Une dernière fois ce matin, le soleil s’extirpe de la mer Méditerranée pour venir se hisser tel un projecteur naturel au-dessus du Var, de son littoral et de ses collines sauvages. Le Roc d’Azur touche à sa fin avec la course mythique autour de laquelle se sont déclinés une grosse vingtaine d’épreuves et de randonnées, un incontournable salon du cycle et des animations époustouflantes. C’est l’heure de la classique éponyme. Celle qui intervient en conclusion d’une longue et intense saison olympique et que seuls quelques-uns ont eu l’audace de cocher parmi leurs objectifs. En quête d’une belle sortie sous les couleurs d’Orbea, Julien Absalon aurait pu être de ceux-là, mais il misera sur le plaisir avant tout, et c’est déjà un vrai plaisir que de le revoir sur la première ligne du Roc, sur laquelle ne manqueront au fond que Jaroslav Kulhavy et Nino Schurter.
Par un temps splendide, le vrombissement de l’hélicoptère annonce à 9h30 le départ de la première vague. Au coup de pistolet, voilà le peloton des cadors qui fend l’air frisquet en direction du massif des Maures et de ses sites traditionnels. Le passage au Fournel est le premier lieu incontournable, c’est là aussi que se dessine un premier groupe de leaders. Par tradition, le vainqueur se trouve déjà dans cette échappée. Maxime Marotte (BH-SR Suntour-Peisey Vallandry) et son futur coéquipier Stéphane Tempier (TX Active-Bianchi) sont de la bonne. Puis le groupe s’égrène dans la montée de la Flûte, technique et vertigineuse sur son sommet. Les premières attaques individuelles se dessinent, et c’est Stéphane Tempier, qui bénéficie là de la présence de son coéquipier Tony Longo, qui se porte en tête à la faveur d’une descente. Constatant avoir creusé l’écart sur ses adversaires, le meilleur tricolore des Jeux de Londres décide d’insister.
A cet instant de la course, on est encore loin, très loin, de l’arrivée. Bien des pilotes avant lui se sont essayés dans des tentatives isolées, mais rarement ils sont parvenus à mener à bien un tel raid solitaire. Stéphane Tempier a pour lui l’expérience et l’intelligence. Sans jouer les chiens fous, il insiste dans les collines de l’arrière-pays, creuse l’écart dans les descentes, gère la différence dans les montées, et constate avec encouragement que la distance avec ses poursuivants se stabilise autour de la minute. Ses poursuivants ne sont pourtant pas les derniers venus : il y a là l’Allemand Jochen Kass (Multivan Merida Biking Team), son compatriote et tenant du titre Moritz Milatz (BMC MTB Racing Team) et le double lauréat du Roc d’Azur Christoph Sauser (Specialized Racing). Trois hommes surmotivés par l’enjeu d’une victoire à Fréjus.
A 20 kilomètres de l’arrivée se dresse alors le col du Bougnon et sa rampe de terre qui attire un large public. Stéphane Tempier fend la foule et savoure pour la première fois l’émotion de franchir le Bougnon en tête. De là, la mer Méditerranée se dessine en toile de fond. Les pilotes ne l’atteindront que par une succession de descentes ardues qui ne leur permettront pas de se relâcher, bien au contraire. D’ailleurs, la progression vers la mer est marquée par l’ascension de la bosse en ciment, sur laquelle commence à buter l’échappé solitaire. A cet instant, son avance est retombée à hauteur de la demi-minute. Sans paniquer, Stéphane Tempier gère son pécule et surtout le préserve sur la plage de la Galiotte. Le Gapençais franchit décidément tous les secteurs stratégiques en tête, emprunte le Chemin des douaniers et se rapproche de la base nature. Pour autant rien n’est encore fait à l’entame d’un final roulant.
Heureusement, le soleil qui cogne sur Fréjus a chassé le vent. Sur la piste cyclable, Stéphane Tempier ne perd rien. A l’entrée sur la base nature, il est assuré de tenir bon et d’aller chercher la plus tonitruante victoire de sa carrière, lui qui se sera hissé cette saison parmi les meilleurs pilotes français, 11ème et 1er Bleu aux Jeux de Londres. Echappé bien avant les Clapiers, le pilote de 26 ans, qui portera l’an prochain les couleurs de BH-SR Suntour-Peisey Vallandry, signe à Fréjus un numéro qui restera dans les annales du Roc et succède au palmarès à Jean-Christophe Péraud, dernier Français lauréat de la classique il y a cinq ans. Le podium, lui, se décide au sprint entre ses trois poursuivants restés impuissants. Pour la 2ème place, Jochen Kass franchit la ligne le premier devant Moritz Milatz et Christoph Sauser.
Classement :
1. Stéphane Tempier (FRA, TX Active-Bianchi) les 56 km en 2h15’23 » (24,8 km/h)
2. Jochen Kass (ALL, Multivan Merida Biking Team) à 15 sec.
3. Moritz Milatz (ALL, BMC MTB Racing Team) m.t.
4. Christoph Sauser (SUI, Specialized Racing) à 17 sec.
5. Alban Lakata (AUT, Team Topeak) à 2’27 »
6. Maxime Marotte (FRA, BH-SR Suntour-Peisey Vallandry) à 2’54 »
7. Wolfram Kurschat (ALL, Team Topeak) à 3’10 »
8. Robert Mennen (ALL, Team Topeak) à 5’11 »
9. Julien Taramarcaz (SUI, BMC MTB Racing Team) à 5’12 »
10. Sébastien Carabin (BEL, Versluys Pro Mountain Bike) m.t.