Christophe, redescendu dans les rangs amateurs l’an passé, tu devais être le capitaine de route du Charvieu-Chavagneux IC en 2011. Or tu as mis un terme à l’amiable à ton contrat, pour quelles raisons ?
J’avais prévu d’arrêter en fin de saison, mais j’avais de plus en plus de difficultés à trouver la motivation pour partir en course et même à l’entraînement. De plus, j’ai eu une opportunité professionnelle qui m’a fait beaucoup réfléchir. Du coup la tête n’y était plus et ça a joué sur mes performances, je n’étais pas à la hauteur de mes ambitions ni de celles attendues par l’équipe. J’ai préféré en discuter avec mes dirigeants qui ont très bien compris ma situation, d’ailleurs je les en remercie.
En vingt ans de vélo, quel sont tes meilleurs souvenirs ?
Mes meilleurs souvenirs restent mes deux Tours de France. Terminer le premier a été un bonheur après tant de souffrances. Je garde également de très bons souvenirs de mes performances : mon échappée sur le Tour 2006, mes Maillots à Pois, mon combat contre Moncoutié sur Paris-Nice 2006, le Tour de Californie et ma victoire sur le Rhône-Alpes Isère Tour en 2009. Ma dernière année amateur en 2001 à Supersport 23-La Creuse reste aussi un beau souvenir avec une cerise sur le gâteau : cette année-là j’ai porté le maillot de l’équipe de France sur le Tour du Limousin. En fait j’ai trop de bons souvenirs.
Et a contrario les plus mauvais ?
Mon plus mauvais souvenir reste la non sélection de l’équipe Agritubel au Tour de France 2005. C’était injuste, d’autant plus que je devais y participer et que cette année-là il y avait une arrivée à Mende, ma ville natale. Ensuite, ma chute au Tour de Picardie 2009 reste un mauvais souvenir, surtout qu’elle m’a privé de Tour de France quelques semaines après. Mais globalement je n’ai pas beaucoup de mauvais souvenirs.
Ressent-on un peu de lassitude après vingt ans de carrière et la difficulté de concilier famille et sport de haut-niveau avec les sacrifices que cela implique ?
Pour ma part je n’avais plus envie de manquer des événements familiaux. L’arrivée de ma fille a été un élément déclencheur. Mes points d’intérêt ont changé. J’avais fait le tour de mes envies dans le cyclisme, j’ai envie de voir autre chose maintenant, on peut donc dire que c’est de la lassitude.
Tu bénéficies d’une grande notoriété sportive en Lozère. Envisages-tu de t’investir auprès des jeunes via le Centre Omnisport Lozère, les clubs ou le comité départemental ?
Je suis déjà en collaboration avec le Centre Omnisport Lozère et son directeur, qui me sollicite parfois pour des conseils. Il sait que je suis à sa disposition. Concernant le comité départemental de cyclisme, je ne vis plus en Lozère mais je reste disponible si on a besoin de moi.
Le comité Languedoc-Roussillon possède de jeunes talents qui ont tendance à s’expatrier dans des comités voisins pour évoluer. Envisages-tu de t’investir auprès de cette structure ou d’un club formateur régional pour endiguer cet exode ?
Ca a toujours été le problème dans ce comité et c’est bien dommage. Avec Stéphane Goubert, on en parle souvent. On aimerait trouver une solution à cet exode. Le premier constat est qu’il manque un grand club dans le région, mais comment le créer ? Avec quel budget ? Il faut beaucoup de temps pour mettre une structure en place et malheureusement en ce moment ni Stéphane ni moi ne pouvons nous y pencher sérieusement. Mais pourquoi pas un jour si l’occasion se présente.
Tu es passé pro au sein de l’équipe Jean Delatour en 2002. Après neuf saisons consacrées au vélo, comment vois-tu ta reconversion professionnelle ?
Avant de passer pro, j’ai fait des études afin de devenir professeur de sport. Cet hiver j’ai enseigné deux mois dans un collègue afin de préparer ma reconversion. L’expérience n’a pas été très concluante, même si j’étudie une nouvelle proposition. J’aimerais néanmoins me reconvertir dans l’immobilier, c’est un domaine qui me passionne depuis longtemps. Le sport, j’aimerais que ça redevienne une passion mais plus mon métier.
Avec ton ami Benoît Malaval, tu as remis sur pied le Tour du Gévaudan, qui prend du grade au fil des ans. Vas-tu t’investir davantage dans son évolution ?
Je ne sais pas encore, nous n’en avons pas parlé. J’ai pris un peu de distance ces dernières années car je n’avais pas beaucoup de temps à y consacrer. Benoît s’est bien débrouillé, il sait que s’il a besoin de moi je peux me rendre plus disponible mais ça dépendra de ma nouvelle organisation professionnelle.
Comment juges-tu sur le quadruplé ardennais du Belge Philippe Gilbert ?
Impressionnant, j’ai connu Philippe Gilbert quand il était à la Française des Jeux, il était déjà très fort, capable de grand numéro mais là, il a véritablement passé un énorme palier depuis qu’il est en Belgique. Il donne une impression de facilité et de force incroyable. Il est à maturité sportive.
Quel regard portes tu sur un coureur tel que Freddy Bichot, pro jusqu’en 2010 mais qui évolue à présent chez Véranda Rideau Sarthe et qui enregistre de nombreuses victoires en ce début d’année?
Freddy est une personne que j’aime beaucoup, je le connais bien et je savais qu’il serait très performant cette saison. Je ne comprends pas qu’une équipe pro ne l’ait pas conservé. C’est un excellent coureur. Dans sa tête, il n’est pas redescendu amateur, il a l’intention de rebondir très vite et de retrouver sa place chez les pros. C’est tout le mal que je lui souhaite. C’est la grosse différence avec moi qui n’avait aucune envie réelle d’y repasser.
Tu comptes pratiquer des raids sportifs comme le Gévaudathlon. Qu’est-ce qui t’attire ?
J’ai la passion du sport, de l’effort, des défis. Les raids sont ludiques et très diversifiés, j’ai envie de découvrir de nouvelles épreuves et pas me cloisonner sur une seule activité. Ça fait longtemps que j’y pense mais ce n’était pas compatible avec le cyclisme de haut-niveau.
Tu as pratiqué le VTT de nombreuses années. Une fin de carrière en VTT ne t’a pas tenté ?
Si, bien sûr que j’y ai pensé, d’ailleurs je pense que si je dois remettre un dossard ce sera en VTT, mais mon choix d’arrêter ne porte pas sur le cyclisme sur route, mais sur ma façon de vivre. L’entraînement, les déplacements, la pression, la performance et les sacrifices sont les mêmes en VTT qu’en route. C’est de tout cela que je n’ai plus envie !
Propos recueillis par Jean-Baptiste Trauchessec.