télé…
John Degenkolb, ton futur coéquipier, n’a pas tari d’éloges à ton égard. C’est une fierté ?
C’est sûr, je suis super content de ces éloges. John, c’est vraiment un chic type ! Après Paris-Tours, j’étais sur le chemin qui me conduisait au bus et il m’a vu, s’est arrêté pour me saluer et pour savoir le résultat que j’avais fait, c’était cool de sa part !
N’as-tu pas peur d’être un peu isolé dans cette équipe Argos-Shimano qui favorise plutôt les sprinteurs ?
Non, je n’ai pas du tout peur de cela. Alors, c’est vrai, il y a deux sprinteurs-phares dans l’équipe, John Degenkolb et Marcel Kittel, mais si la course est dure et qu’elle n’arrive pas au sprint, l’équipe laisse la carte à ses puncheurs-grimpeurs. Donc forcément, à un moment ou l’autre, j’aurai ma chance. Et puis l’équipe a décidé de recruter des grimpeurs comme Georg Preidler ou Reinardt Janse-Van Rensburg, donc c’est qu’elle a aussi envie de réaliser de bonnes performances ailleurs que sur les sprints ! L’équipe est composée de très bons coureurs, je pense que je vais y être très bien.
Toi qui t’apprêtes à intégrer le monde professionnel, comment interprètes-tu les problèmes que connaît le cyclisme ?
Personnellement, toutes ces révélations ne me découragent pas, bien au contraire, car je pense que désormais le cyclisme va être plus propre. C’est ce que j’espère en tout cas !
Selon toi, quelles seraient les solutions adéquates pour que le cyclisme se débarrasse pour de bon de tous ses démons ?
Pour moi c’est simple, il faut alourdir les peines ! Deux ans de suspension ce n’est pas assez. Je pense que si la personne est contrôlée positive, il faut qu’elle se voie infliger une suspension à vie et une très grosse amende ! Il n’y a que cette méthode-là qui permettrait de faire réfléchir les tricheurs, et surtout de stopper toute envie de dopage. Je pense aussi qu’il serait bien de faire les mêmes contrôles dans tous les autres sports, car nous ne sommes pas égaux par rapport aux autres sportifs.
Le vélo chez les Barguil, c’est une histoire de famille ?
Oui, c’est vraiment ça. Je suis venu au vélo grâce à mon père, qui a couru en 1ère catégorie. J’ai fait plusieurs sports auparavant. J’ai commencé par le BMX avant de démarrer le vélo sur route en Cadets.
Propos recueillis par Alexis Rose le 6 novembre 2012.