Bonjour Kevin, vous avez commencé le métier de la mécanique à partir de quel âge ?
Je m’y suis vraiment mis professionnellement vers 24-25 ans. J’ai été coureur cycliste et j’ai toujours travaillé sur mes vélos, c’est quelque chose qui me passionnait et j’ai décidé d’en faire mon métier.
Depuis que vous êtes dans ce métier, vous avez vu des améliorations comme les freins à disques ou encore l’électronique. Quelle est l’évolution technique qui vous inspire le plus ?
L’électronique, c’est vraiment quelque chose de pas mal. Il y a une évolution constante, des mises à jour… Maintenant, les freins à disque sur la route, c’est une nouvelle technologie encore en évolution et c’est de bonne augure pour le futur.
Vous pensez que le disque va être adopté par tout le peloton sous quel délai ?
Je pense qu’on y arrive tout doucement. À mon avis dans 2 ans, tout le peloton y sera. Je pense que le plus gros problème pour les coureurs, c’est le poids. Maintenant, on arrive à des vélos à 6 ou 8kg avec des freins à disques donc je pense qu’on va y arriver tout doucement.
Quel est le côté le plus passionnant de votre métier ?
Un peu de tout. On visite le monde entier, on travaille sur de beaux vélos, on travaille pour des champions… Franchement, j’ai pas de point plus passionnant qu’un autre, c’est le métier en lui même qui est passionnant.
Est-ce qu’il y a un côté plus désagréable dans ce métier ?
Oui, le fait d’être souvent parti de la maison. La vie familiale, ça nous manque un peu, mais ça fait partie du métier donc on ne va pas se plaindre, mais si on pouvait avoir un peu plus de vie de famille, ça serait peut être un peu plus agréable.
Wanty-Gobert sur le chrono par équipe du Tour | © Sirotti
Vous êtes sur le Tour de France, c’est un rêve pour beaucoup de gens. Quand vous travaillez à l’hôtel le soir, il y a beaucoup de supporters qui viennent vous voir. Le fait d’être mis sous les projecteurs comme cela vous dérange-t-il ?
Ça dépend un peu des personnes. C’est toujours agréable d’avoir des gens qui nous posent des questions et qui sont vraiment passionnés. Entre passionnés, c’est vraiment une relation agréable, mais c’est très rare d’avoir des gens embêtants.
Quel est le coureur le plus méticuleux au niveau du matériel que vous ayez déjà croisé ?
Victor Campenaerts. C’est vraiment au niveau aérodynamique. Le vélo devrait être réglé comme une horloge et on doit être à 200 % là-dessus.
Justement, vous diriez que les coureurs les plus méticuleux sont d’avantage des grimpeurs, des sprinters, des puncheurs, ou des rouleurs ?
Au niveau matériel, c’est plus les coureurs de contre-la-montre.
Vous suivez ce que font les concurrents de vos partenaires ?
Pas vraiment, j’ai mes idées, j’ai mes techniques. Maintenant, j’aime en apprendre tous les jours, donc évidemment, je suis à l’écoute, je regarde, c’est vrai que c’est toujours intéressant de regarder le travail de quelqu’un d’autre.
Il y a une certaine stabilité au niveau des partenaires de Wanty-Gobert. L’arrivée d’un nouveau partenaire est, pour vous, un plus ou une remise en question ?
Un plus, certainement. C’est évidemment un moment d’adaptation. Quand on est habitué à travailler d’une façon et que d’un coup, il faut changer sa manière de travailler, ça demande un certain moment d’adaptation, mais ça va.
Guillaume Martin plus que remarquable | © PhotoNews
On sait que Guillaume Martin fait partie des favoris sur les étapes accidentées. Vous, vous serez où sur ces étapes-là ?
On sera dans la voiture. Certainement un peu stressé, mais surtout là pour le supporter. C’est un mec très sympa, il nous rend toujours la pareille donc on sera bien là pour le supporter.
On voit maintenant beaucoup de coureurs qui communiquent avec leurs mécanos via les réseaux sociaux. Comment est-ce que vous préférez la relation avec vos coureurs ?
C’est toujours la relation humaine qui prime. C’est plus agréable, mais on peut comprendre aussi qu’ils n’ont pas toujours le temps de passer au camion nous voir donc ils envoient des messages, c’est inévitable.
On parle du 13 vitesses ou encore du mono-plateau. Vous pensez que l’évolution technique va être dans quel domaine dans les années à venir ?
C’est difficile à dire. Nous, ici, on est chez Shimano donc les mono-plateaux sur la route, on en parle pas encore, mais j’imagine qu’il y a du pour et du contre partout et chaque marque a un petit peu étudié la question, mais pour ma part je pense que le double plateau est primordial. Maintenant, qu’il y ait 11, 12 ou 13 vitesses, je ne pense pas que ça va changer énormément, mais pour moi, le double plateau devrait rester en compétition professionnelle.
On voit de plus en plus d’équipes professionnelles créer leur équipe féminine, est ce que vous vous verriez mécano dans une équipe féminine ?
Éventuellement. J’ai travaillé énormément pour les femmes lorsque j’étais dans l’équipe nationale. C’est une approche tout à fait différente par rapport aux hommes, mais elles font le job comme les hommes donc oui pourquoi pas.
Mécanicien Wanty Gobert 2 | ©
En quoi est-ce que leur approche est différente ?
Le caractère d’une femme au niveau sportif est différent. Elles sont un peu plus remerciables que les hommes et à ce niveau-là, je trouve que c’est agréable. Naturellement, l’approche humaine est différente.
Au niveau technique, elles vous font des retours de la même qualité que les hommes ?
Les hommes sont un peu plus méticuleux et poussent un peu plus dans la technologie que les femmes. Certaines femmes sont très méticuleuses, mais un peu moins que les hommes.
Vous voyez comment votre métier dans 10 ans ?
Difficile à dire. J’espère encore faire de nombreuses fois le Tour de France et j’espère être encore ici dans 10 ans.
Toujours avec les mêmes partenaires ?
Pourquoi pas, aujourd’hui, je travaille pour Wanty, on verra demain.
On a vu sur le contre-la-montre du dernier Giro, l’importance des mécanos comme vous. Est-ce que vous vous voyez progresser encore au niveau de la rapidité d’intervention un peu comme en formule 1 ?
Oui, c’est important. Dans le passé, si vous vous rappelez le championnat du monde à Bergen, on a aussi dû faire des changements de vélos, mais en compétition, c’est pas toujours la même chose que hors compétition, avec le stress, la pression… Je me rappelle que mon changement avec Victor à Bergen n’était pas aussi efficace qu’à l’entraînement et, même si il ne faut pas avoir de problème mécanique, je pense que c’est quand même ça qui nous fait progresser.
Au niveau du classement World Tour Matériel 101, aucun changement n’est à noter après le magnifique Tour de France de Julian Alaphilippe et ses coéquipiers de la Deceuninck-Quick Step équipés par Specialized, Shimano et Roval.
Le podium World Tour Matériel 101 | © Vélo 101
Par Nathan Malo