Hervé, vous êtes un des responsables de l’organisation des Chemins du Soleil, les inscriptions sont complètes depuis bien longtemps, comment expliquez-vous cet engouement ?
Nous avons certes une très belle région (Drôme, Hautes-Alpes et Isère cette année) avec des tracés qui permettent de répondre aux attentes des vététistes exigeants. Mais il faut pouvoir s’appuyer sur un réseau d’acteurs locaux qui connaissent parfaitement l’activité, le terrain et les attentes de notre public. C’est à mon avis parce qu’on a ces compétences sur tous nos territoires, qu’on est capables de proposer un tel produit. Le bouche à oreille, la presse et les sites spécialisés contribuent ensuite très largement à cette réussite.
Le mot Raid, le fait d’être par équipes de deux, pourrait rebuter, c’est le contraire, preuve en est qu’il y a toujours des passionnés qui sont loin des circuits trop aseptisés. Le ressentez-vous comme tel ?
Oui pour la partie élite. Je viens du raid multi où la progression se fait toujours en équipe et je sais, depuis plus de quinze ans, les difficultés qu’imposent une progression à plusieurs mais aussi les satisfactions que cela procure quand le résultat est au bout et que la solidarité a été optimale. L’aventure itinérante sur des parcours engagés reste un idéal pour beaucoup. Il faut reconnaître que tous les organisateurs n’ont pas la dimension financière et les appuis techniques et politiques que nous avons pour obtenir des accords de passage et une sécurité d’un tel niveau. C’est ce qui nous permet de proposer des parcours hors normes. Les sites VTT de la Drôme et des Hautes-Alpes existent depuis longtemps et sont animés par des gens compétents et passionnés, ce qui nous permet effectivement d’être aux antipodes de tracés aseptisés.
Et pour ce qui est des randos ?
La notion d’équipe n’est plus un critère. Nous avons évolué par rapport aux premières éditions car les concurrents ne voulaient pas évoluer dans un cadre contraint en binôme. Ils progressent souvent entre amis mais au gré de leurs envies du moment. Les Chemins du Soleil sont également des itinéraires balisés permanents : ce que les participants font en trois jours, les vététistes peuvent le réaliser à leur rythme en une semaine.
Quels seront les favoris de l’édition 2011 ?
J’ai regretté en 2010 le manque d’adversité. Je pense que cette année, ce sera différent. Vincent Julliot et Jean-Paul Stephan ont de réels atouts. C’est évident que la 3ème place de Vincent Julliot à la Transvésubienne marque les esprits. De même le palmarès et la science de Jean-Paul Stephan plaident pour eux sur une épreuve comme le Raid VTT. Guillaume Demangeon restera un adversaire dangereux sur une course qu’il connaît parfaitement et qu’il a gagnée à plusieurs reprises. Baptiste Turrel, son équipier, devra travailler spécifiquement pour parvenir à la même constance sur ces distances et enchaînements. Les Espagnols Fran et David De Buff auront aussi une grosse équipe avec des ambitions de victoire. Montagny devrait aussi être de la partie, ainsi qu’un autre ancien vainqueur, Mathieu Barthélémy, champion du monde de VTT O’. Enfin, les jeunes Mathéo Jacquemoud et Adrien Perret, 3ème en 2010, auront aussi des ambitions s’ils sont aussi forts en VTT qu’ils le sont en ski alpinisme en 2011.
Selon vous, quelles sont les qualités nécessaires pour bien faire sur le raid et pour « aller au bout » ?
Le mental reste très important sur une épreuve aussi longue, avec un tel dénivelé. L’un ou l’autre des équipiers a nécessairement une défaillance sur l’ensemble des trois jours et une nuit et cette gestion ne s’improvise pas. L’expérience est aussi déterminante. Sur cette course, l’assistance pour ceux qui en ont, la gestion des repas, des temps de repos, du matériel… sont vraiment des paramètres majeurs. Enfin, la connaissance de soi, tant dans l’approche physiologique de l’épreuve que pendant les longs moments sur la selle ou avec des portages.
En termes de logistique, on imagine que vous avez un plan A et un plan B en fonction de la météo, pouvez-vous nous donner des détails ?
Habituellement oui, car le week-end de l’Ascension tombe parfois tôt dans la saison et cela nous impose d’imaginer des itinéraires de repli, à cause de la neige possible sur les cols d’altitude. Cette année, comme l’épreuve est du 3 au 5 juin, nous n’avons pas ce problème. Seul un passage à gué est prévu sur le Buëch et si le niveau d’eau ne le permet pas, nous aurons une section de route de 2 kilomètres pour éviter ce passage. La nouveauté aussi cette année, c’est d’imposer des portes horaires très serrées sur l’étape de nuit avec deux tracés considérablement raccourcis pour ceux qui ne parviennent pas à passer dans les temps. Moins de quinze équipes risquent de prendre tous les CP et les écarts en temps seront alors importants puisque c’est le temps du dernier plus une heure de pénalité sur chacune des deux portes horaires.
Vous êtes à cheval sur différents départements, est-ce que ça pose des contraintes particulières ?
Oui, c’est nécessairement plus contraignant puisqu’on a par exemple vingt-et-un services déconcentrés de l’Etat qui donnent un avis au lieu de sept. Les découpages administratifs sont ainsi faits que, même pour 11 kilomètres sur 269, on travaille avec des équipes de secours différentes sur ce petit tronçon. Pour le changement de tracé, cela me semble incontournable pour faire plaisir aux concurrents. C’est donc effectivement beaucoup plus de travail mais c’est notre mission et c’est aussi motivant de travailler chaque année sur de nouveaux passages.
Quels sont les chiffres du raid ?
Ce sont 416 bénévoles et professionnels pour cette année (sans compter les équipes techniques des villes). On confectionne et sert 5300 repas sur les quatre jours, avec une formidable équipe cuisine, qui dort trois à quatre heures par nuit et qui est très soudée et super sympa. La logistique est lourde avec deux semi-remorques, deux camions frigo, deux camions de transport, trois minibus et hélas, beaucoup de véhicules (secours, production TV, photographes, placement des bénévoles…). 75 tonnes de sacs concurrents sont chargées et déchargées sur les trois jours. 55 boîtiers électroniques sont utilisés pour contrôler le passage des concurrents avec cette année, une équipe dédiée à la pose et dépose de tous les postes sous la responsabilité de Nicolas Moreau en lien avec Gil Buridan. Pour l’ensemble des recos plus le balisage intégral des 269 kilomètres du tracé définitif, cela représente aussi pas mal d’heures de toute l’équipe avec une très forte implication de Michel Morin avec le VC Saillans ainsi que Jérôme Lassale et le CC Die. Gil, Manu Danjou, Florent Besses et Rémi Fabregue et toutes leurs équipes sur la Drôme et les Hautes-Alpes.
Est-il encore possible de s’inscrire sur la rando, qui n’en a que le nom ?
Non. Chaque année, nous sommes complets une à deux semaines après avoir ouvert les inscriptions, soit fin octobre. Cette année, c’est le même scénario en élite, ce qui nous a surpris.
Une édition 2011 réussie, pour vous, ça passe par quoi ?
Comme pour tout organisateur, de ne pas avoir d’accident grave. Comme on n’a aucune inquiétude sur la qualité des tracés et la beauté des paysages traversés, notre principale crainte reste la météorologie. C’est déjà une épreuve extrême et si les conditions sont difficiles, on a un taux d’abandon non satisfaisant pour nous, et des risques multipliés avec des concurrents « en vrac » de partout.
Quels contacts peut-on donner pour en savoir plus ?
Les sites www.cheminsdusoleil.com et www.raid-vtt.fr sont déjà extrêmement complets. Stéphane a rajouté depuis l’an dernier des pages Facebook qui permettent aux passionnés plus d’interactions. Pour plus d’informations, il ne faut pas hésiter à nous le signaler : organisation@raid-vtt.fr. Nous sommes réactifs et toujours vigilants pour satisfaire au mieux les concurrents ayant choisi notre épreuve.
Propos recueillis le 3 février 2011.