Jérémy, avec Lilian Calmejane, Romain Cardis et Fabien Grellier, tu fais partie des quatre coureurs issus du Vendée U à passer pro dans l’équipe Direct Energie la saison prochaine. Que représente pour toi cette opportunité ?
J’ai commencé le vélo à neuf ans. Quand on est jeune et que l’on voit les pros à la télé, c’est ce qui nous donne l’envie de commencer. Quand j’ai atterri au Vendée U, j’y ai pensé encore plus puisque j’intégrais la réserve. J’ai connu quatre premières années un peu compliquées faites de hauts et de bas. Je sentais que j’étais capable de passer le cran au-dessus, mais je n’arrivais pas à être régulier. J’ai connu quelques soucis de santé, au niveau d’allergies, de problèmes de dos, etc. J’ai mis du temps à régler tout cela. Cette année, j’ai réalisé ma plus belle saison depuis que je fais du vélo. Passer pro, c’est l’aboutissement d’un projet mené sur le très long terme. C’est un rêve de gosse. On va travailler pour être performant et pouvoir participer à toutes les courses les plus prestigieuses, comme Liège, Roubaix, le Tour de France. J’ai envie de découvrir tout ce qui peut se faire et voir dans quel registre je vais pouvoir me placer.
Pour combien de temps as-tu signé ?
J’ai signé un contrat de deux ans jusqu’en 2017. Aucune date n’a été fournie par Direct Energie pour la durée du partenariat, mais ils nous ont dit que s’ils voulaient s’engager, c’était plutôt sur le long terme. On espère que ça va durer le plus longtemps possible. Tout le monde serait d’accord pour que ce partenaire s’inscrive dans la durée, surtout Jean-René Bernaudeau. Ce serait un confort pour construire quelque chose de plus stable pour lui. On devrait partir dans le même registre qu’Europcar en étant en Continentale Pro dans un premier temps avant d’envisager une évolution au fil des années. Sur l’effectif, il y aura quatre piliers. Pour le reste, on est beaucoup à découvrir. D’autres doivent encore passer un cap. La deuxième division nous permettra de bien progresser.
Au Vendée U, on t’a souvent connu dans un rôle d’équipier tout en pouvant jouer ta carte à certaines occasions. Est-ce ce qui a séduit Jean-René Bernaudeau ?
Oui, Jean-René me connaît bien depuis le temps que je suis dans l’équipe. J’ai vécu mes deux premières années au manoir aux Essarts et je suis régulièrement là-bas. J’ai plus la faculté d’être un bon équipier que le leader. J’ai été plus habitué dans ce rôle-là. Depuis deux ans, je suis un peu plus souvent leader. Je me doute que dans un premier temps, chez Direct Energie, j’aurai un rôle d’équipier. L’équipe tournera beaucoup autour de Bryan Coquard. Je me sens prêt à sacrifier toutes mes chances personnelles pour le bien de l’équipe, mais si j’ai ma chance, je serai prêt à la saisir.
En plus des trois autres coureurs qui passent pro avec toi, tu as côtoyé une bonne moitié de l’effectif professionnel actuel au cours de tes six ans au Vendée U. Est-ce un avantage pour mieux appréhender le monde professionnel ?
Oui je connaîtrai une bonne partie des coureurs, en particulier celui qui sera l’axe de l’équipe Bryan Coquard. J’ai couru pendant deux ans avec lui chez les amateurs. Angelo Tulik, Jérôme Cousin, Tony Hurel, j’ai connu ces coureurs-là ! S’intégrer dans cette équipe, ça devrait se faire assez facilement et assez naturellement. Nos deux capitaines de route Sylvain Chavanel et Thomas Voeckler vont nous faire apprendre très vite. On aura de vrais leaders à nos côtés. Jean-René voulait que l’on apporte de la fraîcheur. Nous serons sept jeunes si l’on compte les trois néo-pros de l’an dernier, Thomas Boudat, Julien Morice et Guillaume Thévenot. Avec l’expérience et la force des anciens, mêlés à notre fougue et notre envie, ça devrait faire un beau mélange.
Cela veut-il dire que vous aurez votre chance rapidement ?
Nous ne connaissons pas encore le programme de courses que nous aurons. D’après ce que Jean-René nous a dit, il comptera sur nous sur les courses de début de saison, sur les Classes 1 et les Coupes de France. Vu le niveau que l’on a affiché en Classe 2 cette année, nous aurons notre chance. On sera tous prêts à montrer ce que l’on vaut et à se battre le jour où les piliers de l’équipe ne seront pas là. Bien sûr, cela ne nous empêchera pas de nous mettre à leur service sur les grosses courses.
Dans le cas où l’équipe professionnelle n’aurait pas trouvé de repreneur, aurais-tu continué chez les amateurs en 2016 ? Était-ce l’année ou jamais pour passer pro ?
L’année ou jamais, j’en avais déjà parlé il y a un ou deux ans. Les circonstances ont fait que j’ai poursuivi. Jean-René m’a dit de lui faire confiance, de rempiler pour un an et que ce serait la bonne. Dans le cas où l’équipe ne repartait pas, je ne pense pas que j’aurais trouvé la motivation pour repartir au plus haut niveau amateur. Je pense avoir fait le tour. Si on regarde mes résultats cette année, j’ai été plus performant sur les courses de Classe 2 qu’en Elite Nationale. L’équipe n’aurait pas eu d’intérêt à me garder. Ma formation était finie. Si ce n’était pas Europcar, j’aurais peut-être tenté dans d’autres équipes et si ça n’avait pas abouti, j’aurais été obligé de tourner la page.
Quand as-tu été informé de ce passage chez les pros ?
La rumeur circulait déjà pour nous quatre depuis le Championnat de France. Nous étions confiants, mais tant que le sponsor n’était pas là, nous n’étions sûrs de rien. Nous avons appris que le sponsor avait signé juste avant la finale de la Coupe de France à la Classique Champagne-Ardenne.
Forcément, cela t’a complètement libéré…
Oui, ça a été un gros soulagement pour moi. Depuis j’ai pas mal enchaîné de bons résultats. Je suis décomplexé. On sait ce que l’on va devenir l’an prochain et ce n’est pas rien. Je ne suis pas plus fort physiquement. Je le suis même sans doute un peu moins qu’au tout début de la saison au Tour de Normandie et au Triptyque des Monts et Châteaux où j’ai marché. Cette saison, je savais qu’il ne fallait pas que je me loupe. C’était ma sixième année chez les amateurs. Il fallait confirmer et être performant. Il m’a souvent manqué le déclic ou le petit brin de confiance dans le final. Je l’ai récupéré et c’est pour cela que tout me sourit en ce moment.
Pourtant, en plein été, le Vendée U a connu un petit passage à vide. Comment l’expliques-tu ?
Depuis que je suis au Vendée U, ça a souvent été le cas. Le mois de juillet, c’est un mois assez vide pour l’équipe. On est moins performants puisqu’on a un gros calendrier dès le début de saison avec beaucoup de jours de course. Les piliers de l’équipe ont eu besoin de souffler après les Championnats de France, on a tous un peu coupé, on est revenu un peu moins en forme. Quand ceux qui doivent influer sur la dynamique du groupe ne sont plus forcément dedans, ça impacte sur tout le groupe. Cette année, beaucoup de coureurs, moi y compris, ont eu du mal à diriger l’échec des France. Qu’il soit individuel ou collectif. J’ai mis un gros mois à rebondir. Il m’aura fallu le Kreiz Breizh Elites pour me remotiver et me remettre dans le droit chemin.
Après avoir remporté coup sur coup le GP de Lorient Agglo et le Tour de Seine-Maritime, as-tu des vues sur les dernières épreuves de la saison ?
Ma saison est déjà pleinement réussie. J’ai signé pas mal de résultats, j’ai remporté une belle classique et une course par étapes. Il reste quelques belles courses en fin de saison. Mais, maintenant que j’ai mon contrat, je prendrai plus de plaisir à faire gagner un coéquipier qui m’a bien aidé cette année que de gagner personnellement. Si je peux jouer la carte du collectif comme je l’ai fait régulièrement, ça ne me dérangera pas.
Propos recueillis le 18 septembre 2015.