Sébastien, tu as intégré le CREPS de Poitiers en formation DEJEPS, pourquoi cette démarche ?
Fin 2011, après la trêve hivernale, un directeur sportif du SCO Dijon est parti au sein de La Pomme et son poste n’a pas été pourvu pour la saison 2012. Mon club souhaitait intégrer un deuxième DS mais possédant une expérience de coureur de haut-niveau, un coureur Elite ayant de l’expérience. De mon côté, j’ai mis un terme à ma carrière récemment et je souhaite rester dans le milieu cycliste pour ma reconversion. Je suis donc cette formation DEJEPS pour m’investir au sein de la DN1 du SCO Dijon, conformément à la réglementation FFC. Cette formation me sera bénéfique, je vais acquérir des compétences sur l’entraînement et la pédagogie auprès des coureurs. Je remercie le SCOD pour sa confiance en moi car je m’oriente vers un poste à responsabilité au sein de cette structure dans laquelle je n’évolue que depuis deux saisons. J’espère être à la hauteur de cette confiance !
Tu as donc mis un terme à ta carrière de coureur Elite…
J’ai 32 ans, j’ai deux jeunes enfants et je souhaite passer plus de temps auprès des miens. Cela fait dix saisons que j’évolue en 1ère catégorie FFC, j’ai fait le tour de la question, même si je ne ressens pas de lassitude physique. Je ne voulais pas faire l’année de trop, j’arrête en ayant encore le niveau pour gagner des courses Elites. C’est important pour moi.
Comment es-tu venu au cyclisme ?
J’ai pratiqué le football de 7 à 14 ans, mais l’ambiance m’a déçu. On est trop dépendant du collectif. Mon père est un cycliste, j’ai commencé le vélo avec lui en me licenciant au VC Ornans en 1994 en Minimes. J’ai disputé ma première course le 1er mai 1994, le jour du décès d’Ayrton Senna…
Quel regard portes-tu sur ta carrière ?
J’estime avoir réalisé une belle carrière amateur, même si je n’ai jamais gagné quinze courses Elites sur une saison comme ont pu le faire des coureurs de la trempe de Benoît Luminet, Samuel Plouhinec ou Jérémie Dérangére. Durant mes douze années à haut-niveau, j’ai évolué au CC Etupes puis au SCO Dijon. J’ai eu le plaisir de remporter de belles courses, de belles classiques du calendrier national à l’image de Troyes-Dijon en 2011 et Annemasse-Bellegarde-Annemasse à deux reprises en 2006 et 2008. Et aussi une étape du Rhône-Alpes Isère Tour en 2006 et du Tour de Guadeloupe en 2012. J’ai terminé 3ème du Tour du Gévaudan en 2009 et 8ème du Championnat de France amateur en 2004. J’ai remporté à trois reprises la Coupe de France des clubs avec le CC Etupes.
Tu n’as aucune déception ?
Non, j’eu la chance de ne pas chuter violement, je n’ai rien de cassé. Mon seul regret est de ne pas avoir rencontré plutôt Julien Pinot, mon entraîneur actuel, et bénéficié de ses plans d’entraînement quand j’étais plus jeune. Vu ma progression durant notre collaboration, j’aurais peut-être eu l’opportunité de passer professionnel. Je n’ai jamais utilisé de capteurs de puissance pour optimiser mes entraînements et Julien Pinot a su s’adapter pour me faire progresser malgré ce choix.
En douze saisons au sein de grosses structures DN1 françaises, quelles sont les principales évolutions qui t’ont marqué dans le cyclisme amateur ?
J’ai connu la période des oreillettes chez les amateurs puis leur retrait. Au CC Etupes nous les utilisions régulièrement. Personnellement je plaide en leur faveur pour leur intérêt en sécurité et l’apport du DS sur les aspects tactiques en pleine course. Il faut souligner que les effectifs des DN1 se sont largement rajeunis. A présent les coureurs Elites font du vélo jusqu’à 25/26 ans et s’ils ne passent pas pros ils se reconvertissent. Des coureurs à mon image qui poursuivent une carrière amateur à haut-niveau au-delà de 30 ans et qui parviennent à gagner leur vie financière, il n’y en a plus beaucoup. C’était une autre époque.
Laquelle était la mieux ?
Je ne sais pas, les mafias du vélo ont toujours existé et malheureusement le dopage a toujours été présent dans notre sport, même au niveau amateur. Les techniques d’entraînement ont largement évolué. Au début de ma carrière, il y avait peu de coureurs qui pouvaient gagner des courses et qui bénéficiaient de méthodes d’entraînement avancées, réfléchies, avant-gardistes… A présent, beaucoup de coureurs bénéficient des évolutions des méthodes d’entraînement, de leur optimisation. Le niveau s’est élevé mais aussi homogénéisé.
Au niveau international, quel regard as-tu porté sur le dernier Tour de France ?
J’ai regardé le Tour 2012. Les Sky ont développé une nouvelle approche du cyclisme, une stratégie peu spectaculaire mais performante. Lance Armstrong et l’US Postal avaient déjà posé les jalons de cette méthode, les Anglais l’ont optimisée en étouffant leurs adversaires directs. Même un grimpeur comme Contador n’aurait pas pu s’exprimer, les Sky seraient rentrés au train.
Que penses-tu des affaires à répétition ?
Je ne sais plus trop quoi en penser, ça m’attriste. J’aime mon sport mais j’ai l’impression de ne pas pratiquer le même sport qu’eux ! J’ai beaucoup d’amertume vis-à-vis des trop faibles sanctions prises à l’encontre des coureurs épinglés par les contrôles antidopage et envers les journalistes qui sont trop candides et encensent des coureurs sulfureux. Je pense que beaucoup d’enjeux nous dépassent, au-delà du domaine sportif. L’affaire Contador est une démonstration de la force politique. On est vraiment dans l’ère du sport-business !
Dans les années à venir souhaites-tu t’investir dans le haut-niveau ou auprès de jeunes cyclistes avec qui tu partageras ton expérience et ta vision du vélo ?
Pour le moment je m’oriente plus vers le haut-niveau amateur, ce que je connais le mieux. J’espère vivre de belles émotions dans mon futur rôle de directeur sportif au sein du SCO Dijon.
Propos recueillis par Jean-Baptiste Trauchessec le 18 octobre 2012.