Damien, tu participais la semaine dernière au Tour de la Provence avec l’équipe de France Espoirs. Que garderas-tu de cette expérience ?
En débarquant dans le peloton pro, nous avions tous un peu peurs de ne pas être dans le rythme. Nous avions moins de jours de course qu’eux et forcément moins d’expérience. En outre les étapes n’étaient pas faciles. Or au fil des jours nous avons pris conscience que nous n’avions pas à rougir de nos prestations. Chez les pros, c’est un autre schéma de course, et nous avons pris beaucoup d’expérience à courir trois jours à leur côtés. Nous avons vu que nous n’étions pas si mal que cela, que nous étions capables de nous accrocher, de faire la course, et même d’aller faire le sprint comme ce fut le cas à Istres.
Sprint dans lequel tu es allé chercher une 7ème place qui a retenu l’attention…
C’était un sprint compliqué dans son approche car en portant les couleurs de l’équipe de France Espoirs, nous n’avions pas trop notre place aux avant-postes aux yeux des pros. Faire notre place n’a pas été facile au début. Mais nous nous sommes imposés, on ne s’est pas laissé faire, et dès lors ils ont arrêté de nous embêter. C’était la première course de l’équipe de France, nous n’avons pas de train comme certaines équipes pros, et nous avons eu un peu de mal à nous trouver dans ce final compliqué par de nombreux virages. Se retrouver au milieu de cinquante mecs à 60 à l’heure, ça avait aussi de quoi intimider. C’est sûr qu’on a bouffé plus de vent que les autres avant même le sprint.
On l’a senti au cours de ces trois jours de course : l’équipe de France Espoirs ne nourrit aucun complexe. Comment traduis-tu son état d’esprit ?
Au moment des consignes, on nous avait bien rappelé que certes c’étaient des pros, mais qu’il ne fallait pas non plus en avoir peur et se laisser faire. Il y avait un sprint à disputer à Istres, on courait pour la gagne. Frotter aux pros, ça faisait partie du jeu. A condition bien sûr de faire ça proprement. A Marseille, Nans Peters a lui aussi attaqué à 4 bornes de l’arrivée. On est vraiment arrivés sur cette course sans complexes. On était venus pour s’éclater et c’est ce qu’on a fait.
Pour s’éclater et créer des automatismes…
Au cours des stages réalisés au préalable, il nous avait été difficile de faire des schémas de course. Quand nous nous entraînons au sprint, il n’y a devant nous que les coureurs qui emmènent. On n’a pas à jouer des coudes avec des adversaires. En course, c’est complètement différent. Dès le début du Tour de la Provence, on a bien su courir groupés, remonter ensemble, nous placer au pied des bosses. Mais nous avons encore un peu de mal à emmener un mec dans le final car nous ne nous connaissons pas encore à 100 %. Ces automatismes, ils vont venir en course.
Tu avais déjà couru le Tour d’Alsace avec un peloton de niveau supérieur en 2015. Que t’enseignent ces rendez-vous ?
Ce sont des expériences enrichissantes qui nous montrent également le chemin qu’il nous reste à parcourir pour passer peut-être un jour chez les pros. Courir aux côtés des pros, c’est prendre de l’expérience. On ne fait pas que les regarder, on parle avec, on écoute les conseils qu’ils nous donnent. Et puis ça nous met aussi en condition ! Trois jours comme ça au mois de février, pour la forme, c’est super. Ça aide à marcher et c’est une source de motivation pour la suite de la saison. Quand tu cours à côté d’un Talansky ou d’un Voeckler, ça te booste !
Le sprint, c’est ton domaine de prédilection ?
Disons que je tire mon épingle du jeu des sprints d’usure. Il faut qu’il y ait eu de la course avant, que le circuit soit relativement dur et que quelques sprinteurs aient déjà été éliminés. Comme ça avait été le cas l’an passé au Tour d’Alsace quand j’étais allé faire un Top 10 (9ème à Sélestat) : il y avait eu de la bosse avant, et les sprinteurs étaient un peu usés.
Comment travailles-tu cette qualité ?
L’année dernière, j’avais privilégié les bosses, un domaine dans lequel j’avais envie de progresser pour mieux les passer. Maintenant que j’ai validé cet acquis, je me concentre à fond sur mes qualités de vitesse au sprint et de puncheur. Ça passe par la muscu, des séances de lactique, des séances de scooteur avec des sprints… Je suis entraîné par Nicolas Boisson, qui me suit depuis les Cadets. On s’entend bien et il me connaît par cœur. Nous avons une très bonne relation entraîneur-entraîné. Quand ça marche comme ça c’est génial.
Tu es originaire du Neubourg, dans l’Eure. Pourquoi avoir fait le choix du CC Etupes ?
Mon entraîneur étant de Franche-Comté, ce rapprochement a facilité mes entraînements. On se voit davantage. Etupes est un club familial qui m’a plu tout de suite. Je bénéficie des appartements du club. Je peux y être toute l’année si je le souhaite. Mais je fais l’hiver chez moi en Normandie pour ne m’installer à Etupes qu’au début de la saison. Selon mon programme, il m’arrive de rentrer en Normandie toutes les deux, trois semaines. En outre je bénéficie en Franche-Comté de la proximité des cols. Ça me permet de monter davantage de bosses qu’en Normandie.
Tu as choisi de te consacrer au vélo après l’obtention d’un bac pro l’année dernière, comment s’organisent tes semaines d’une course à l’autre ?
Je cours le week-end, donc souvent le lundi est consacré à la récupération. Le mardi, je fais une séance d’intensité sur deux heures et demie, trois heures. Le mercredi, c’est ma grande sortie de quatre heures et demie. Le jeudi, je fais un peu de récup avant de remettre un peu d’intensité le vendredi pour faire un petit déblocage. Et la veille de course, je roule tranquille avec un tout petit rappel d’intensité. Selon l’état de fatigue, il m’arrive aussi d’inclure un jour de repos le jeudi.
Quelles sont les dates qui sont cochées sur ton agenda pour les mois à venir ?
Ce sont plutôt les classiques. Les courses importantes vont donc commencer à arriver. J’espère être sélectionné en équipe de France pour aller faire des classiques comme le Tour des Flandres Espoirs. Ensuite, il y a un certain nombre de Coupes de France qui me conviennent bien cette année. Je pense aussi à Paris-Roubaix Espoirs fin mai, une course de guerrier que j’aime beaucoup et que je vais tâcher de préparer au mieux. Et puis il y aura les Championnats de France à Vesoul fin juin.
Propos recueillis le 4 mars 2016.