Maxime Marotte au départ du Roc d’Azur 2018 | © Vélo 101
Maxime, cette huitième place est presque inespérée…
Dans ce contexte oui. En temps normal une huitième place ne serait pas vraiment une satisfaction. Le week-end a été bien chargé: beaucoup de sollicitations sur les stands avec les partenaires et les dédicaces. C’est un moment important pour nous en tant que coureurs de rencontrer nos fans. Ils sont toujours très nombreux. Cannondale est une marque de prestige et il y a une communauté assez forte qui aime bien venir pour discuter et échanger. Derrière il y avait aussi des apéros, des soirées… Je suis donc vraiment surpris de ce résultat. Comme quoi, quand on y va sans pression, juste pour le plaisir, ça peut fonctionner, peut-être pas pour la gagne mais pour bien figurer.
Quelles ont été tes impressions par rapport au parcours? Est-ce que le plus compliqué à gérer c’était la base finalement?
Il y avait pas mal de boue sur le début et la fin du parcours. Mais tout s’est bien passé pour nous; vendredi c’était compliqué, samedi aussi, mais à mon avis aujourd’hui (dimanche, ndlr) c’était quand même une cran plus facile. Il y avait juste quelques passages où il y avait de grandes flaques. Malgré ça j’ai vraiment apprécié car certaines parties étaient très intéressantes. Le grip était meilleur que d’autres années vu qu’il n’y avait pas de poussière et que c’était légèrement humide. Les adaptations qui ont été faites sur le circuit sont bonnes.
Penses-tu que le parcours gagnerait à être un peu plus modifié chaque année, ou est-ce que les pourcentages de modifications qui sont apportés chaque année sont suffisants?
Globalement, même si des modifications sont faites, on retrouve des sections qu’on a pu faire il y a dix ans. Il n’y a pas cent cinquante possibilités pour les organisateurs. C’est compliqué à gérer au niveau de l’organisation je pense. Ca reste hyper plaisant pour les « top-pilotes » comme pour « monsieur tout le monde » et c’est vraiment ce qui est le plus important. Il y a un bon équilibre entre engagement et technicité. C’est parcours abordable pour tout le monde, mais même un pilote de haut niveau arrivera à tirer son épingle du jeu. Je m’en suis rendu compte aujourd’hui (dimanche dernier, ndlr) en parvenant à faire des écarts dans certaines sections. Je ne pense pas qu’il faille modifier trop de choses pour être honnête. Il faut aussi respecter l’histoire de cet évènement qui a un format bien défini.
Aimerais-tu participer au Roc Gravel en plus du grand Roc lors d’une prochaine édition?
Pourquoi pas. Je ne sais pas trop. Je n’ai jamais fait de gravel, mais cannondale a un super modèle (le Slate) qui serait parfait pour cet évènement. Il y a quand même un client avec Steve (Chainel) qui fait ça à fond à chaque fois. Ca pourrait être sympa, mais pour être honnête quand je vais en tout-terrain je préfère être sur mon Scalpel, c’est sur ce vélo que je me sens bien et que je prends le plus de plaisir. Mais une fois, pour changer, ça peut être une idée. J’ai déjà doublé une ou deux fois dans le passé le Roc Marathon et le Roc d’Azur, alors pourquoi pas.
Quel bilan tires-tu de ta saison 2018?
Globalement, il est assez bon quand même. Je termine troisième au classement de la coupe du monde de cross-country, ça reste une performance de premier plan. Il y a quand même la déception d’un Mondial raté avec cette quatorzième place qui ne me satisfait pas. On a tenté des choses à l’entrainement avec l’équipe de France courant juin, notamment en hypoxie. Ca n’a pas fonctionné, il faut être clair, et ça m’a plombé sur le mois de juin. Malgré ça j’ai sauvé cette troisième au général de la coupe du monde, mais la fatigue est revenue en septembre pour le mondial. C’est dommage car j’ai été très près d’en « claquer » une ou deux sur les premières manches de coupe du monde; ça s’est joué à pas grand chose. J’ai fait également un bon mois d’août où j’étais dans le match pour la victoire au Mont-Sainte-Anne. Ca reste satisfait. Il y a juste ce petit point noir concernant le mois de juin. C’était quelque-chose qu’on voulait tester depuis un moment, on s’est dit que c’était maintenant ou jamais. On a quand même tiré beaucoup d’enseignements de ça. Malheureusement, on ne pensait pas que, si ça ne se passait pas très bien, ça aurait été aussi difficile. Il y a des hauts et des bas dans le sport de haut niveau. Je reste quoiqu’il en soit dans une dynamique de progression, je cherche des solutions pour avancer dans cette hiérarchie et essayer d’être le plus régulièrement devant.
Avec le recul, quel sentiment te laisse le championnat de France?
Je suis forcément déçu de perdre mon maillot. La course était tout de même serrée. Je savais que le titre serait compliqué à aller chercher car mes adversaires étaient plus en forme que moi. J’ai sauvé une médaille tout de même. D’ailleurs il me semble n’avoir raté qu’une seule fois une médaille depuis que je suis chez les Elites sur un championnat de France. Ce jour-là j’ai été battu par plus fort que moi. Il n’y a pas à rougir, il faut féliciter Titouan (Carod) qui mérite ce titre et qui fait un très beau champion de France. J’apprécie sa manière d’être, sa manière de faire. C’est un pilote avec lequel j’aime bien partager des choses.
Maxime Marotte | © Michele Mondini
2018 est une année particulière avec la fin de carrière de Julien Absalon. Que retiendras-tu de la cohabitation avec lui, des stages en équipe de France, du temps passé à ses côtés?
C’est un athlète hors norme, perfectionniste, très fort mentalement et passionné par son sport. Je n’ai pas eu la chance de beaucoup partager avec Julien, notamment quand j’étais plus jeune car il n’était pas souvent en équipe de France. Je le voyais très peu. Il a passé plus de temps en équipe de France quand il est arrivé chez BMC. Il faisait beaucoup de choses de son côté. Je pense avoir plus appris aux côtés de Jean-Christophe (Péraud, ndlr) ou de Cédric (Ravanel, ndlr). Mais quand on côtoyait Julien on voyait bien que ce n’était pas un hasard si il a été aussi longtemps à ce niveau. C’était une locomotive pour le VTT français, une source d’inspiration. Il va manquer et beaucoup de gens sont encore un peu dans la transition. On a une belle génération avec des jeunes motivés. A mon avis on aura des jours heureux. Je ne sais pas si on retrouvera un Julien Absalon, car ça reste un athlète d’exception comme il y en a très peu, mais je pense que le VTT français se porte bien malgré ça.
On a vu cette année la belle progression d’un coureur comme Gerhard Kerschbaumer. Est-il devenu pour toi la principale « menace » dans le top 5?
Depuis le début de l’été, les chiffres parlent pour lui. C’est devenu un très grand prétendant à la victoire. Je reste curieux de voir comment ça va évoluer avec le temps. On sait que Gerhard a du talent, il ne sort pas de nulle part contrairement à ce que certaines personnes disent. Depuis qu’il est Elite, il a eu du mal à trouver les clés, il a fait quelques podiums mais pas grand chose. Depuis quelques temps il marche vraiment très fort. A voir avec le temps, une fois l’euphorie passée de tous ces résultats et qu’on est plus attendu, ce que ça va donner. Dans le paddock c’est en tout cas quelqu’un de discret et de très apprécié.
Tu mettrais d’autres noms dans cette vague de candidats potentiellement dangereux?
Il y a Matthieu van der Poel qui est sur le devant de la scène. C’est clairement un gros client à la médaille. Il y a aussi des coureurs qui ne sont pas très réguliers mais qui sont capables de gros coups comme Sam Gaze ou Anton Cooper, deux Néo-Zélandais, qui sont jeunes et très talentueux. Ils seront clairement à surveiller dans les années qui viennent.
Comment as-tu réagi après l’annonce de l’attribution des championnats du monde de VTT aux Gets en 2022?
Positivement, c’est beaucoup de bons souvenirs pour moi avec une médaille aux championnats du monde juniors en 2004. Depuis je n’ai pas eu la chance de refaire un mondial en France. C’est une bonne nouvelle pour le VTT français, en plus on sait qu’il y aura du monde. Je sais qu’on fera ça bien au niveau de l’a préparation car le public mérite d’avoir des athlètes au top pour ce type d’évènement. C’est vraiment génial en tout cas, on est une nation forte du VTT et c’est dommage de ne pas avoir plus souvent un championnat du monde en France.
Penses-tu déjà à ton après-carrière?
Oui, il faut bien. Je me vois bien aller jusqu’en 2022, d’autant plus avec cet évènement. Très franchement je pense être un athlète à maturité tardive et je crois que je vais continuer à progresser encore. J’ai vraiment de la marge, ne serait-ce qu’en terme d’heures d’entrainement. Des athlètes de 25 ans en font encore plus que moi pour certains. Finalement j’ai de la fraîcheur. Après est-ce que le mental restera ? Si à un moment je n’ai plus envie de me faire mal il sera temps d’arrêter. Par contre si le mental est là je pense que je suis capable de durer dans le temps. Je commence déjà à entendre « Marotte en 2024, il aura 38 ans, ça ne le fera pas » et ça, ça motive pas mal ! (rires)
On sait que tu as un très bon feeling et une collaboration très étroite avec tes mécanos. Souhaiterais-tu qu’il y ait un autre pilote français chez Cannondale pour transmettre ton savoir ?
Ce n’est pas une priorité. On essaie d’avoir un team où les coureurs viennent de plusieurs horizons car il y a différents marchés. Je crois qu’on a un beau mix. Après c’est à double tranchant. On peut prendre quelqu’un de très jeune qu’on va aider, mais si il y a deux Elites du même pays, il y a toujours ces histoires de sélections olympiques qui sont compliquées à gérer. J’ai vécu ça chez BH, mais ça s’est très bien passé avec Victor (Koretzky) qui m’a accompagné aux Jeux et avec qui je me suis toujours très bien entendu, comme avec Jordan (Sarrou). Cannondale veut des athlètes qui marchent, peu importe le pays, qui correspondent à la marque et qui savent faire le boulot pour la marque. Il faut voir. Nos coureurs français sont sous contrat avec plusieurs équipes, la priorité n’est pas de reprendre un athlète derrière. Par contre, avec le temps, si on a un jeune français talentueux ça serait un plaisir de l’avoir dans l’équipe.
Quel est ton programme pour les vacances à venir?
Je vais aller chercher du soleil en Ecosse avec ma compagne (rires). Je vais faire une coupure avec un arrêt complet de trois à quatre semaines sans sport. J’ai besoin de cette période, elle me fait beaucoup de bien. Alors c’est sûr, il me faut du temps pour revenir mais j’ai de nombreux mois pour ça. Ce n’est pas vraiment un problème car je suis un athlète qui marche très bien sur les premières courses. Il faut se laisser le temps de récupérer. J’ai senti après le mondial et après le mondial marathon qu’il y avait beaucoup de fatigue et c’est pour ça que je n’ai pas du tout cherché à préparer le Roc. Je sentais que l’organisme ne répondait pas dès que je le sollicitais dans des intensités hautes. Dans ces périodes-là il faut surtout écouter son corps et je suis plutôt bon pour ça. Il faut prendre soin de soi.
Comment se passe la reprise après cette coupure? Tu reprends par de la course à pied, de la natation ou avec un programme de préparation physique générale?
Je suis beaucoup en musculation dans ces périodes. J’ai déjà fait un bon cycle de musculation pour préparer 2019. J’avais besoin de prendre un peu de recul avec le vélo. Je me suis fait plaisir techniquement, mais physiquement j’ai mis l’accent sur la « muscu » parce que c’est un axe qu’on développe avec mon entraîneur depuis longtemps et on en tire beaucoup de bénéfices. J’ai un gros programme qui sera prévu en novembre-décembre de ce côté-là pour continuer à prendre un peu de masse musculaire comme je l’ai fait depuis deux ans. Ce sont des kilos qui me permettent d’être plus performant en short-track mais aussi sur les montées assez courtes des circuits actuels. Du ski de fond, de la course à pied, j’en faisais plus à l’époque mais maintenant un peu moins. Mon organisme a du mal à encaisser. J’ai une foulée très lourde qui n’est vraiment pas terrible. Je vais chercher d’autres sports, pas mal de vélo mais de manière plus ludique. Je suis quelqu’un qui aime vraiment son sport et qui n’a pas besoin d’en faire d’autres en hiver.